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Roman de Renart (extrait).

Publié le 07/05/2013

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Roman de Renart (extrait). Ysengrin le loup, Tibert le chat, Chanteclerc le coq, tous ont été les victimes de Renart. Les hommes aussi, dont la présence dans cette épopée animale rappelle que les animaux y sont le reflet des vices et des institutions de la société féodale. Renart serait alors, comme dans cet épisode où il se joue des marchands, le porte-parole des petites gens victimes de l'autorité et des abus de toutes sortes. Roman de Renart (anonyme) Seigneurs, c'était à la saison où le doux temps d'été décline, où l'hiver à son tour revient. Renart était en sa maison, mais, ses provisions épuisées, il avait beaucoup de souci. La disette le pousse à se mettre en campagne. Tout doucement, afin que nul ne l'aperçoive, il s'avance parmi les joncs, entre le bois et la rivière. Si longtemps il chemine, qu'il atteint un chemin battu ; il s'accroupit et tend le cou de tous côtés. Il ne sait où chercher pitance et la faim lui mène âpre guerre. Ne sachant que faire il s'afflige, et se couche près d'une haie afin d'y attendre aventure. Voici venir à grande allure des marchands de poisson arrivant de la mer, transportant force hareng frais, car toute la semaine avait soufflé la bise. Ils avaient d'autres bons poissons, grands et petits, à pleins paniers, et leur charrette était remplie de lamproies et d'anguilles achetées en passant par les villages. Renart, qui trompe tout le monde, était encore éloigné d'eux d'une portée de flèche, quand il aperçut la charrette pleine d'anguilles et de lamproies ; à la dérobée il file et prend les devants, pour berner les marchands sans qu'ils s'en aperçoivent. Au beau milieu du chemin, il s'allonge. Écoutez comme il les trompa ! Après qu'il se fut bien vautré dans le gazon, il fait le mort. Renart, qui dupe tout le monde, ferme les yeux, retrousse les babines, et retient son haleine : vous conta-t-on jamais pareille trahison ? Sur place il demeurait, gisant de tout son long. Et voici les marchands, ne se doutant de rien. Le premier qui le vit regarde, puis appelle son compagnon : -- Voici un goupil ou un gaignon ! -- C'est un goupil ! répondit l'autre. Va vite l'attraper, fais attention qu'il ne t'échappe ! Il sera bien malin, Renart, s'il n'y laisse sa peau. Le marchand se dépêche, son compagnon le suit ; ils arrivent près de Renart, trouvent le goupil allongé. De tous les côtés ils le retournent, tâtent son échine et sa gorge, sans se soucier qu'il ne les morde. -- Il vaut quatre sous, dit l'un d'eux. L'autre répond : -- Dieu me sauve, il en vaut bien cinq, et à ce prix ce n'est pas cher. Nous ne sommes pas trop chargés ; jetons-le dans notre charrette. Vois donc comme la gorge est blanche et nette ! Et à ces mots ils le lancèrent sur la charrette et repartirent. Ils mènent grande joie entre eux et ils se disent : -- Pour le moment ce sera tout : mais dès ce soir, chez nous, nous lui retrousserons la robe ! Ce conte leur plaisait beaucoup, mais Renart ne fait qu'en sourire : de dire à faire, la route est longue ! Couché sur les paniers, il en ouvrit un de ses dents et en tira, sachez-le bien, plus de trente harengs. Le panier fut presque vidé, car il mangea de très bon coeur, sans réclamer ni sel ni sauge. Mais avant de partir, une seconde fois il jettera son hameçon : il s'attaque à l'autre panier, y fourre le museau, et ne manque pas d'en tirer trois beaux colliers d'anguilles. Renart, qui connaît tant de tours, met la tête et le cou dedans, et sur son dos le tout arrange. maintenant l'ouvrage est fini, mais il faut trouver un moyen de redescendre à terre : pas de marchepied ni de planche ! À genoux Renart étudie comment il pourra bien sauter, puis il avance un petit peu et des deux pattes de devant se lance hors de la charrette, au milieu du chemin, la proie autour du cou. Après avoir sauté, il s'adresse aux marchands : -- Dieu vous assiste ! À nous cette charge d'anguilles, et que le reste soit pour vous ! Source : Nony (Daniel) et André (Alain), Littérature française : histoire et anthologie, Paris, Hatier, 1990. Microsoft ® Encarta ® 2009. © 1993-2008 Microsoft Corporation. Tous droits réservés.

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