2eme partie : l'apparition du Royaume Féodal [pic] Le mot de « féodalité « apparaît en 1515 et il s'agit de la forme d'organisation politique et sociale médiévale caractérisée par l'existence de deux institutions : le fief et la seigneurie. A partir du partage de Verdun en 843, l'Europe va se diviser en petits territoires chacun dominé par des seigneurs: c'est le début de la féodalité. Ce type d'organisation va poser des problèmes aux historiens. Pour un premier courant d'historiens, la féodalité serait caractérisée par le pouvoir politique de propriétaires privés qui se soucieraient peu de l'intérêt public, on serait alors en présence d'une anarchie « organisée « et on assisterait à une revanche de la société sur le politique. Pour un deuxième courant d'historiens, la féodalité serait plutôt une forme de hiérarchie politique particulière plus ou moins imposée aux rois pour pallier ses faiblesses. Le problème de cette opposition d'interprétation  est qu'elle repose sur un anachronisme. En effet, la distinction Société / Etat a été inventée par les  historiens libéraux du XIXème siècle. Elle n'existe pas au Moyen Age. En réalité, la féodalité est bien un système politique où l'intérêt public n'a pas totalement disparu mais dans lequel des concessions de puissance publique ont été cédées à une aristocratie pour maintenir une certaine unité du royaume. Du coup, les relations socio-politiques sont fluides, il n'y a pas véritablement de hiérarchie absolue entre un roi triomphant et des sujets obéissants. Il y a la constitution d'un réseau stratégique entre une monarchie qui n'a pas totalement perdu son rôle de centre politique et les aristocrates puissants qui négocient leur subordination. CHAPITRE I : LA SOCIETE FEODALE Section 1 : la seigneurie § 1 : définition de la seigneurie C'est un territoire  dont  le  titulaire  exerce  des  droits  de  puissance publique (justice, armée, administration). Elle est née du  démembrement  de la puissance publique centrale à la fin de  la  période  carolingienne.  Ses titulaires, les seigneurs, sont  souvent  ceux  qui  détenaient  des  terres concédées par le roi ou l'un des grands du royaume. Les seigneurs  pouvaient concéder leur droit de puissance publique à l'un de leurs subordonnés. Ces  seigneurs  forment  des  unités  politiques   complètes.   Mais   leurs frontières ne sont pas toujours bien précises.  Elles  varient  au  gré  des guerres privées. Cela explique qu'au Moyen Age le concept de frontière  est  inopérant  parce qu'elles varient au gré des alliances guerrières. Elles sont  d'autant  plus fluides qu'elles sont souvent à cheval sur des frontières naturelles.  C'est le cas du comté de Comminges installé de part et d'autre des Pyrénées. § 2 : la puissance publique seigneuriale On peut la décomposer en deux éléments : A : les pouvoirs régaliens Lorsque les seigneurs se sont emparés de  la  puissance  publique,  ils  ont voulu l'exercer coutumièrement. Et dès le XIème siècle on voit apparaître les « mauvaises « coutumes, c'est- à-dire les pouvoirs que s'est arrogé le nouveau  seigneur  et  qu'il  impose coutumièrement à ses sujets. Ce sont des pouvoirs de puissance publique (régaliens). Ainsi,  le  seigneur détient  le  pouvoir  de  ban  (pouvoir  de  commandement).  Il  lui  permet d'édicter seul des commandements dans le  cadre  de  sa  seigneurie  et  lui permet d'investir ses subalternes de certaines fonctions publiques. A coté de ce pouvoir de « ban «, le seigneur administre la  justice.  Il  se charge de la haute justice ou justice de sang (mort d'homme, vol,  incendie, rapt, homicide). Il  perçoit  aussi  l'impôt,  comme  la  taille,  mais   peut   exiger   des contributions à la construction et au renforcement de la  forteresse,  voire un service de garde. Dans le cadre de  ces  pouvoirs,  il  peut  exproprier, opérer  des  réquisitions,  et  imposer  des  corvées   quoi   exigent   des prestations en nature. Il perçoit pour lui et ses hommes le droit de  gîte  ou  alberge.  