Devoir de Philosophie

Faut Il Chercher A Comprendre Une Oeuvre D'art ?

Publié le 17/01/2011

Extrait du document

Les musées sont souvent le lieu d’intenses débats entre les spectateurs au sujet des œuvres d’art qu’ils peuvent rencontrer. Ils se font part, entre eux, de leurs impressions, parfois au point d’en faire profiter même ceux qui ne souhaiteraient pas entendre leurs opinions et voudraient pouvoir goûter à ce qui se présente devant eux dans la plus grande quiétude et dans un silence presque religieux, digne d’une assemblée de quakers. Hélas, cela est rarement possible, au point que dans ses Mémoires, Jean-François Revel propose que l’interdiction de parler qui est faite dans les cinémas soit étendue aux musées et même à toute oeuvre d’art. C’est peut-être un verdict sévère que celui-ci, et peut-être n’est-il justifié qu’en partie. Car, c’est presque un truisme, mais si les gens parlent devant un tableau, une sculpture, un édifice, c’est tout simplement parce qu’ils ont quelque chose à dire au sujet de l’oeuvre qui s’offre à eux. Quelque chose à dire, qui n’est pas nécessairement des plus intelligents – et c’est cela qui semble gêner Revel, mais quelque chose quand même. Le contenu de ce quelque chose est varié, mais d’une manière générale, il concerne la façon dont les gens ont compris ce dont il parle. Et s’il y a discussion, c’est parce qu’ils veulent en débattre avec les autres : leur dire comment ils l’ont compris et savoir comment eux l’ont compris. Pour Revel, la plupart des spectateurs qu’il entend autour de lui semblent mal comprendre, ou tout du moins, moins bien que lui ou certaines personnes, d’où son irritation, qui peut-être est justifiée.

Mais justifiée ou non, une question se pose : qu’est-ce que comprendre une oeuvre d’art? La question est complexe, car si les œuvres d’art provoquent de si vifs débats, à la fois entre ceux qui les regardent et ceux qui regardent ceux qui les regardent, c’est justement parce que la réponse n’est pas tranchée. On sait qu’est-ce que comprendre un théorème mathématique : la réponse est presque d’ordre binaire, soit on a compris, soit non. Pour une oeuvre d’art, on se trouve sur un terrain glissant, beaucoup plus polémique. Si pour comprendre, j’ai besoin de la médiation de concepts, et si l’art est ce qui s’offre à moi sans concepts, la question est très embarrassante : est-il seulement possible de comprendre une oeuvre d’art? L’existence de critiques d’art, d’historiens de l’art et d’autres experts tendrait à l’affirmer. Dans ce cas, le problème est celui du sens à accorder à ce que l’on entend par comprendre, et peut-être que l’on ne comprend pas les montagnes de Cézanne de la même façon que l’on peut comprendre le théorème de Pythagore.

La difficulté est que « comprendre « est polysémique. « Comprendre « peut s’entendre de différentes manières : dans le sens d’un rapport d’inclusion (par exemple, un triangle comprend trois angles), ou encore dans le sens d’une adhésion intellectuel à une chose (quand on comprend qu’un triangle comprend trois angles). Autrement dit, soit quelque chose est compris en quelque chose , soit quelque chose est compris par quelque chose. Quel sens doit-on (re)garder? En premier lieu, est-ce absurde de dire que je puisse comprendre une oeuvre, au sens de la contenir en moi? Si cela est possible, cela ne doit pas être sans incidences pour ma personne : quelles sont-elles? La culture joue-t-elle un rôle dans cette expérience? Ou alors au contraire, en second lieu, comprendre une oeuvre d’art, n’est-ce que tenter de produire du sens à son sujet? Comment peut-on alors donner du sens à une oeuvre d’art? La culture a-t-elle là aussi un rôle à jouer? Mais peut-être est-il possible aussi, en troisième lieu, que ces deux sens de « comprendre « se rejoignent en un point que l’oeuvre d’art nous permettrait de dévoiler? Dans ce cas, ce point peut-il s’assimiler à la culture?

Liens utiles