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Cours L’expérience

Publié le 01/03/2020

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Nous nous sommes intéressés aux problèmes relatifs au contenu de l’expérience, de quelle façon ce dont nous faisons l’expérience peut corroborer nos croyances ou réfuter certaines hypothèses scientifiques. La tension entre notre capacité à utiliser des concepts et à recevoir passivement de l’information par l’intermédiaire de l’expérience devait être conçue comme constitutive de la notion d’expérience. Il y a toutefois un autre aspect que nous devons souligner : aspect subjectif ou phénoménologique.

 

L’expérience n’est pas qu’instructive, elle n’a pas pour seule fonction de nous faire connaître le monde, mais elle agit sur nous, nous transforme, autant par ce qu’elle nous apprend que de la façon dont elle nous l’apprend. Faire une expérience, ce n’est pas saisir abstraitement un contenu de pensée, mais se l’approprier par l’intermédiaire du corps. Lorsque nous entendons les oiseaux chanter, nous ne faisons pas qu’accepter, au sein de nos croyances, l’aptitude au chant de certains oiseaux bien déterminés, mais nous jugeons que l’effet est ou non agréable, qu’il annonce l’aube ou le crépuscule… Ce en quoi consiste une expérience est infiniment plus riche que le jugement qui la transmet. C’est Husserl qui analyse le débordement du contenu de l’expérience. Searle, dans la Redécouverte de l’esprit, insiste sur l’immense richesse de chaque expérience particulière : nous regardons un lac par la fenêtre et l’on nous demande de décrire ce que nous voyons, une telle description irait à l’infini.

 

B/ La qualité de l’expérience : le point de vue

Du point de vie de celui qui l’éprouve, l’expérience ne se réduit jamais à la phrase qu’il met dessus. Une expérience en appelle toujours une autre, plus ancienne. Une expérience possède toujours une certaine qualité qui fait qu’elle est véritablement une expérience. Il faut soulever la question de ce qui lie le contenu et le caractère de l’expérience.

 

Nagel a apporté une importante contribution au débat sur la nature des états mentaux associés aux expériences. Quel effet cela ferait-il d’être une chauve-souris ? Quelles sont les expériences qui sont les siennes ? Pour Nagel, nous sommes incapables de répondre à cette question. L’argument qui permet de défendre cette thèse est que les êtres humains ne sont capables d’imaginer que des expériences humaines, celles que nos semblables pourraient éprouver et ce, parce que notre point de vue humain est constitutif de l’expérience. Nous ne pouvons nous mettre à la place d’une chauve-souris pour nous représenter la façon qu’elle a de réagir aux ondes sonores qui lui permettent de repérer les obstacles. Notre système perceptif est trop différent du sien pour adopter ce point de vue.

La notion de point de vue est dès lors essentiel pour comprendre l’expérience : il faut cependant la distinguer de la subjectivité et du caractère privé de l’expérience.

Chacune des expériences qui appartient au flux de ma vie est mon expérience : je ne la partage pas avec une autre personne et elle participe à mon identité de sujet. Toute expérience est alors celle d’un sujet. Il n’y a aucune expérience abstraite, indépendante du sujet qui l’éprouve. Or, tout sujet est à l’origine d’un point de vue sur le monde, alors doit-on le prendre en compte pour l’étude de toutes les expériences ?

Caractère privé de l’expérience : le fait que moi seul ai accès à mes propres expériences. Je peux les décrire partiellement, en transmettre certains éléments, mais elles restent inaccessibles à un autre que moi. Mais cette propriété est-elle distinctive de l’expérience, qu’en est-il des autres états mentaux ? S’il fallait tenir compte de ce qui est strictement privé dans l’expérience, la seule investigation possible dessus serait l’introspection.

« L’expérience serait ce processus par lequel la sensation est associée à un c oncept en fondant un jugement à portée générale ; l’acquisition des connaissances serait tributaire d’une certaine passivité.

Le jugement se verrait confier un rôle secondaire.

Les jugements accompagnent nos expériences et sont affermis par l’habitude.

