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Arrêt de la CIJ du 27 juin 1986 : Affaire des activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci.

Publié le 31/08/2012

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1) Les rapports entre la norme conventionnelle et la règle coutumière. Les Etats-Unis avaient soutenu qu’il n’était pas possible de statuer sur les demandes que le Nicaragua fondait sur le « droit général et coutumier « sans recourir à la Charte des Nations Unies et sans considérer « le droit international particulier « établi par les conventions multilatérales en vigueur entre les parties. Dès son arrêt du 2- novembre 1984, la Cour avait déclaré que la codification ou l’incorporation de principes dans des conventions multilatérales ne les privait pas d’existence et d’applicabilité en tant que principes coutumiers, même à l’égard des pays parties auxdites conventions[18]. En statuant sur le fond, la Cour développe son analyse en évoquant l’identité et l’applicabilité des règles coutumières par rapport au droit conventionnel. Elle relève ainsi l’absence d’identité de contenu. En effet, elle expose que la Charte des Nations Unies ne couvre pas la totalité du domaine de la réglementation de l’usage de la force dans les relations internationales. D’autre part, quand bien même il y aurait identité exacte de contenu, la Cour affirme que l’incorporation de la norme coutumière au droit conventionnel ne ferait pas perdre à la première son applicabilité distincte.

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« 2) Le Traité d'amitié, de commerce et de navigation de 1956.Dans son arrêt du 26 novembre 1984, la Cour avait conclu que la clause compromissoire contenu dans ledit instrument lui confère compétence s'agissant de soninterprétation et de son application.

Toutefois, il convenait de s'interroger sur la portée de l'article XXI, paragraphe 1, selon lequel « le présent traité ne fera pasobstacle à l'application de mesures : c) concernant la production et le commerce des armes, des munitions et du matériel de guerre, ou le commerce d'autres produitslorsqu'il a pour but direct ou indirect d'approvisionner des unités militaires ;d) nécessaires à l'exécution des obligations de l'une ou l'autre partie relatives au maintien ou au rétablissement de la paix et de la sécurité internationale ou à laprotection des intérêts vitaux de cette partie en ce qui concerne sa sécurité ».

La Cour insiste alors sur le fait que la clause compromissoire ne lui donne pascompétence pour connaître d'un grief relatif à la violation d'une règle coutumière et que sa seule règle de compétence, en l'espèce, est la déclaration d'acceptation dela juridiction faite par les Etats-Unis en vertu de l'article 36§2 du Statut. B.

L'affirmation des règles coutumières. 1) Les rapports entre la norme conventionnelle et la règle coutumière.Les Etats-Unis avaient soutenu qu'il n'était pas possible de statuer sur les demandes que le Nicaragua fondait sur le « droit général et coutumier » sans recourir à laCharte des Nations Unies et sans considérer « le droit international particulier » établi par les conventions multilatérales en vigueur entre les parties.

Dès son arrêt du2- novembre 1984, la Cour avait déclaré que la codification ou l'incorporation de principes dans des conventions multilatérales ne les privait pas d'existence etd'applicabilité en tant que principes coutumiers, même à l'égard des pays parties auxdites conventions[18].

En statuant sur le fond, la Cour développe son analyse enévoquant l'identité et l'applicabilité des règles coutumières par rapport au droit conventionnel.

Elle relève ainsi l'absence d'identité de contenu.

En effet, elle exposeque la Charte des Nations Unies ne couvre pas la totalité du domaine de la réglementation de l'usage de la force dans les relations internationales.

D'autre part, quandbien même il y aurait identité exacte de contenu, la Cour affirme que l'incorporation de la norme coutumière au droit conventionnel ne ferait pas perdre à la premièreson applicabilité distincte. 2) L'existence et le contenu des règles coutumières.La Cour semble rejeter la thèse qui fait de la norme coutumière le fruit d'un accord tacite en affirmant que l'accord des parties quant à la teneur du droit internationalcoutumier relatif au non-emploi de la force et à la non-intervention ne la dispense pas de toute recherche des règles applicables de ce droit.

La Cour se conforme à sejurisprudence antérieure qui la conduit à attribuer une place fondamentale à la pratique et à l'opinio juris des Etats.

Cependant, la Cour relativise la place de lapratique en exposant que « la Cour ne pense pas que, pour qu'une règle soit coutumièrement établie, la pratique correspondante doive être rigoureusement conforme àcette règle »[19].

Il lui paraît suffisant que les Etats y conforment leur conduite.La Cour procède ensuite à l'identification du droit coutumier applicable.

Elle affirme tout d'abord la validité coutumière du principe de la prohibition de l'emploi de laforce dans les relations internationales.

La légitime défense collective constitue une exception à la règle générale d'interdiction et sa mise en œuvre est soumise à desconditions de nécessité et de proportionnalité.

Ensuite, le Cour déclare estimer que le principe de non-intervention fait partie intégrante du droit coutumier « bien queles exemples d'atteintes au principe ne soient pas rares »[20].

De plus, la Cour s'interroge sur l'illicéité des contre-mesures prises par un Etat contre un second quiaurait lui-même manqué au principe de non-intervention du troisième.

Elle affirme alors que « la légitimité de l'utilisation de la force par un Etat en réponse à un faitillicite dont il n'a pas été victime n'est pas admise quand le fait illicite en question n'est pas une agression armée »[21].

