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Cour de Cassation, Soc., 21 juin 2006

Publié le 31/08/2012

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La faute n’étant pas nécessaire pour engager la responsabilité de l’employeur, la perspective d'une condamnation automatique en cas de harcèlement incitera certainement les employeurs à approfondir leur politique de prévention, car l'obligation de sécurité de résultat pourrait contribuer à donner de la consistance à la lutte contre les harcèlements en soulignant que l'employeur risque d'être condamné pour n'avoir pas pris les mesures appropriées pour préserver un salarié d'un danger lié à sa santé et à sa sécurité. Ainsi, la prévention et la sensibilisation valent mieux que le poids d’un recours judiciaire. C’est en tous cas la vision portée par de nombreux auteurs qui soulignent la nécessité et la priorité d’une politique de prévention au sein de l’entreprise. D’après l’article 3 de la directive communautaire du 12 juin 1989 la prévention est en effet définie comme « l’ensemble des dispositions prises ou prévues à tous les stades de l’activité dans l’entreprise en vue d’éviter ou de diminuer les risques professionnelles «. Il peut ainsi s’agir de : l’évaluation des risques, la sensibilisation des salariés, la formation des salariés (art. L.4121-2) mais aussi l’utilisation par l’employeur de son pouvoir de direction et de sanction comme c’est principalement le cas dans l’arrêt du 21 juin 2006.Par la mise en œuvre de leur pouvoir de direction et d’organisation, comme leur pouvoir de sanction, les employeur peuvent prévenir les situations de harcèlement comme en dispose l’article 122-49 du Code du travail (L.1152-4 nouveau). L’objectif est de préserver au mieux la collectivité de travail d’agissements néfastes à sa santé et à sécurité ce qui correspond à l’optique générale du droit du travail. Il existe donc un renforcement des actions de prévention de l’employeur induit des solutions jurisprudentielles, sachant qu’une politique de prévention est d’autant plus efficace qu’elle est menée par différentes acteurs au sein de l’entreprise. C’est ainsi que les instances représentatives du personnel ou le Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail. Il semble qu’il en soit ainsi dans l’arrêt qui fait suite au notre en date du 28 novembre 2007. La Cour, dans cet arrêt, vient confirmer sa décision du 21 juin 2006 tout en étendant son domaine d’activité. Il consacre une extension des pouvoirs du CHSCT en évoquant la nécessité de mobiliser le plus d’agents possibles sur la mise en place d’entretiens d’évaluation.

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« puisant sa source dans les principes fondamentaux du droit du travail.L'obligation pesant sur l'employeur de prendre les mesures nécessaires pour prévenir les agissements de harcèlement n'exclut pas la responsabilité du salarié en cas demanquement à sa propre obligation de sécurité. B.

Une responsabilité personnelle de l'employeur engagée en l'absence même de faute/ une responsabilité cumulée en l'absence même de faute Les responsabilités de l'employeur et du salarié se cumulent et ce cumul semble être favorable à la prévention des atteintes à la santé liées au harcèlement.Les salariés harcelés assignent l'association, dans l'employeur, en réparation du préjudice subi du fait des actes de harcèlement.

En appel, ces derniers sont déboutéscar « l'association n'était pas responsable du harcèlement moral dont les salariés ont été victimes, l'employeur n'ayant commis aucune faute ».

En effet, la hautejuridiction, en application du droit interne et interprété selon le droit communautaire, l'employeur est tenu envers ses salariés d'une obligation de sécurité de résultaten matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs.

Par conséquent, au regard de son obligation de résultat, l'absence de faute de sa part ne peutl'exonérer de sa responsabilité.

L'employeur n'a en effet, a commis aucune faute dans le sens où il n'a pas lui-même commis des actes d'harcèlement.

Cependant, ilpeut lui être reproché de ne pas avoir agi de façon efficace et efficiente pour prévenir le harcèlement et de le faire cesser.Rappelons que les juges du fond n'ont pas retenu la responsabilité de l'association, estimant que celle-ci n'avait commis aucune faute.

Ce point peut être de façonévidente discutable car elle avait tardé à agir.

Quoi qu'il en soit, l'affaire a donné l'occasion à la chambre sociale de rappeler l'obligation de sécurité de l'employeur nevaut également en matière de protection de la sécurité et de la santé de ses salariés.Dans la présente affaire, la responsabilité de l'employeur est engagée autorité tire de sa responsabilité personnelle.

