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L'œuvre de Proust

Publié le 14/09/2018

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Les hommes vieillissent et meurent. Des morts jalonnent la Recherche : celle, si douloureusement éprouvée, de la grand-mère du narrateur (Le Côté de Guermantes), celle de la femme aimée, Albertine (Albertine disparue), et celle de l'ami Saint-Loup. Une dernière matinée à l'hôtel de Guermantes fait découvrir des personnages grimés par la vieillesse, juchés par l'âge sur « de vivantes échasses ».

 

Mais si le monde se transforme selon la loi irréversible du temps, il change aussi en fonction de notre point de vue ; le monde change parce que nous changeons. Bien souvent nos désillusions ne sont que l'envers et l'ombre des rêves que nous avons nourris : ainsi, le narrateur adulte découvre l'insignifiance du Combray de son enfance ; l'amour le plus violent se défait lentement dans l'oubli, les êtres que nous avons aimés nous deviennent indifférents, les douleurs qu'on croit oubliées se réveillent. Ces volte-face du cœur sont ce que Proust appelle ses \"intermittences\".

À la recherche du temps perdu est bien « une espèce de roman >>, brassant près de cinq cents personnages et décrivant le monde étroit et déjà condamné des milieux aristocratiques et bourgeois de la fin du siècle. Proust a trouvé certains modèles autour de lui, mais aussi chez Balzac ou chez Saint-Simon, le grand mémorialiste de la cour du roi Louis XIV.

 

L'œuvre emprunte aussi au roman d'initiation : un homme, le narrateur, raconte son apprentissage du monde et de l'amour, et la naissance de sa vocation d'artiste. « Une vocation » : c'est le mot que Proust choisit lorsqu'il s'agit de résumer son projet et son œuvre.

 

Il y a donc dans la Recherche des ingrédients du romanesque, mais les dimensions et la nature du projet de Proust l'écartent des voies traditionnelles.

 

L'aventure racontée n'est pas celle d'un personnage classique, mais celle d'une conscience. Celle-ci s'exprime par la voix du narrateur, « un monsieur qui dit je », qui n'est ni tout à fait Proust, ni tout à fait un autre. Cette conscience raconte un apprentissage ; elle fait revivre à la mémoire de l'artiste qui écrit le jeune homme dilettante d'autrefois, commente et éclaire ses expériences et ses erreurs. Bien au-delà, elle essaie de nous faire entrer dans sa perception du monde, du temps et de l'espace, domaine des impressions, de la subjectivité radicale, jusque-là réservés à la poésie. Le narrateur nous associe à ses réflexions sur la société, sur l'histoire, sur l'art. Des scènes proches de la comédie voisinent avec des passages lyriques, des réflexions philosophiques,

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« des pastiches, des morceaux de critiq ue d'ar t.

Ainsi la Recherche ne se rédu it-elle à aucun genre : elle les aborde tous et elle en fait la synthèse.

Une « cathédrale , L'écr iture de la Recherche s'étend sur quat orze années 1 19 09- 1922).

En réalité, Proust n'a jamais cessé d'y travailler.

Ses œuvres de jeu­ nesse (Jean Santeuil, Les Plaisirs et les Jours) contiennent des ébau­ ches, des esquisses de scènes qu'il retrava ille plus tard.

li les rem anie pour les intégrer dans son texte, utilise ses articles, ses chroniques, ses past iches.

Cette œuvre, unique et tardive, est une somme, née de l' assem blage de fragm ents accum ulés depuis des années et qui a len­ tement mûri.

Dans les premiers projets, elle devait comprendre deux tomes 1 Le Temps perdu, Le Temps retrouvé), mais elle s'est prog res­ sivement amplifiée jusqu'à occuper les sept volum es qui nous sont par­ venus .

Ainsi, le texte n'a pas été écrit de façon continue .

Proust lui- même compare modestement sa méthode de trava il à la technique de la couture : il ajuste les" paperoles , de ses brouil lons comme on coudr ait un e robe.

Ou bien il se compare à l'ar chi tecte, bâtissant une cathédr ale.

Dans sa perspective, l'Art n'est pas un dive rtisseme nt.

Il n' est pas l'imitation de la vie, mais la vie elle-même, recréée, dotée d'un sens : (( La vra ie vie, la vie enfin découv erte et éclair cie, la seule vie par conséquen t vé cue, c'est la littér ature.

>> L'e sthétique de Proust Dans les dernières pages du Temps retrouvé, le na rrat eur, parvenu au terme de son apprentissage, s'apprête à comme ncer son œuvre : il en définit le sens et les principes.

Il refuse le réalisme, cet (( ar t qui est le double emploi de ce que nos yeux voient et de ce que notre intel­ ligence constate ».

Le réali sme produit des œuvres superficielles et sans bea uté qui n'arrivent pas à expr imer le monde profond et inconnu de l'ar tiste.

Le véritable artiste doit creuser sous les apparences de la vie ; il doit (( ch ercher à ap ercevoir sous de la matière, sous des mots, quelque chose de différent ».

Rien n'est insig nifiant, ni inuti le, ni indigne de son in térêt : car l'origina lité n'est pas dans le sujet traité ; elle est dans le regard de celui qui écrit : (( La seule chose importante est la profon­ deur où on a su descendre dans un sujet même frivole.

»À ce titre,. »

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