C'est  un prélèvement qui a lieu lorsque le seigneur se  déplace  et  qu'il  a  besoin d'être entretenu. Enfin, lorsqu'il est suffisamment  puissant,  le  seigneur peut frapper monnaie et va profiter  de  ce  privilège  en  jouant  sur  les mutations monétaires. Pour être complet, il faut souligner que  les  accords qu'il  signe  avec  d'autres  seigneurs  sont  de  véritables  traités   qui s'imposent à tous les habitants de sa seigneurie. B : les droits de nature économique Il est vrai que jusqu'au XIIIèmesiècle, l'économie marchande a disparu. Pourtant, le seigneur va percevoir des droits sur la production économique de l'époque. Il y a d'abord des droits de péage, de transit, et d'entrepôt sur les marchandises qui circulent par terre ou par eau sur sa seigneurie. Il contrôle également les foires et les marchés et taxe les étrangers ou aubains avec un droit d'aubaine. A partir du XIème siècle, les seigneurs vont percevoir les banalités, c'est- à-dire que les paysans du seigneur vont devoir lui payer une redevance pour moudre leur grain à son moulin et porter le raisin à son pressoir. Les paysans ne pourront pas aller chez un concurrent pour ces opérations, car ce pouvoir constitue un véritable monopole économique. D'ailleurs en vertu de ce pouvoir, le seigneur peut demander aux paysans d'attendre que les récoltes seigneuriales soient vendues pour pouvoir vendre les leurs. Ainsi, les seigneur se dotent des moyens de mener une véritable politique économique dirigiste. §3 : l'économie seigneuriale Cette économie du domaine seigneurial repose sur l'exploitation agricole. En effet, depuis la chute l'empire romain au XIIIème siècle, le commerce a reflué et l'économie seigneuriale dépend d'une certaine situation juridique des terres. Il y a d'abord le domaine retenu. C'est la partie de la seigneurie où le seigneur exerce une propriété directe : il retire directement le produit de l'exploitation. On appelle cela la réserve du seigneur. Les eaux, les bois et certains pâturages sont parfois des terres communes sur lesquelles les habitants de la seigneurie disposent d'un large droit d'usage. Enfin, le reste du domaine seigneurial est le domaine concédé. Le seigneur y exerce un droit éminent. Il n'exploite pas directement la terre mais perçoit simplement des droits sur l'exploitation ou la transmission de la terre par le concédant. Ainsi, celui qui s'est vu céder la terre a le domaine utile, il peut jouir du bien concédé, en récolter les fruits et progressivement transférer ses droits à un tiers. Mais son utilisation de la terre est constamment contrôlée par le seigneur qui peut révoquer cette concession. On voit donc que sur ce domaine éminent on promeut une propriété « cisaillée « puisqu'une partie des droits appartiennent au seigneur et une autre est laissée aux exploitants agricoles. Section 2 : le lien féodal et vassalique ou la concession militaire Ce lien repose sur la rencontre de deux institutions juridiques (des pratiques entre hommes) : l'hommage vassalique d'une part et le fief d'autre part. § 1 : l'hommage vassalique L'origine de l'hommage vassalique doit être recherchée dans le lien de fidélité carolingien :la commendatio. Les grands seigneurs utiliseront le contrat d'hommage vassalique afin de faire passer les hommes sous leur domination. Le mot hommage apparaît au XIIème siècle. C'est un contrat pour lequel un vassal s'engage dans la dépendance d'un seigneur. L'hommage est consacré par une cérémonie d'origine païenne. Le vassal s'agenouille devant le seigneur, et ce dernier lui prend les mains (immixo manum). Ensuite, le seigneur et le vassal s'embrassent sur la bouche : c'est le baiser de paix. Cette cérémonie sera rapidement christianisée et le vassal devra prêter serment de fidélité en jurant sur les écritures saintes. Ce serment