Il semble qu'il ait tardé à agir.

Le fait l'employeurait mis un certain temps à agir pour faire cesser le harcèlement d'une part en lui retirant les fonctions d'encadrement et d'autre part en procédant à un licenciement estil constitutif d'une faute, Selon la Cour de Cassation, l'employeur n'a commis aucune faute.

Seule chose qui semble être soulevé dans l'arrêt est le fait qu'il ait mis uncertain temps à agir.

Or, la Cour de Cassation ne relève par conséquent aucune faute.

Cependant l'employeur est tout de même condamner.

La question réelle à seposer n'est donc pas de se demander s'il a constitué une faute mais bien sur quel fondement elle s'appuie pour argumenter ses dires.En effet, l'arrêt en question ne se contente pas de rattacher le harcèlement moral à la violation d'une obligation de sécurité, il considère que cette dernière à la natured'une obligation de résultat.

Cette précision est essentielle.

Les actes commis par un autre salarié au sein de l'entreprise, en l'espèce dans l'association Propana,engagent de plein droit sa responsabilité qans qu'il puisse s'en dégager en démontrant qu'il n'a commis aucune faute (ce que la Cour d'appel a jugé).

En consacrantune obligation de sécurité de résultat, la Haute juridiction est allée bien au-delà de l'étendue de la dite obligation.Le code du travail ne contient aucune disposition générale soumettant l'employeur à un régime de responsabilité civile.

Pourtant c'est bien sur ce dernier que s'appuiela haute juridiction pour condamner l'employeur : L122-49 – L122-51 et L230-2.

Il aurait été donc nécessaire de s'appuyer sur le code civil afin de condamner defaçon « légale » l'employeur.

Le chef d'entreprise est donc responsabilité de plein droit en cas de harcèlement commis par l'un de ses salarié, ce qui désigne à fortioril'article 1384 alinéa 5 du Code civil et la responsabilité des commettants du fait de leurs préposés.

Cependant, c'est sur la base des articles du code du travail que laCour de Cassation justifie sa condamnation.

Pourquoi ?Parce que les articles L230-2 et L122-51 font peser sur l'employeur une obligation de sécurité.

En réalité, il ne s'agit pas d'établir une faute à l'employeur mais bien dejustifier qu'il réponde des dommages causés par l'un de ses salariés.

La Cour de Cassation a rappel le contenu de l'obligation de sécurité du chef d'entreprise quoi doitêtre apprécié au regard des articles L230-2 et L122-51 du code du travail.

Le premier de ces textes dispose que le chef d'entreprise doit prendre les mesuresnécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé.

Le second se montre plus exigeant en lui imposant de prendre toutes dispositions nécessaires en vue deprévenir les agissements, en l'espèce de harcèlement.

Ces deux textes imposent donc à l'employeur une obligation d'agir et non une obligation d'indemnisation en casde dommages subis.

Il semble alors inexact de prétendre que l'employeur supporte une obligation de sécurité de résultat car le code du travail fait peser sur sesépaules une simple obligation de moyens (renforcée) mais il faut encore, pour cela, qu'une faute soit établie, ce qui n'est pas le cas e, l'espèce.

La Cour de Cassation adonc voulu se baser sur la théorie générale des obligations pour justifier sa condamnation.En rendant l'employeur responsable de plein droit du harcèlement commis par l'un de ses salarié et ce par un certain truchement de l'obligation de sécurité de résultat,la Cour de Cassation interprète extensivement … C'est toute la question de la portée de l'arrêt et de cette extension pour une meilleure protection. II.

La poursuite d'une évolution protectrice approfondie en matière de sécurité des salariés Le processus de la Cour de cassation semble suivre une logique précise en ce qu'elle souhaite une application rigoureuse du droit de la santé et de la sécurité (A)notamment en prônant la prévention comme remède aux actions en justice liées au harcèlement moral (B). A.

Une obligation de sécurité de résultat étendue au harcèlement moral subit par un salarié La Cour de Cassation a une approche dynamique tendant à assurer l'effectivité du droit fondamental des salariés à la sécurité et à la santé sur les lieux de travail. L'obligation de sécurité trouve son fondement dans la directive cadre du 12 juin 1989 (n°89/391), transposée dans le Code du travail par la loi du 31 décembre 1991(n°91-1414) visant à promouvoir l'amélioration de la sécurité et la santé des travailleurs.

