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Shakespeare, Henri IV (extrait).

Publié le 07/05/2013

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Shakespeare, Henri IV (extrait). Le Prince de Galles, fils aîné du roi Henri IV, semble faire peu de cas des affaires du royaume et passe ses nuits dans les tavernes en compagnie de son ami Falstaff, un jouisseur impénitent doublé d'un escroc. Falstaff, le roi de la débauche, espère voir son règne grandir et sa charge de brigand prospérer, une fois le prince de Galles devenu roi. Mais le Prince (Hal) sait déjà qu'il honorera sa charge en répudiant ses compagnons de beuveries et parmi eux, Falstaff, le mentor de sa jeunesse. Henri IV de William Shakespeare (acte I, scène 2) Entrent le Prince de Galles et sir John Falstaff. FALSTAFF Voyons, Hal, où le jour en est-il, mon garçon ? LE PRINCE Tu as l'esprit si épais à force de boire du vieux xérès, et de te déboutonner après souper, et de dormir sur les bancs après midi, que tu en oublies de demander vraiment ce que tu voudrais vraiment savoir. Que diable peut te faire l'heure où en est le jour ? À moins que les heures ne soient des gobelets de xérès, et les minutes autant de chapons, et les horloges des langues de maquerelles, et les cadrans des enseignes de maisons où s'envoyer en l'air, et le bienheureux soleil lui-même une belle fille bien chaude en taffetas couleur de flamme, je ne vois pas pourquoi tu aurais la curiosité superflue de demander où en est le jour. FALSTAFF Effectivement, c'est assez bien vu, Hal, car nous autres preneurs de bourses, c'est à l'heure de la lune et des sept étoiles que nous marchons, et non pas à celle de « Phébus, ah lui, ce chevalier-errant si radieux «. Et je t'en prie, doux farceur, quand tu seras roi, avec l'aide de Dieu pour protéger ta Grâce -- Majesté, devrais-je dire, car de grâce tu n'en auras point. LE PRINCE Comment point ? FALSTAFF Non, par ma foi, pas même de quoi servir de bénédicité avant un oeuf à la coque. LE PRINCE Bon, et alors ? Au fait, au fait. FALSTAFF Parbleu donc, doux farceur, quand tu seras roi, ne permets pas que nous qui sommes les gardes du corps de la nuit, soyons traités de voleurs des trésors du jour. Qu'on nous appelle forestiers de Diane, gentilshommes de l'ombre, mignons de la lune ; et que l'on dise de nous que nous sommes gens de sage gouverne, gouvernés que nous sommes, comme la mer, par notre noble et chaste maîtresse, la lune, dont le regard nous couvre quand nous filons en vrais voleurs, à la dérobée. LE PRINCE Voilà qui est bien dit, et qui est bien vrai aussi, car notre fortune à nous autres, hommes de la mer, à même flux et reflux que la mer, gouvernée qu'elle est comme elle par la lune -- à preuve, par exemple, une bourse d'or dérobée de la façon la plus résolue lundi soir, et dépensée de la façon la plus dissolue mardi matin ; on l'a prise en hurlant : Halte-là ! on la dépense en criant : Vite, à boire ! Et tantôt on est à marée aussi basse que le pied de l'échelle, tantôt à flot aussi haut que le bras de la potence. FALSTAFF Pardieu, tu dis vrai, mon garçon ; et notre bonne hôtesse de la taverne n'est-elle pas une fille tout à fait délectable ? LE PRINCE Comme le miel d'Hybla, vieux fêtard, et un justaucorps de buffle n'est-il pas une tenue tout à fait agréable pour tenir quelqu'un durablement à l'ombre ? FALSTAFF Comment ça, comment ça, farceur effréné, où veux-tu en venir avec ces saillies et ces subtilités ? La peste m'emporte si j'ai rien à voir avec un justaucorps de buffle ! LE PRINCE Et moi, la vérole m'emporte si j'ai rien à voir avec notre bonne hôtesse de la taverne ! FALSTAFF Eh, tu l'as souventes fois fait venir pour lui régler son compte. LE PRINCE T'ai-je jamais appelé pour en payer ta part ? FALSTAFF Non, je te rendrai ce qui t'est dû : là, c'est toi qui as tout payé. LE PRINCE Parfaitement, là et ailleurs, tant que j'avais bourse pleine, sinon j'ai usé de mon crédit. FALSTAFF Parfaitement, et usé à ce point que, sans la présomption avérée que tu es l'héritier présomptif -- Mais je t'en prie, doux farceur, restera-t-il de gibets en Angleterre quand tu seras roi ? et par là le courage serait-il dépouillé de son dû comme il l'est sous le joug rouillé de ce vieux pitre qu'est la loi ? Ne vas pas, quant tu seras roi, pendre le voleur. LE PRINCE Non, c'est toi qui le feras. FALSTAFF Moi ? À merveille ! Je serai un fameux juge. LE PRINCE Tu juges déjà tout de travers. Je veux dire que tu auras la pendaison des voleurs, tu seras par excellence l'homme du gibet. FALSTAFF Bon, Hal, bon ; d'ailleurs cela va dans le sens de mon penchant, tout autant que de traiter à la cour, je puis vous le dire. LE PRINCE Pour avoir une charge ? FALSTAFF Tout juste, une charge d'habits, dont le bourreau n'a pas une mince garde-robe. Sangdieu ! Je suis aussi mélancolique qu'un matou, ou un ours aux arènes. LE PRINCE Ou un lion devenu vieux, ou un luth d'amoureux. FALSTAFF Tout juste, ou le bourdon d'une cornemuse du Lincolnshire. LE PRINCE Et pourquoi pas un lièvre, ou l'humeur noire du fossé de Moorditch ? FALSTAFF Tu as les images les plus nauséabondes et tu es vraiment, pour les comparaisons, ce qu'il y a de pire comme charmant jeune prince encanaillé. Mais Hal, je t'en prie, ne me tourmente plus de vanités. Plût à Dieu que nous sussions, toi et moi, où nous procurer de bonnes réputations : un noble vieillard du Conseil m'a chapitré l'autre jour dans la rue à votre sujet, monsieur, mais je ne l'écoutai point, et pourtant il parlait très sagement, mais je ne lui prêtai nulle attention, et pourtant il parlait sagement, et dans la rue avec ça. LE PRINCE Tu as bien fait, car la sagesse crie dans les rues et personne ne l'écoute. FALSTAFF Ah, cette façon diabolique de citer l'Écriture, vraiment tu corromprais un saint ! Tu m'as causé beaucoup de tort, Hal, Dieu te le pardonne ! Avant de te connaître, Hal, je ne connaissais rien, et maintenant, s'il faut dire la vérité, je ne vaux guère mieux qu'un réprouvé. Il me faut en finir avec cette façon de vivre, et je vais en finir : par Dieu, si je ne le fais pas je suis une canaille. Je ne me damnerai pas pour un fils de roi, pas un seul, de toute la chrétienté. [...] Source : Shakespeare (William), Henri IV, trad. par François Victor Hugo, in Shakespeare, OEuvres complètes, Paris, Gallimard, 1959. Microsoft ® Encarta ® 2009. © 1993-2008 Microsoft Corporation. Tous droits réservés.
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« LE PRINCE Tu juges déjà tout de travers.