conforte le lien car le parjure était sanctionné par l'amputation de la main qui a fauté. L'hommage vassalique institue un lien viager et personnel. Il peut viser des serfs (paysans quasi esclaves), mais sa vocation est de s'appliquer aux guerriers. Pour développer ce lien, dès le XIème siècle, les seigneurs associent à l'hommage la dation (la donation) d'un bénéfice qualifié de fief. (c'est une terre) Ce mot renvoie au cadeau qu'échangeaient les tribus germaniques pour conforter leurs liens. Rapidement, le fief va devenir la contrepartie automatique de l'hommage vassalique. Du coup, ce qui n'était qu'un lien personnel devient un lien réel. (propriété d'une chose) § 2 : le fief A : la consistance du fief Au milieu du XIIème siècle, l'interdépendance entre l'hommage vassalique et la concession du fief est définitivement acquise. Les juristes vont formaliser les règles régissant le lien féodo-vassalique. Souvent ce fief est une terre mais peut aussi être un simple revenu foncier. A la fin de ce siècle, des rentes monétaires sans assise foncière seront concédées comme fiefs-rentes. Enfin, on relève l'existence de fiefs-fonctions. C'est la concession de fonctions publiques d'agent local. B : la concession du fief L'octroi du fief La concession du fief s'effectue lors d' une cérémonie solennelle. Il s'agit de l'investiture. Elle se déroule après l'hommage et consiste à mettre le vassal en possession du fief, on dit qu'on le met en saisine. Cet acte pouvait se faire symboliquement par la remise d'un objet Puis vient l'aveu au cours duquel le  vassal  avoue  tenir  à  la  terre  du seigneur. Enfin a lieu la montrée du fief pendant laquelle  le  seigneur  et le vassal parcourent le territoire concédé. A partir  du  XIIIèmesiècle,  le  vassal  doit  dresser  un  inventaire  (ou dénombrement des biens). Le fief étant la cause de l'hommage, le vassal peut exploiter la  terre,  se voir confier des pouvoirs seigneuriaux. Toutefois, fief et seigneurie ne  se confondent pas sauf lorsqu'un propriétaire  terrien n'a pas de seigneur  au- dessus de lui. Ce n'est qu'à l'époque moderne que le principe inverse sera consacré. Les droits découlant de la concession féodale Le vassal doit au seigneur un service d'aide, l'auxilium, on dit que c'est un service noble. Il s'agit d'un service militaire. Celui-ci comprend la garde du château ou estage. Il peut aussi y avoir un service de chevauchée, expédition guerrière de courte durée. Enfin, le seigneur peut demander le service d'ost, un service de guerre beaucoup plus long. Cette aide peut aussi consister en des sommes d'argent mais on a vite réglementé cette aide à 4 cas : _le paiement de la rançon du seigneur _l'adoubement du fils aîné _la dot de la fille du seigneur _le financement du départ en croisade. une autre obligation est le service de conseil. C'est un service de cour. Le vassal doit être présent à la cour du seigneur pour juger un vassal félon. En effet, les vassaux ne sont jugés que par leurs pairs. Les litiges sont nombreux car en réalité le lien féodo-vassalique est bien fragile. Fragilité du lien féodo-vassalique Les vassaux sont avides de fiefs et vont multiplier les hommages à l'égard de seigneurs concurrents. Aussi au milieu du XIème siècle,  on  établit  un  hommage  prépondérant  ou hommage lige. C'est un hommage qui prime sur tous les autres. Mais cela n'empêchera pas d'autres causes de guerres privées, surtout  qu'il n'existe pas de puissance publique centralisée, notamment nombre de  vassaux s qui détenaient à  l'origine  des  terres  libres  vont  les  céder  à  des seigneurs puissants pour se rapprocher d'eux. Ces fiefs sont rendus aux vassaux sous la forme de concessions de  fiefs  de reprise. Mais à la moindre faiblesse du  seigneur,  les  anciens  vassaux  récupèrent leurs terres en pleine propriété,  c'est  dire  à  quel  point  le  fief  de reprise traduit une situation instable. En réalité, le système  de  sanction en cas de violation des  obligations  vassaliques  ou  seigneuriales  dépend largement d'un  rapport  de  forces.  