A cette époque, l'obligation de sécurité de résultat s'inscrivait dans laprotection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l'entreprise.

C'est ainsi au niveau communautaire que s'est développé la notion de sécurité de résultatconsacrée dans les articles L.122-49, L.122-51 et L.230-2 (L.4121-1 nouveau) du Code du travail, sur lesquels se fonde l'arrêt du 21 juin 2006.Ainsi, depuis le 31 décembre 1991, l'obligation de sécurité dispose d'un fondement légal auquel la jurisprudence de la Cour de cassation, par un arrêt du 28 février2002, un fondement contractuel afin de donner la nature de résultat à l'obligation de sécurité.

Cette décision intervient en matière de maladie professionnelle.

La Courde cassation s'est alors attelée à un travail didactique et à intégré au fur et à mesure de ses décisions de nombreux domaines relevant de l'obligation de sécurité derésultat.

C'est ainsi les accidents de travail et les maladies professionnelles relèvent de l'obligation de sécurité de résultat par l'arrêt de la Cour de Cassation du 24 juin2005, tandis que l'arrêt de la Cour de Cassation du 29 Juillet 2005 intervient, lui, en matière de lutte contre le tabagisme sur les lieux de travail.Alors que la question restait posée en matière de harcèlement moral au travail depuis que la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002 a introduit desdispositions spéciales dans le Code du travail en la matière, la Cour de cassation a poursuivi son travail d'étendue de l'obligation de sécurité dans son arrêt du 21 juin2006.Ainsi, non seulement, le harcèlement moral entre dans le cadre de l'obligation de sécurité dont l'employeur est débiteur mais, la Cour de cassation retient que laresponsabilité devra être retenue même sans faute.

En conséquence, il suffit de constater un préjudice sur un salarié pour que la responsabilité sans faute del'employeur soit engagée.

Il s'avère que la Cour de cassation veut aller encore plus loin en matière de harcèlement moral que pour les accident de travail, maladieprofessionnelles ou tabagisme puisque dans ces matières il faut encore prouver une faute inexcusable.Au regard des textes servant de fondement à cet arrêt de 2006, il semble cependant que l'obligation pesant sur l'employeur n'est autre qu'une obligation de moyenpuisque l'article L.230-2 du Code du travail vient imposer de mettre en œuvre toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé mentales dessalariés, alors que l'article L.122-51, quant à lui fonde une obligation de prévention des agissements en matière de harcèlement.

Il apparait donc que l'employeur estdébiteur d'une obligation d'agir mais rien n'indique qu'il doive indemniser les salariés.

S'il ne s'agit qu'une obligation de moyens il n'en reste pas moins que le jugedoit vérifier l'efficacité des mesures de prévention mises en œuvre.

A titre d'exemple, n'est pas suffisant la diffusion d'une note de service rappelant le dispositif légal,face à une situation de harcèlement avéré (CA Paris, 18e A, 4 janvier 2005).De la réparation à la prévention, de la maladie professionnelle au harcèlement en passant par le tabagisme, l'obligation de sécurité de résultat s'est accrue à tel pointqu'elle trouve aujourd'hui à s'appliquer à tous les risques potentiels du monde de l'entreprise.

Obligation initialement rattachée au contrat de travail, elle tendaujourd'hui à s'en détacher pour ainsi devenir une véritable notion autonome.C'est ainsi que lorsque la responsabilité était recherchée dans l'article 1147 du Code civil depuis les arrêts dits « amiante » du 28 février 2002 et recouvrait ainsi lanature contractuelle, aujourd'hui la Cour de cassation se fonde sur le fondement spécial de l'article L.230-2 I du Code du travail (L.4121-1 nouveau). Plus qu'une obligation de sécurité de résultat, la notion est devenue aujourd'hui un véritable droit à la santé des travailleurs.

Par conséquent, la volonté d'ériger ledroit de la santé et de la sécurité des travailleurs n'est pas sans avoir d'incidences sur les politiques de prévention du harcèlement que la collectivité patronale doitmettre en œuvre en amont.. »

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