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commentaire homme à la cervelle d'or

Publié le 16/01/2013

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Commentaire de L'homme à la cervelle d'or, d'Alphonse Daudet Alphonse Daudet « ne peut conter un fait, présenter un personnage sans se mettre tout entier dans ce fait ou dans ce personnage, avec la vivacité de son ironie et la douceur de sa tendresse «, disait Zola. Est-ce de cela que lui vient sa grande renommée ? En effet, l'écrivain, né à Nîmes en 1840 et mort à Paris en 1897, est une figure importante de la littérature provençale. Il doit surtout sa popularité à La chèvre de monsieur Seguin et aux Lettres de mon moulin publiées en 1869. Il illustre souvent ses pensées en les retranscrivant en des histoires saisissantes, comme il le fait ici-même dans L'homme à la cervelle d'or. Il y raconte la vie d'un homme naïf, doté d'un trésor, et condamné par ses proches à user les sources de son précieux cerveau. En quoi ce texte est-il un apologue ? Nous verrons en premier lieu que c'est un récit plaisant et facile à lire, puis nous nous pencherons sur sa visée argumentative. Ainsi, L'homme à la cervelle d'or est un récit fantastique, destiné à tout public. Il est découpé en deux mouvements très distincts, ce qui lui donne du rythme.En effet, le fantastique domine bel et bien ce texte. On y retrouve donc un personnage fictif, possédant une « cervelle d'or «, mais son côté surnaturel n'est pas remis en cause. La chute témoigne aussi de ce registre : elle est sombre et le héros entre petit à petit dans la folie. Ce texte est lisible par tout le monde, il suit un schéma narratif simple et logique : on retrouve donc l'élément initial, quand l'homme est amoureux. L'élément perturbateur est le fait que l'élue de son coeur soit tant avide de richesses et de biens. Les péripéties sont la mort de cette dernière et les frais qui auront lieu pour payer l'enterrement ; et l'élément de résolution est la vision de « deux bottines de satin bleu bordées de duvet de cygne «. Il faut noter que ce passage est paradoxal, c'est un élément de résolution qui va le conduire à sa perte, la scène de fin étant sa mort. Elle n'est pas exprimée de manière explicite, mais par « il présentait l'autre main toute sanglante, avec des raclures d'or au bout des ongles «, qui nous fait comprendre qu'il ne possède plus de cerveau, qu'il l'a gratté jusqu'à épuisement total. Deux mouvements très distincts sont perceptibles dans ce passage. Le début nous présente un registre lyrique, mis en évidence par le champ lexical de l'amour : « il aimait du meilleur de son âme «, « amoureux «, « avec amour «. La « petite femme blonde « semble être au centre de sa vie, elle a un rôle très important. Jusqu'à sa mort, dans la partie étudiée, le passage ne parle en effet que de cette dernière. Lui, aveuglé par ses sentiments, est heureux et n'a d'yeux que pour elle. Viennent ensuite les registres pathétiques et tragiques qui constituent la deuxième partie. « De peur de la peiner, il lui cacha jusqu'au bout le triste secret de sa fortune « nous montre que, épris de la jeune femme et ne voulant la décevoir, il se tue au fur et à mesure pour la chérir. Malheureusement, la « petite femme « préfère « encore les pompons, les plumes blanches et les jolis glands mordorés battant le long des bottines «. L'amour que l'homme ressent pour elle n'est donc pas réciproque. Le héros inspire alors la pitié. De plus, il est face à une puissance qui le dépasse : son cerveau est son seul moyen de survie (grâce à l'or) ; mais plus il survie, plus il se tue. Ce paradoxe met en évidence toute la douleur que subit cet homme. La fin du texte a d'ailleurs elle aussi un accent tragique, lorsque l'homme meurt. Il a fini par être dominé par une chose qu'il ne pouvait plus contrôler, la souffrance lui enlevant toute notion de survie. Bien que le fantastique s'y mêle, Alphonse Daudet émet une morale, son texte a donc une visée argumentative. Il ne se contente d'ailleurs pas de donner son avis sur une seule chose, mais critique un certain nombre de points différents tout au long du texte. Le premier élément critiqué est l'avidité. Le registre de la richesse est très présent dans le passage : « trésor «, « riche «, « cher «, « fortune «. De plus, « riche « est mentionné à trois reprises, et la répétition « Achetez-moi quelque chose de bien cher.../ Et il lui achetait quelque chose de bien cher. « ne fait qu'accentuer l'impression de cupidité. Dès le départ, la « petite femme blonde « est d'ailleurs présentée comme une profiteuse. En effet, elle « l'aimait bien aussi, mais [...] préférait encore les pompons, les plumes blanches et les jolis glands mordorés battant le long des bottines «. Cette phrase nous prépare aux évènements à venir, nous montre que cette dernière n'est avec lui qu'en partie par intérêt. En parallèle au pessimisme foncier présent, on retrouve une critique assez explicite de la femme. Comme nous venons de le voir précédemment, elle est décrite comme une personne avide de biens et qui, bien qu'elle ne soit pas au courant, mange « le crâne [de son époux] innocemment «. Elle veut tout avoir, a « tous les caprices «. Ainsi, elle fonctionne selon une logique évidente, ce qui rend le pauvre homme obligé de lui céder : elle lui demande en premier lieu s'ils sont « bien riches «, et suite à la réponse positive de ce dernier, elle lui réclame « quelque chose de bien cher «. On peut aussi remarquer qu'elle est assimilée à un oiseau tout au long du texte : « oiseau « apparaît à trois reprises, « plume «, « sautillant «. Cela peut symboliser le caractère volage de la femme, qui l'aime « bien «, et qui se meurt « un matin « « sans qu'on sût pourquoi «. Daudet critique ainsi le côté vénal de la femme en général, celle-ci accordant plus d'intérêt aux biens matériels qu'à son époux. Le troisième élément mis en valeur est l'amour. L'auteur semble avoir une vision pessimiste de ce dernier. De plus, il donne son avis quant à l'amour de l'homme à la cervelle d'or pour cette jeune femme, en s'impliquant dans le texte : il « devint amoureux, et tout fut fini... «. Il signifie là que c'est une mauvaise chose, et que cela le conduira à sa perte. Il faut d'ailleurs noter qu'à cause de ses sentiments, il deviendra fou jusqu'à probablement en mourir. L'amour non réciproque est aussi mis en valeur, et blâmé par l'auteur. Ainsi, on retrouve d'une part l'homme qui aime son épouse « du meilleur de son âme «, et d'autre part la femme qui l'aime « bien «. Pour finir, on peut remarquer que l'homme à la cervelle d'or n'a pas de nom. Il peut donc facilement être identifié à n'importe qui, comme si tous les hommes se berçaient d'illusions en aimant les femmes plus qu'elles ne les aiment. Ces trois points sont des critiques présentes dans le texte, mais elles se mélangent à l'histoire. Cependant, une morale fait aussi partie du texte, et a une toute autre visée. En effet, on peut tirer de cette fin que Daudet plaint un certain groupe de personnes en utilisant un vocabulaire dépréciatif : « qui sont condamnés «. Les « pauvres gens « peuvent symboliser des personnes nées avec un 'don', obligées de « vivre avec leur cerveau «. Ces dernières sont douées dans quelque domaine que ce soit, et peuvent en souffrir et même en mourir, si elles sont exploitées ou non reconnues. Cela fait un parallélisme avec l'histoire racontée juste avant, l'homme à la cervelle d'or s'étant fait exploité par sa femme, ses parents et ses amis. Naïf, en voulant rendre son entourage heureux, il en arrive à un état très proche de la mort. En effet, la mort semble être une des seules issues selon Daudet, mais il ne le dit pas explicitement : « quand ils sont las de souffrir... « . La signification des trois points de suspension est très importante, et dépendra de l'interprétation qu'en fera le lecteur. On peut aussi faire un lien avec la profession d'écrivain, ou plus généralement avec celle des artistes. En effet, ces derniers ont un certain talent, et sont « condamnés « à vivre avec. Selon le travail qu'ils fourniront, ils pourront subsister à leurs besoins, mais il leur faudra s'acharner pour survivre. C'est pour eux « une douleur chaque jour «, un effort de plus à faire, et pour certain la seule échappatoire est la mort.L'homme à la cervelle d'or, sous ses airs de conte destiné à tous, est bel et bien un apologue. Au travers d'un aspect fantastique se cachent des critiques de la société, qui touchent donc le réel. Nous pouvons maintenant nous pencher sur les autres textes écrits par Alphonse Daudet, tel La chèvre de monsieur Seguin, qui a aussi une visée argumentative très forte.

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