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Eléments de réflexion sur l'économie sociale et solidaire du point de vue de l'agriculture paysanne et de ses organisations

Publié le 22/10/2013

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Eléments de réflexion sur l'économie sociale et solidaire du point de vue de l'agriculture paysanne et de ses organisations     Jacques Berthomé Réseau APM      Quel avenir pour les petites paysanneries du Sud ?   Avec la mondialisation, on vit aujourd'hui une formidable mutation de l'économie et de la Société qui nous entraîne vers des rivages inconnus. Cette mutation s'apparente à celle que le monde a opéré lors de la 1ère mondialisation (1830 / 1914) avec la révolution industrielle, la formation du prolétariat, le développement du salariat, la disparition d'une grande partie de la paysannerie, de gigantesques migrations internationales (des populations de régions rurales et pauvres vers le Nouveau Monde, largement vidé préalablement de ses habitants – massacre des Indiens).   Aujourd'hui, la machine est lancée, il est illusoire de croire que l'on puisse l'arrêter ou revenir en arrière (vers quoi d'ailleurs : le développement dans un seul pays ? le socialisme étatique ?), on ne peut qu'infléchir sa trajectoire ; et ce n'est pas gagné d'avance…1   Cette libéralisation générale menace, en particulier dans les pays les plus pauvres (à l'économie la moins diversifiée où 70 à 90 % de la population vit de l'agriculture), la grande masse de la paysannerie (1,3 milliard d'actifs, 40 % de la population mondiale), restée en marge de toute révolution technologique (les agricultures "orphelines" comme les appelle le professeur Mazoyer, dont les écarts de productivité avec les agricultures les plus avancées vont de 1 à 1 000 (!), irrattrapable donc).   La question agricole à l'OMC oppose presque essentiellement les partisans d'une libéralisation poussée qui consacrerait la suprématie d'un certain nombre de grands pays agro-exportateurs (l'ex groupe de Cairns, élargi aujourd'hui au G20 incluant l'Inde et la Chine en particulier) et d'autres puissances, les USA et l'UE, mais aussi le Japon, qui pour des raisons multiples (géostratégiques, socioculturelles) se font les défenseurs de la souveraineté alimentaire (pour eux d'abord, pour les autres si besoin est, au moins verbalement) qui est un gage indéniable de sécurité alimentaire mondiale à long terme (imagine-t-on les risques d'une concentration des surplus alimentaires mondiaux dans quelques pays soumis eux aussi à des aléas climatiques et sanitaires de plus en plus extrêmes).   Le processus engagé depuis 10 ans dans le cadre de l'OMC repose sur le postulat que tous les pays ont un intérêt commun au libre échange (y compris dans le domaine agricole), ce qui manifestement ne correspond pas à la réalité dans les PMA (envolée des importations de produits alimentaires de base, baisse des exportations en valeur malgré la croissance des volumes exportés). La dénonciation des aides à l'agriculture pratiquées par les USA et l'UE, pour fondée qu'elle soit (car cette politique aboutit effectivement à perturber des marchés d'importance stratégique comme le riz, le coton, le sucre, les viandes…) ne remet pas en cause le credo libre échangiste de l'OMC. Le droit à la souveraineté alimentaire, c’est-à-dire de protéger son marché intérieur et d'aider son agriculture, ne peut s'exprimer dans ce cadre. Quelle que soit l'issue de la prochaine conférence de l'OMC à Hong Kong (échec ou compromis entre grandes puissances, ce qui semble plus probable), la petite paysannerie du Sud est selon toute logique condamnée.    Les impasses du modèle actuel   Dans la division internationale du travail qui est en cours, les industries manufacturières sont appelées à être largement délocalisées vers les pays du Sud, c'est la seule vision d'une réinsertion possible des populations migrantes provenant du milieu rural. Les dirigeants chinois, avec cynisme, prévoyaient dès la fin des années 90 la "sortie" de l'agriculture de 3 à 400 millions de personnes, ruine nécessaire des petits paysans pour permettre la modernisation de l'agriculture (extension des superficies d'exploitation, accès à de nouvelles technologies etc., pour ceux qui restent) et la fourniture de main d'œuvre à bon marché à une industrie manufacturière en pleine expansion. C'est ainsi que la Chine affiche depuis 20 ans des taux de croissance de près de 10 % par an, suivie de près par des pays comme l'Inde, l'Indonésie, la Turquie, le Brésil, le Mexique, disposant, presque toujours, d'une population nombreuse et donc d'un large marché intérieur. C'est ce qui fait dire à des chercheurs comme Judet que "le Tiers Monde est en marche".   Dans ce scénario, somme toute optimiste, il apparaît de grandes zones d'ombres : le Moyen Orient, sociétés bloquées depuis des décennies qui se débattent dans une crise d'identité de plus en plus violente, l'Afrique subsaharienne qui est en panne.   Après l'échec des politiques de développement menées depuis les indépendances par des Etats souverains, on a assisté à une reprise en main de ces économies par les institutions internationales (FMI et BM) afin d'assainir la situation ("rétablir les grands équilib...

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« d'actifs, 40 % de la population mondiale), restée en marge de toute révolution technologique (les agricultures "orphelines" comme les appelle le professeur Mazoyer, dont les écarts de productivité avec les agricultures les plus avancées vont de 1 à 1 000 (!), irrattrapable donc).   La question agricole à l'OMC oppose presque essentiellement les partisans d'une libéralisation poussée qui consacrerait la suprématie d'un certain nombre de grands pays agro-exportateurs (l'ex groupe de Cairns, élargi aujourd'hui au G20 incluant l'Inde et la Chine en particulier) et d'autres puissances, les USA et l'UE, mais aussi le Japon, qui pour des raisons multiples (géostratégiques, socioculturelles) se font les défenseurs de la souveraineté alimentaire (pour eux d'abord, pour les autres si besoin est, au moins verbalement) qui est un gage indéniable de sécurité alimentaire mondiale à long terme (imagine-t-on les risques d'une concentration des surplus alimentaires mondiaux dans quelques pays soumis eux aussi à des aléas climatiques et sanitaires de plus en plus extrêmes).   Le processus engagé depuis 10 ans dans le cadre de l'OMC repose sur le postulat que tous les pays ont un intérêt commun au libre échange (y compris dans le domaine agricole), ce qui manifestement ne correspond pas à la réalité dans les PMA (envolée des importations de produits alimentaires de base, baisse des exportations en valeur malgré la croissance des volumes exportés). La dénonciation des aides à l'agriculture pratiquées par les USA et l'UE, pour fondée qu'elle soit (car cette politique aboutit effectivement à perturber des marchés d'importance stratégique comme le riz, le coton, le sucre, les viandes...) ne remet pas en cause le credo libre échangiste de l'OMC.

Le droit à la souveraineté alimentaire, c'est-à-dire de protéger son marché intérieur et d'aider son agriculture, ne peut s'exprimer dans ce cadre. Quelle que soit l'issue de la prochaine conférence de l'OMC à Hong Kong (échec ou compromis entre grandes puissances, ce qui semble plus probable), la petite paysannerie du Sud est selon toute logique condamnée.    Les impasses du modèle actuel. »

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