Les  juristes  vont  prévoir  quelques principes. Si le seigneur gère la jouissance du vassal, ce dernier peut  s'adresser  au suzerain. Celui-ci est soit le seigneur du seigneur félon, soit le roi. C'est alors que sera mise en marche la procédure du désaveu qui  permet  au suzerain de devenir le seigneur direct du vassal floué. S  le  vassal  viole ses obligations, il encourt une confiscation temporaire du  fief,  c'est  la saisie, ou subit une confiscation définitive appelée commise. On procède alors au rite inverse de l'investiture, c'est le devest. § 3 : la patrimonialité du fief En principe au Moyen Age, le fief ne peut être ni  vendu  ni  légué  par  le vassal. Seul le seigneur peut choisir un nouveau vassal.  Mais  petit  à  petit  les vassaux vont accentuer leur emprise sur le fief. A : l'hérédité des fiefs L'enracinement du principe Dès le Xème siècle, les fiefs de reprise ou les  concessions  carolingiennes faites à des agents publics seront héréditaires. Mais ce n'est pas pareil pour les autres types de fiefs. Tout  au  plus,  on  admet  au  XIème  siècle  que  le  vassal  présente  la candidature de son fils à sa succession. Progressivement, la substitution du fils au  père  va  s'imposer  car  cette règle assure la stabilité de la gestion des fiefs. Mais le fils doit alors  être  réinvesti  du  fief  et  pour  marquer  cette succession, le vassal paye un droit appelé  droit  de  relief  ou  droit  de rachat. D'abord débattue entre le seigneur et le  nouveau  vassal,  cette  indemnité sera souvent fixée à un an de revenus du fief. A la fin du XIIème siècle, ce droit de relief ne sera  perçu  qu'en  cas  de succession collatérale. Finalement, la règle de succession du fief va s'imposer en ligne directe. Il faudra alors prévoir des règles : L'aménagement du principe Il y a différentes solutions coutumières qui seront proposées. En Normandie et en Bretagne, on  fait  prévaloir  l'indivisibilité  du  fief afin de pouvoir fournir un service militaire complet. 1) On imposera donc comme règle de succession la primogéniture mâle. 2) Mais à partir du XIIIème siècle, sous l'influence du  droit  romain,  on fera prévaloir l'idée du partage du fief ou parage. En vertu de cette règle, seul  l'aîné  doit  le  service  militaire  et  les autres frères l'aident pécuniairement. Ce système sera interdit en 1209 pour éviter l'émiettement du fief. 3) On prévoit  alors  une  nouvelle  solution  dite  « système  de  la  part avantageuse «   ou   du   « principal   manoir «.   c'est    une    position transactionnelle qui prévoit que l'aîné recevra la majeure partie du fief. Il faut dire  que  progressivement  les  vassaux  se  spécialisent  dans  la fonction guerrière, et viennent à constituer une caste et c'est  d'elle  que sort la noblesse juridique, or la succession noble s'oriente vers un  modèle lignager où  prévaut  l'aînesse  afin  d'éviter  un  trop  fort  émiettement politique. 4) Dans le midi, on trouve des systèmes de pariage ou co-seigneurie. En effet, le poids du système lignager est moins fort que dans le Nord. Dans toutes les règles prévues tant au Nord que dans le SUD, le problème le plus épineux qui se posait était celui de la succession féminine. Les juristes ont estimé qu'une fille pouvait succéder au fief si son mari pouvait exécuter le service militaire. Il avait alors le titre de chevalier- servant. Si elle n'était pas mariée, le seigneur pouvait la contraindre à choisir parmi 3 prétendants proposés son mari. Elle devait accepter sauf à risquer la confiscation de son fief. 5) L'Eglise soucieuse du libre consentement au mariage, luttera contre cette pratique. La seconde question concerne le cas de la minorité du successeur au fief. Deux systèmes seront prévus : le premier  système