La Cour est également amené à se prononcersur le respect de la souveraineté de Etats et, enfin, elle aborde la question du droit humanitaire applicable au différend.Ainsi, les Etats ont l'obligation de respecter et de faire respecter en toutes circonstances ces règles, ce qui implique l'obligation de ne pas encourager des personnes oudes groupes prenant part au conflit au Nicaragua à agir en violation des dispositions de l'article 3 commun aux conventions de 1949. La CIJ apporte ainsi un nouveau souffle à la coutume internationale, ce qui permet de nous interroger sur le potentiel renouveau de la juridiction. III.

Un exemple de renouveau de la juridiction internationale ? A.

L'établissement de la responsabilité des Etats-Unis. La Cour considère comme établi que le gouvernement américain a financé les activités militaires et paramilitaires des opposants et qu'il leur a fournit par la suite une« assistance humanitaire ».

Elle estime également que les conditions requises pour l'exercice du droit de légitime défense collective par les Etats-Unis ne sont pasremplies en l'espèce.

Le Nicaragua exposait ainsi que le but de la politique et des actions des Etats-Unis était, dès l'origine, le renversement de son gouvernement.

LaCour n'approfondira pas cette question car les Etats-Unis, par leur soutien aux Contras, entendaient exercer une pression sur le Nicaragua dans des domaines oùchaque Etats jouit d'une entière liberté de décision en vertu du principe de souveraineté et, d'autre part, parce que le dessein des contras eux-mêmes était de renverserle gouvernement sandiniste.

La Cour affirme donc le principe de non-intervention dans les affaires intérieures d'un Etat et condamne une grande puissance, ce qui estun évènement important.

Certains ont alors pu invoquer les risques d'une tendance tiers-mondiste de la CIJ mais nous y voyons davantage l'émergence d'une nouvelledonne qui puisse permettre à chaque nation, petite ou grande, de vivre en paix dans une société internationale plus respectueuse de chacun.Reste cependant la délicate question de l'exécution des arrêts de la CIJ qui peut mettre en péril son autorité. B.

L'incertitude de l'exécution des arrêts de la CIJ. Théoriquement, tous les membres de l'ONU ont l'obligation de se conformer aux décisions de la CIJ[22].

L'arrêt a force obligatoire pour les parties au jour de sonprononcé[23].

En cas de non-exécution d'un arrêt par un Etat, l'article 94 alinéa 2 stipule que « si une partie à un litige ne satisfait pas aux obligations qui luiincombent en vertu d'un arrêt rendu par la Cour, l'autre partie peut recourir au conseil de sécurité et celui-ci, s'il le juge nécessaire, peut faire des recommandations oudécider des mesures à prendre pour faire exécuter l'arrêt ».

Néanmoins, cette procédure peut rencontrer une certaine limite avec la faculté pour les membrespermanents du conseil de sécurité, d'apposer leur droit de veto.

Ainsi, à la suite de cet arrêt du 27 juin 1986, le veto des Etats-Unis a fait échouer la mise en œuvre del'article 94 alinéa 2.

La question vint alors devant l'assemblée générale qui, sur la base de l'article 10 de la Charte, formula diverses recommandations à l'intention desparties.

La force de ces recommandations est évidemment limitée.

En réalité, on voit mal comment un Etat membre du Conseil de sécurité pourrait ne pas opposer deveto à une résolution dont le contenu serait « condamnatoire » et destiné à réprimer un comportement récalcitrant.Les arrêts de la Cour de La Haye n'ont somme toute pas été vains dans l'interruption des opérations militaires directes ou indirectes américaines au Nicaragua.

Eneffet, l'attitude de l'exécutif américain s'est modérée, notamment sous l'influence du Congrès des Etats-Unis qui n'a voté des crédits qu'au titre de l'aide humanitaire etqui a opéré un contrôle rigoureux de l'usage de ces fonds.

De plus, parallèlement, les initiatives de paix se sont multipliées, en particulier le plan Arias qui est unprogramme visant à instaurer une paix stable et durable en Amérique centrale, signé par les cinq Présidents d'Amérique centrale le 7 août 1987. Cet arrêt de la Cour internationale de justice constitue donc un arrêt de rupture et conduit à nous interroger sur le problème de l'acceptation de la juridictionobligatoire de la CIJ.

En effet, à l'occasion de cette affaire, le gouvernement américain a non seulement choisi de ne plus comparaître lors de la phase consacrée aufond mais il a également retiré sa déclaration d'acceptation de la juridiction obligatoire de la Cour[24].

La France fera également de même en 1974 lors de l'affairedes essais nucléaires.

Venant de deux Etats qui avaient été parmi les plus fervents partisans de la justice obligatoire, le désaveu était de taille.

On peut relever que descinq membres permanents du Conseil de sécurité, seul le Royaume-Uni accepte la compétence obligatoire de la Cour.

Les « cinq » n'en poursuivent pas moins depuisla fin des années quatre-vingt une concertation pour tenter de renforcer le rôle de la Cour… BIBLIOGRAPHIE. • Dictionnaire de droit international public, sous la direction de Jean SALMON, Bruylant, 2001.• Emmanuel DECAUX, Droit international public, HyperCours, 4ième édition, Dalloz, 2004.• P.M EISEMANN, V.

COUSSIRAT-COUSTERE et P.

HUR, Petit manuel de la jurisprudence de la CIJ, Paris, Pedone.. »

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