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Le krach boursier, un rappel à l'ordre

Publié le 22/02/2012

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14-19 octobre 1987 - Le krach. De l'année 1987, les historiens retiendront sans doute ce lundi 19 octobre qui a vu s'effondrer les Bourses du monde entier puis, dans leur sillage, quinze jours après, le désordre gagner les marchés des changes. Les économistes, pour leur part, ne parviennent à être d'accord ni sur les causes de ces bouleversements ni sur leurs conséquences, et les hommes politiques ont tiré argument de cette indécision-qui les arrangeait-pour ne rien faire ou presque. Les raisons immédiates du krach ne font aucun doute : il est né de la conjonction d'un relèvement des taux de la Bundesbank ouest-allemande et de l'annonce d'un déficit commercial américain mensuel plus élevé que prévu. Deux symboles au demeurant bien choisis puisque l'argent cher aura été la plaie des derniers mois et les déficits américains le talon d'Achille de l'économie internationale. L'effet, en tout cas, a été radical : à Wall Street, en une seule journée, l'indice Dow Jones a perdu 508 points ( 22,8 %), et au palais Brongniart l'indicateur instantané a chuté de 9,7 %. Paradoxalement, c'est à Tokyo, où la Bourse avait grimpé le plus spectaculairement depuis des mois et d'où tout le monde attendait le signal du reflux, que la chute a été la moins vive : le Kabuto-cho est parfaitement maîtrisé par quelques grands investisseurs institutionnels. Les causes plus profondes de cet événement, en revanche, restent discutées : s'agit-il d'un ajustement sévère d'une " bulle financière " principalement spéculative qui avait gonflé au cours de l'été sans référence à l'économie réelle ? Est-ce, au contraire, plus gravement un rappel à l'ordre des marchés devant les déséquilibres qui perturbent depuis des années l'économie mondiale sans que les gouvernements parviennent à y porter remède ? Certes, les réactions des dirigeants comme des consommateurs, à la fin de l'année-qui auront permis finalement une croissance ( près de 3 %) supérieure aux prévisions,-plaident pour la première hypothèse : le krach financier serait alors aussi coupé de la vie économique que l'était la bulle financière ( on échangeait avant octobre quarante fois plus de produits financiers que de produits commerciaux), et ses effets sur l'activité seraient définis de faible ampleur. Au contraire, rien ne s'opposerait plus à une reprise des investissements que l'on disait bridés, parce que moins rentables que les placements financiers. Quelques firmes de courtage, quelques banques d'affaires, quelques agents de change obligés de se vendre pour le dollar symbolique seraient alors les principales victimes de l'événement. Mais un tel optimisme est-il bien raisonnable ? Les pertes boursières ont approché 1 000 milliards de dollars aux Etats-Unis et 50 milliards de dollars en France. Comment la consommation n'en serait-elle pas affectée ? Et puis surtout, les déséquilibres qui entravent l'économie mondiale n'ont pratiquement pas été réduits. Les risques de récession demeureront donc importants tant que perdureront les déficits abyssaux des échanges et du budget américains, les excédents du Japon, de l'Allemagne fédérale mais aussi des nouveaux pays industrialisés d'Asie, enfin l'endettement croissant des pays du tiers-monde, bref tant que les Etats-Unis vivront au-dessus de leurs moyens et absorberont, de ce fait, l'essentiel d'une épargne internationale qui devrait d'abord se diriger vers les pays les moins nantis de la planète pour les aider à se développer. BRUNO DE THOMAS Bilan économique et social, 1987

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