est la garde seigneuriale. Il permet au seigneur de récupérer temporairement le fief, d'élever le mineur et de lui restituer le bien à sa majorité. Le second système est la garde noble. Elle consiste à laisser la garde (ou bail) du fief à la famille du mineur jusqu'à sa majorité. B : l'aliénabilité ou la vénalité du fief Avant le XIIème siècle, on admettait l'abrègement du fief sous le contrôle du seigneur. Le vassal pouvait ainsi diminuer la valeur du fief en affranchissant des serfs, concéder des droits de justice, ou octroyer une franchise à une communauté d'habitants. La possibilité de vendre le fief est consacrée à la fin du XIIème siècle. Elle est encouragée par la reconnaissance de l'hérédité des fiefs, elle procède aussi de l'appauvrissement des vassaux du fait des guerres ou de la croisade. Cette vénalité reflète aussi l'influence du droit romain. Toutefois, le seigneur conserve un droit de préemption appelé « retrait féodal «. Ainsi, lorsque le vassal vend à un tiers, il faut présenter l'acheteur au seigneur, et s'il agrée le nouvel acheteur, il sera perçu un droit de mutation d'un cinquième de la valeur du fief. On appelle ce droit « droit de quint «. Le seigneur fera payer une taxe d'un cinquième de  plus , d'où le nom de « droit de requint «. A partir du XIIIème siècle, le consentement seigneurial deviendra une simple formalité si le racheteur peut assurer le service militaire. Toutefois, ce rachat pose problème lorsque des bourgeois sont les racheteurs. En effet, en achetant un fief, ces derniers cherchent l'anoblissement, le prestige mais sont incapable d'exécuter le service militaire, seul réservé aux nobles « de race « de sang.. C'est pourquoi une ordonnance de Philippe le Hardi de 1275 va limiter l'achat des fiefs par les roturiers (ou bourgeois). Ainsi, pour pouvoir acheter le fief et entrer dans la noblesse, le bourgeois sera contraint de payer un droit de « franc-fief «. Chapitre II : La monarchie ou royauté féodale En 987, Hugues Capet se débarrasse du dernier carolingien Charles de Lorraine. Il profitera d'une dissension entre Charles de Lorraine et son puissant protecteur l'Empereur germanique. C'est ainsi qu'Hugues Capet installe au pouvoir une dynastie qui va régner sur l'hexagone jusqu'en 1789. Cette longue dynastie va construire la monarchie capétienne et parallèlement la nation française, en se débarrassant des forces centrifuges au pouvoir royal héritées de la féodalité. (les ducs de Bourgogne, de Normandie...) C'est donc d'abord en tant que monarque féodal  que  les  princes  capétiens vont régner sur une entité plurielle et toute leur action va viser à  briser ces liens féodaux pour unifier un  espace  unitaire  appelé  progressivement France. En fait le roi lui-même est un seigneur féodal   mais n'était pas  n'importe quel seigneur. Son pouvoir reposait sur une légitimité  spécifique  qui  va  lui  permettre tout doucement de subvertir la pyramide féodale.(de s'emparer  des  pouvoirs des autre seigneurs) Section 1 : la légitimité du roi féodal § 1 : le sacre-élection En 987, Hugues Capet fait réunir à Senlis une assemblée de grands  barons  à l'initiative de l'archevêque Adalbéron de Reims. Il obtient de l'Assemblée que soit écarté du trône  le  dernier  carolingien Charles de Lorraine. Du coup, le principe d'hérédité au trône sera écarté. Les grands barons vont alors réutiliser la vieille élection germanique  pour porter au trône Hugues Capet. Toutefois, son accession à la couronne reste fragile. Ainsi, H. Capet va également se faire sacrer pour récupérer  la  légitimité religieuse que détenaient les carolingiens. (l'empire romain et religieux) Pour bien ancrer la dynastie, il fait  également  élire  et  sacrer  de  son vivant son fils Robert afin que celui-ci puisse le remplacer  sur  le  trône après sa mort. Ce rite  du sacre va se perpétuer jusqu'à Louis XVI. Pour conforter ce rite religieux, Adalbéron va ré  invoquer  la  théorie  du Ministerium Regis et va également évoquer le concept des rois  thaumaturges, c'est-à-dire qu'il considère que les rois étant « divins « sont  pourvus  de la capacité de faire des miracles  et  guérir  les  plaies.