Je veux dire que tu auras la pendaison des voleurs, tu seras par excellence l’homme du gibet. FALSTAFF Bon, Hal, bon ; d’ailleurs cela va dans le sens de mon penchant, tout autant que de traiter à la cour, je puis vous le dire. LE PRINCE Pour avoir une charge ? FALSTAFF Tout juste, une charge d’habits, dont le bourreau n’a pas une mince garde-robe.

Sangdieu ! Je suis aussi mélancolique qu’un matou, ou un ours aux arènes. LE PRINCE Ou un lion devenu vieux, ou un luth d’amoureux. FALSTAFF Tout juste, ou le bourdon d’une cornemuse du Lincolnshire. LE PRINCE Et pourquoi pas un lièvre, ou l’humeur noire du fossé de Moorditch ? FALSTAFF Tu as les images les plus nauséabondes et tu es vraiment, pour les comparaisons, ce qu’il y a de pire comme charmant jeune prince encanaillé.

Mais Hal, je t’en prie, ne me tourmente plus de vanités.

Plût à Dieu que nous sussions, toi et moi, où nous procurer de bonnes réputations : un noble vieillard du Conseil m’a chapitré l’autre jour dans la rue à votre sujet, monsieur, mais je ne l’écoutai point, et pourtant il parlait très sagement, mais je ne lui prêtai nulle attention, et pourtant il parlait sagement, et dans la rue avec ça. LE PRINCE Tu as bien fait, car la sagesse crie dans les rues et personne ne l’écoute. FALSTAFF Ah, cette façon diabolique de citer l’Écriture, vraiment tu corromprais un saint ! Tu m’as causé beaucoup de tort, Hal, Dieu te le pardonne ! Avant de te connaître, Hal, je ne connaissais rien, et maintenant, s’il faut dire la vérité, je ne vaux guère mieux qu’un réprouvé.

Il me faut en finir avec cette façon de vivre, et je vais en finir : par Dieu, si je ne le fais pas je suis une canaille.

Je ne me damnerai pas pour un fils de roi, pas un seul, de toute la chrétienté.

[…] Source : Shakespeare (William), Henri IV, trad.

par François Victor Hugo, in Shakespeare, Œuvres complètes, Paris, Gallimard, 1959. Microsoft ® Encarta ® 2009. © 1993-2008 Microsoft Corporation.

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