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Les Caractères de La Bruyère (Résumé & Analyse)

Publié le 17/01/2022

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Encouragé par le succès triomphal des Caractères dès 1688, La Bruyère ne cessa d'enrichir son oeuvre de nouveaux fragments. A la quatrième édition, elle comptait déjà 350 « caractères » nouveaux. A la huitième édition, en 1694, l'ouvrage avait triplé de volume. Une fresque vivante qui témoigne de la société du XVIIe siècle.

« des moralistes du Grand Siècle, par son projet d'analyser la nature humaine, par sa verve satirique et par sonesthétique du fragment, qui rapproche les Caractères des Pensées * de Pascal et des Maximes* de LaRochefoucauld.

Mais son goût du portrait cruel, le plus souvent à clefs, lui vaut auprès de ses contemporains unsuccès particulier, largement fondé sur le scandale.

Les clefs ont disparu, l'art et la vérité du portrait sont restés. 2 • LE TEXTE Le pluriel du titre nous en avertit : l'oeuvre de La Bruyère, cinq fois remaniée et enrichie par son auteur, estconstituée de maximes et de portraits sans aucune thèse d'ensemble.

Les seize chapitres traitent chacun d'unaspect de l'homme dans diverses situations et dispositions, que ces dernières soient innées ou acquises.

Du premierchapitre (« Des ouvrages de l'esprit ») au dernier (« Des esprits forts »), le chemin conduit des préoccupationslittéraires à la réflexion métaphysique.

Il présente successivement « l'homme psychologique » (chapitres I-IV), «l'homme social » (V-X), « l'homme métaphysique » (XI-XVI).

Mais, à travers le morcellement et la variété desCaractères, l'unité est surtout à trouver dans le jeu des motifs, qui tous moquent ou dénoncent l'inauthenticité et lavanité humaines, et dans le ton, celui d'un « honnête homme », ironiste malicieux. 3 • LES THÈMES MAJEURS • Le métier d'écrivainComme les grands classiques (Boileau, Molière, Pascal, La Fontaine...), La Bruyère veut « instruire et plaire ».

Malgréla violente critique qu'il fait de ses contemporains, l'auteur a pour but' de dénoncer les travers des hommes qu'ilobserve pour mieux leur permettre de se corriger.

Il y parvient en revendiquant la dignité de l'« intellectuel » ou dumétier d'homme de lettres, se ralliant ainsi à la cause des Anciens, fondée sur l'imitation créatrice : « Tout est dit,et l'on vient trop tard depuis plus de sept mille ans qu'il y a des hommes et qui pensent.

[...] l'on ne fait que glaneraprès les anciens et les habiles d'entre les modernes » (Des ouvrages de l'esprit, 1).

Si imiter n'est pas répéter, maisinnover « à partir de » et reprendre « comme sien », le mérite personnel de l'homme de lettres est sauf.

Convaincude la nécessité du travail pour faire un livre, ainsi que d'un « goût absolu », capable de choisir pour chaque idée laseule expression qui la traduise avec un naturel parfait, La Bruyère résume là une théorie de l'art classique.• Le dévoilement d'une nature humaineL'ambition de l'auteur est de peindre « l'homme de tous les temps », donc de discerner chez ses contemporains destraits éternels.

Il ne s'agit pas pour La Bruyère de faire preuve d'imagination, mais d'une observation aiguë de laréalité qui l'entoure : « Je rends au public ce qu'il m'a prêté ; j'ai emprunté de lui la matière de cet ouvrage (...).

Ilpeut regarder avec loisir ce portrait que j'ai fait de lui d'après nature...

» (préface).

Ce « portrait » synthétique issud'une matière hétérogène est celui de la nature humaine, que l'auteur s'efforce de mettre au jour.

Constituée dedureté, d'ingratitude, d'injustice, de narcissisme et d'égoïsme, elle est l'énigme qui explique les diverses facettes dela société.

Nulle théorie ici ; seul le comportement des personnages nous renseigne sur leurs défauts.

L'acuité del'observation permet de reconnaître des types éternels dans des figures contemporaines, et vice versa : ainsi,Onuphre (« De la mode »), figure du faux dévot, Philémon (« Du mérite personnel »), image du parvenu, ou Acis («De la société et de la conversation »), emblème du cuistre, sont des portraits qui restent valables aujourd'hui. • Le pouvoir de l'argentLa Bruyère dénonce le monde des intrigues et de la cupidité, qui érige la richesse en pouvoir en lieu et place de lajustice.

Ici le mérite personnel est bafoué, remplacé par l'argent, signe de « noblesse » et'cl'« esprit ».

Nonseulement la passion de l'argent fait disparaître tout sentiment humain, mais elle insulte les miséreux par soncaractère ostentatoire.

Cette critique n'a pourtant rien de systématique, philosophique ou sociologique ; c'est dusentiment de justice et d'humanité qu'il s'agit, puisque, là où règne l'argent, « il n'y a rien à gagner à un tel marché» (« Des biens de fortune », § 13), rejoignant en cela l'idée selon laquelle « bien mal acquis ne profite jamais ».Arfure (§ 16), ignorée de tous lorsqu'elle était dans l'indigence, voit tout le monde rechercher sa compagnie et sedisputer les services que chacun pourrait offrir.

L'indignation de l'auteur ne porte pas tant sur la fortune acquise parle mari d'Arfure que sur l'illusion de cette dernière, qui croit être aimée pour elle-même.

4 • L'ÉCRITURE *Le goût de la provocationLa composition en fragments de l'oeuvre ou le choix de la discontinuité constitue un « choc culturel » pour l'époque.À un moment où s'essoufflent les grands genres, tels que la poésie, la tragédie, la comédie, l'éloquence mais aussi leroman, Les Caractères font figure de renouveau littéraire.

Ce défenseur des Anciens est résolument moderne : lasuccession souvent capricieuse de paragraphes, le « style coupé », la variété des formes (maximes, dissertations,portraits, énigmes, discours...) et des tons invitent à des lectures multiples et actives.

L'auteur y exploite àmerveille une rhétorique multiforme, usant tour à tour de dialogues, de définitions, de parallèles ou d'hyperboles :Giton « déploie un ample mouchoir et se mouche avec grand bruit; il crache fort loin, et il éternue fort haut » (« Desbiens de fortune »).

Cette palette stylistique est mise au service du projet moral : peindre les vanités, exprimer levide qui hante les hommes et les choses, stigmate d'une humanité déchue.• Une langue pittoresqueL'extrême précision des descriptions extérieures de personnages en situation confère à ces portraits un réalismeproche de celui d'un tableau que l'on aurait sous les yeux.

Tout comme le peintre classique s'efforce de « fixer » sonsujet sur la toile, La Bruyère tente de « saisir » l'homme de tous les temps.

L'auteur, qui peint volontiers l'es hommes. »

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