(vieille  théorie biblique  réutilisée  par  les  premiers  capétiens  pour   supplanter   les seigneurs) § 2 : la règle de la primogéniture La succession du fils d'Hugues Capet Robert le Pieux va poser un second problème. En effet, le fils de Robert le Pieux décède en laissant deux petits-fils. La belle-fille Constance avait une préférence pour le cadet, mais  conseillé par l'épiscopat, le roi Robert le Pieux va décider de s'en tenir  à  l'ordre des naissances pour nommer  le  futur  roi.  Ainsi  va  se  cristalliser  un précédent qui en suite sera toujours respecté : le premier enfant succède  à la couronne. Il faut dire que les capétiens essayent à toute force d'imposer la règle  de succession par primogéniture mais les  grands  princes  (plus  favorables  à l'élection) qui voulaient contrôler la succession au  trône  s'y  opposaient et le plus souvent vont déserter les assemblées au sacre. Il  reste  que les  capétiens  sont  toujours  arrivés   à   s'allier   avec l'essentiel des forces  politiques  féodales  pour  imposer  progressivement leur successeur. On  voit  donc  qu'au  début  de  la  dynastie  capétienne   la   succession héréditaire était loin d'être une règle  juridique  coutumière  parfaitement consacrée. § 3 : la prévalence progressive du principe d'hérédité à la couronne Le système du sacre-élection impliquait de distinguer le Rex Coronnatus (roi couronné) et le Rex Designatus (roi désigné). Pas forcément son fils parce qu'il fallait l'accord désignation des seigneurs. Il fallait donc que chaque roi ait réussi de son vivant à faire sacrer son successeur pour qu'il devienne roi sans contestation. Cette procédure va vite gêner les ambitions politiques des capétiens. En même temps, cette façon de faire fragilisait l'institution monarchique en rendant difficile la succession à la fonction royale. Du coup, la couronne menaçait toujours d'être vacante, et de susciter des guerres féodales pour s'en emparer. C'est pourquoi les capétiens vont progressivement imposer la succession héréditaire. Le fils succédant au paire ? Ils ne l'ont pas fait de manière réfléchie mais dans des cas difficiles, ils ont développé une stratégie qui a facilité l'ancrage de l'hérédité au trône. Ainsi en 1179, le futur roi Philippe Auguste est blessé au cours d'une chasse, et ne peut donc pas subir la cérémonie du sacre-élection à la date fixée. Une autre cérémonie sera organisée plus tard alors qu'il est près de la mort. A la mort de Philippe Auguste, son fils Louis VIII va lui succéder et ne sera sacré que trois semaines après le décès de son père. Le troisième précédent a lieu en 1270 :  Saint  Louis  (Louis  IX)  meurt  à Tunis en croisade. Son fils Philippe III est en Afrique et va exercer le pouvoir sans être  élu ni sacré. Il le sera un an plus tard. Désormais, le sacre-élection  ne  fait plus roi juridiquement mais le roi succède par l'hérédité. Il faut dire  que la règle de  l'hérédité  va  d'autant  mieux  être  acceptée  que  les  rois capétiens vont adroitement lier leur destin à  celui  des  grands  seigneurs féodaux. Tantôt par alliance guerrière, tantôt par des stratégies de mariage. Jusqu'au XIIIème siècle, les rois capétiens ne sont pas  toujours  les  plus puissants mais  les  plus  habiles  et  les  plus  chanceux  en  matière  de stratégie politique. Pour autant, le sacre va durer jusqu'en  1789  mais  sa  valeur  n'est  plus juridique mais symbolique. Le sacre conforte le  lien  politique  en  le  dédoublant  par  un  lien  de soumission religieuse. Section 2 : la mainmise royale sur la pyramide féodale Pour  reconstituer  un  pouvoir  royal  centralisé,   les   capétiens   vont s...