Plu s on fait une expérience, mieux on les y associe. Soit on est ime qu’à côté des jugements d’expérience, il existe aussi des jugements logiques et mathématiques dont on voit mal en quoi il dériverait de notre expérience.

Si de tels jugements existent, nous devrons remettre en cause le primat de l’expérience dans la formation de connaissances.

Se formerait -on le concept de 5 par abstraction, au terme de perception s suivies généralisées par le jugement ? Qu’en serait -il d’un chiffre incomparablement plus élevé ? Des notions aussi abstraites et purement logiques que la « contradiction » ? La connaissance requiert une autre source que l’expérience , celle que l’on nomme la raison, ou l’entendement.

Si nous sommes capables de jugements qui ne sauraient trouver leur source dans l’expérience, c’est que son rôle est secondaire et que l’entendement aurait ce rôle déterminant, celui -là même que nous avions attribué abusiv ement à l’expérience, y compris dans les jugements d’expérience. Pour reprendre notre exemple : quand nous disons « cette feuille est verte », un jugement de cette sorte nécessite la maîtrise de certains concepts .

Pour aboutir au concept vert, il faut être capable de réunir divers objets par leur point commun, les distinguer comme des objets distincts malgré cette communauté verte, les réunir sous une catégorie et en faire émerger une propriété détachée de tous les objets particuliers par abstraction : la c ouleur verte.

Cette activité de comparaison est le propre d’un entendement actif.

Les jugements d’expérience reposent donc sur un travail de l’esprit et ne procèdent pas d’une pure passivité.

Récapitulatif : l’expérience est la condition nécessaire pou r avoir accès au concept vert, mais pas suffisante, un travail de l’esprit est nécessaire pour aboutir, par abstraction, à un concept général.

C/ De l’expérience au jugement L’expérience s’oppose au jugement comme l’activité à la passivité.

Il est néces saire de se poser, et de résoudre, 2 questions pour comprendre leurs relations : 1/ Toute expérience est -elle susceptible de conduire à un jugement d’expérience ? Il y aurait un caractère ineffable de l’expérience qui s’y opposerait.

Le problème est de s avoir si nous pouvons faire l’expérience d’une chose dans le cas où nous ne posséderions aucun concept pour s’y appliquer.

Par exemple, un chien a l’expérience visuelle de l’os à moelle, mais nous hasarderions -nous à dire qu’il en possède le concept ? Peut -il y avoir des expériences au contenu non -conceptuel ? 2/ Un jugement d’expérience exprime -t-il exhaustivement l’expérience ? Goûtez un fruit exotique, les jugements formés sur l’expérience que l’on en a pourront -ils décrire exhaustivement ce que l’on vit ? sans doute pourrions -nous en reconnaître les divers éléments, mais le jugement paraît impuissant à décrire la totalité de l’expérience vécue.

Quand nous disons « il pleut », cela ne dit rien de notre déception, du souvenir que la pluie a peut -être r avivé… Chaque expérience déborde largement le jugement que nous produisons à son égard.

D/ Quel est le fondement ultime de la connaissance ? La réduction d’une expérience au contenu du jugement qu’elle suscite posait plus de problème qu’elle n’en résolv ait.

Nous sommes conduits à la question de savoir si l’expérience doit être considérée comme le fondement ultime de la connaissance.

Quel est le présupposé d’une telle question ? Que la connaissance s’élèverait sur la base de certitudes hors de doute, ce lles de la perception.

Que dans nos expériences, nous étions directement en contact avec les objets que nous pensons connaître, ou alors indirectement, à cause d’entités intermédiaires entre l’objet et nous -mêmes.

Les deux thèses de ce second présupposé sont problématiques et difficiles à soutenir : Le contact direct avec le monde comme socle de connaissances données immédiatement sans qu’aucun raisonnement n’intervienne.

L’absence d’inférence serait le signe que le jugement ne serait à l’origine d’aucu ne distorsion extérieure à l’expérience.

C’est notamment la thèse d’Ayer : certains objets sont connus directement par nous.

Le problème pourtant subsiste : comme il n’existe aucune. »

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