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Lecture analytique du fragment 56 - Les Pensées De Blaise Pascal

Publié le 20/09/2010

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I – La raison ne permet pas d’accéder au bonheur, au souverain bien

 

•    Pascal met à dos tous les philosophes. Il énumère avec ironie différentes solutions philosophiques et jette sur chacune le discrédit dans l’absence de vérité universelle.  « L’un dit que le souverain bien en est la vertu, l’autre le met en la volupté… «

•    Pascal se demande donc sur quoi l’homme construira-t-il le monde ?

Sur la Justice ? « Serait-ce sur le caprice de chaque particulier ? Quelle confusion ! / Sera-ce sur la justice ? Il l’ignore. « Mais les deux réponses sont réfutées : la première parce que la justice d’une seule personne ne peut qu'engendrer « la confusion «, la seconde pour la seule raison que le législateur « ignore « la vraie justice. Pascal donne ensuite la preuve de cette ignorance et de son incapacité à bien juger : la multiplicité des systèmes de justice, il n'y a pas de justice universelle, ni intemporelle.

 

II – Faiblesse de la raison qui ne permet pas d’accéder à la vraie justice

 

•   Aucune loi s’exerce de manière universelle chacun suit les mœurs de son pays. On suit la coutume (qui s’oppose à une loi universelle ou naturelle). On obéit aux lois qui fixent les usages, les coutumes c’est-à-dire une justice imaginaire : 

 

↘  Même si certains pense qu’« il y a sans doute des lois naturelles « et que la véritable justice « réside dans les lois naturelles communes en tout pays «, il n'en demeure pas moins que le principe d'une loi universelle reste une utopie car :

- « cette belle raison corrompue a tout corrompue «

- Personne n'est d'accord sur les principes qui doivent gérer la justice (autorité, fantaisie, coutume ?)

- L’idée d’une égale justice est montrée impossible et irréelle  « l'éclat de la véritable équité aurait assujetti tous les peuples « 

- La raison est imparfaite, incapable de connaissance « Rien suivant la raison n’est jute de soi «

 

¤   Le lieu :

Les frontières entre les pays, les différentes coutumes de chaque pays : chaque législateur fait les lois au regard des « mœurs de son pays « ; « la coutume fait l'équité «. Les frontières délimitent la justice qui est différente dans « tous les États du monde « /  « Plaisante justice qu’une rivière borne ! Vérité au-deçà des Pyrénées, erreur au-delà « 

Le climat : « on ne voit rien de juste ou d'injuste qui ne change de qualité en changeant de climat «et Pascal s'amuse à préciser les motifs géographiques (lignes imaginaires) qui en décident : la longitude « Trois degrés d’élévation du pôle renversent toute la jurisprudence. «, la latitude « Un méridien décide de la vérité «, les périodes astrales « l'entrée de Saturne au Lion «   

 

¤   le temps : 

« En peu d’années de possession, les lois fondamentales changent, le droit a ses époques. « ; « tout branle avec le temps «   

           ↘  Conclusion : « elle n’a pu encore trouver rien de ferme «

 

III – Cette « belle raison corrompue « est cependant nécessaire à l’ordre social

 

•   Les hommes ne doivent pas sentir la tromperie qui entraînerait fronde, révolte, désordre. 

•   En effet il ne faut pas que le peuple se rende compte de l’usurpation de la justice. 

« Dans cette confusion arrive que l’un dit que l’essence de la justice est l’autorité du législateur, l’autre la commodité du souverain, l’autre la coutume présente, et c’est le plus sûr «. On retrouve les deux thèses réfutées du début puis une esquisse de réponse. A défaut de n’avoir aucun fondement, on choisit le moins mauvais. Dés lors la diversité s'impose et il serait dangereux de vouloir tenter de remettre en cause un ordre établi selon la coutume, « c'est un jeu sûr pour tout perdre «. Il faut donc croire aux lois non parce qu'elles sont justes mais « parce qu'elle sont lois «. C'est ce que Pascal nous rappelle dans le fragment 62 : « Il est dangereux de dire au peuple que les lois ne sont pas justes, car il y obéit parce qu'il les croit justes. [...] Par là voilà toute sédition prévenue «

•   Nécessité de cette justice même si elle est corrompue et parfois injuste pour maintenir l’ordre social.

 

Conclusion : La raison est faible mais n’est pas une puissance trompeuse. Pascal démontre ainsi que la vraie justice n'est pas de l'ordre de l'humain, mais de l'ordre du divin : « J'ai passé longtemps de ma vie en croyant qu'il y avait une justice, et en cela je ne me trompais pas, car il y en a selon que Dieu nous l'a voulu révéler. « (Fg 468) Il montre que l’homme est misérable afin d’installer Dieu.

 

Quelques mots sur la stratégie argumentative :

 

 

a) L’art de convaincre

 

•  Argumentation rationnelle c'est-à-dire qui s’appuie sur notre raison alors même que pascal veut montrer la  faiblesse de la raison :

Intertextualité (p37) Montaigne, (p33) Virgile et Horace

Structure 

Il expose ce qui se passe par opposition à ce qui se passerait : le potentiel, c'est-à-dire ce qui serait possible si l'homme ne faisait pas reposer la justice sur ce qu'il y a de plus variable, donc de plus injustifié : « On la verrait plantée dans tous les états du monde et dans les mondes « : la notion de « loi fondamentale « (= immuable) n’a donc aucun sens

Beaucoup d’interrogations et d’exclamations

Interpelle le lecteur par une ébauche de discours  (p34)

 

b) Mais aussi de persuader

 

•  Beaucoup moins de persuasion que dans le fragment 41.

    - le recours à l'ironie : Ironie qui insiste sur la misère de l’homme

Antiphrases : « ces âmes fortes et clairvoyantes « « ces braves pyrrhoniens «, « nous voila bien payés «, « Plaisante justice «,

les [!]

 

L'absurde, les crimes sont justifiés par la position des planètes, les hyperboles, « Trois degrés d'élévation du pôle renversent toute la jurisprudence «,  la personnification, « un méridien décide de la vérité «.

 

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