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Les Nourritures terrestres

Publié le 06/04/2013

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Le tirage des Nourritures, énorme aujourd' hui , fut quasiment nul pendant les vingts premières années consécutives à sa publication au Mercure de France, en 1897. Le livre ne fut pas même apprécié par ceux qui avaient Joué les précédents ouvrages de Gide. Les détracteurs de Gide ont voulu y voir l'apologie d 'un anti-moralisme et d'un individualisme débridés, confinant à un égoïsme qui reposerait sur un abandon incontrôlé aux in stincts.

« « Ne souhait e pa s, Nathana ël, trou ver Dieu aill e urs que partout.

» Deux mouvement s ly riqu es du début du deuxième livre, le premier célébrant les diver s e s nourriture s offerte s à la faim du dés ir, le second exaltant la faim elle-m ême , signe de ferveur NOU RRIT URES Je m'attends à vous, nourritures ! Ma.faim ne se posera pas à mi-route ; E lle ne se taira que satisfaite ; {!es mora les n'en sauraient venir à bout _F,t -de pr ivations je n'ai jamais pu nour­ rir que mon âme.

Satisfactions ! je vous cherche.

Vous êtes belles com­ me les auro res d'été.

Sources plus délicates au soir, délicieuses à midi ; eaux du petit matin glacées ; souffles au bord des flots ; go lfes encombrés de mâtures ; tiédeur des rives cadencées ...

Oh ! s'il est enco re des routes vers la plaine ; les touffeurs de midi ; les breuvages des ch amps, et pour la nuit le creux des meu les; S'i l est des routes vers l'or ient; des sillages sur l es me rs aimées ; des jardins à Mos­ sou l ; des danses à Touggou rt ; des champs de pâtres en H elvétie; S'il est des routes vers le Nord; des.foires à Nijni; des traîneaux soulevant la neige; des l acs ge lés ; certes Nathanaël, ne s'ennuie­ ront pas nos désirs.

Le rec ue il se clôt s ur un en vo i dan s leq uel G id e e njo int au l ecte ur d e je te r so n livre, c'es t à dir e de ne co nsid é rer so n en se ig n em e nt qu e comm e un m oye n de déco uve rte e t non comme un e fin en so i Nathanaël , à présent jette mon livre.

Éman ­ c ipe-t'en .

Quitte-moi.

Quitte-moi ; mainte ­ nant tu m'importunes ; tu me retiens ; l'amour que je me suis suifait pour toi m 'occupe trop.

Je suis l as de.feindre d' édu ­ quer quelqu'un.

Quand ai-je dit que je te voulais pareil à moi ? - C'est parce que tu diffères de moi que je t'aime ; je n'aime en to i que ce qu i diffère de moi.

- Éduquer ! Qui donc éduquerais-je, que moi-même ? Nathanaël te le dirai-je ? je me suis interminable­ ment éduqué.

Je continue.

Je ne m'estime jamais que dans ce que je pourrais faire.

Nathanaël,jette mon livre; net' y satisfais point.

Ne crois pas que ta vérité puisse être trouvée par quelqu'un d'autre ; plus que tout aie honte de cela.

Si je cherchais tes ali­ ments, tu n'aurais pas de faim pour les manger; si je te préparais ton lit, tu n 'aurais pas sommeil pour y dormir.

Jette mon livre ; dis- toi bien que ce n'est là qu'une des milles postures possibles en face de la vie.

Cherche la tienne.

Ce qu'un autre aurait aussi bienfait que toi, ne le.fais pas .

Ne t'attache en toi qu'à ce que tu sens qui n'est nulle part ailleurs qu'en toi-même ...

Ga llimard, 1989 «C haqu e désir m 'a plu s enrichi que la possess io n t o ujours fau sse de l'obj et m êm e d e m on d ésir.

» NOTES DE L'ÉDITEUR « Nous lui dev o ns l'exe mple d' une lib érat io n moral e s ans la qu ell e la litt ératur e ac tuell e ne se rait pas ce qu 'elle es t.

Les Nourritures t e rr es tres font parti e de ce très petit no mbr e d e livres do nt on p e ut dire q u'ils o nt v r aim ent chan gé des vies huma ines.

( ...

) Gid e affirm e la pos ition class iqu e de ! 'hum a nism e : limit ée à l'hori zon t erres tre, la vi e hum ain e possè de un se ns s uffisant.

( ...

) C 'es t la joui ssance de l'homm e tot al qu ' il reve ndiqu e : sensua lité e t int elli ge nce .

» Gaë tan Pico n, P anorama de la nouve lle littérature française, G allim ard , 1976.

« D ans ce livre de poésie philosophiq ue i l y a une philosophie.

On peut la poser( .

..

) mais e n se souve nant toutefo is qu'e lle n'est pas défi nit ive.

( ...

) Il y a des esprits dont l 'évo lution n 'estjama is définitive.( ...

) Je ne sa is si par un mo uvement de remous, la proc hai ne œuvre de M.

Gide ne pourra semb ler une sat ire ou une négation appa­ r e nt e de ce lle-ci.

C'est qu'à aucune de ses œ uvres, M.

Gide ne s'arrê te fixé ou satisfait.

Ple ine du passé, ch acune est grosse d'un autr e ave ni r.

»Léo n Blum, article paru dans l a R evue blanche en 1897, cité par Yvonne D avet, Autou r des Nourritures terrestres, Gallim ard, 1948.

« Quand ont pa ru mes Nourritures, on était en plein symbo lism e; j'ai cru qu e l 'art coura it de gra nds risqu es à se sé pare r ainsi résolument du na tur el de la v ie.

Mais mon livre était beauco up tro p nat u rel po ur ne point paraît re fac tice à ceux qui n'avaient p lus de goû t qu e po ur ! 'artificiel ; et précisé ment parce qu' il s'échappait de la litt éra ture, on n 'y vit d'abord que la q uin tesse nce de la l ittéra ture.

»André Gi de, le ttr e no n datée , mentio nnée par Y vonn e Dave t, ibid.

1 portrait par J.

E .

Blanc he, Mu sée d es Beaux-Ans, Rou en / Roger- V io l le t 2.

3.

4.

lithograp hies de Fra n çoise Boudi gnon.

Pre ss es d'Aujourd'hui .

Rom ba ldi.

Pari s.

1 970 /B.

GIDE 05. »

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