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L'Afrique avant 1945

Publié le 22/02/2012

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Malgré les perspectives qu'offrent certains ouvrages récents, l'histoire de l'Afrique demeure largement tributaire des courants de pensée européens et américains. Il est donc difficile de donner du continent une image authentique, une image qui ne soit pas, peu ou prou, le produit d'un amalgame de visions extérieures au monde Africain. Bien que l'histoire de l'homo sapiens ait débuté en Afrique, bien que son sol ait porté une civilisation plusieurs fois millénaire, une des premières dont nous ayons connaissance ­ l'Égypte des Pharaons ­, bien que le Moyen Âge africain donne l'exemple d'empires et de royaumes florissants, en contact avec l'extérieur (tels le Ghana, le Mali, l'Éthiopie), l'Afrique a été longtemps ­ et reste souvent ­ considérée par les Européens comme un continent sans passé et sans civilisation, comme de grands espaces politiquement vides, que l'ère coloniale aurait fait entrer dans l'histoire universelle.
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« investissements sont d'abord dirigés en fonction des intérêts de la métropole ou des communautés blanches quivivent sur place.

En France, c'est même au niveau du gouvernement, la doctrine avouée d'un Albert Sarraut, pourqui l'empire représente un vaste réservoir où puiser les ressources indispensables au relèvement économique de laRépublique.

Dans cette perspective, la croissance économique de la colonie n'entraîne pas toujours, loin de là, undéveloppement harmonieux.

L'infrastructure qui se développe sous le régime colonial ne touche que quelques zonestrès restreintes (sur la côte et le long des principaux axes).

L'irruption en Afrique de la civilisation industrielle creusedonc au sein de la société des disparités criantes que le temps ne fait qu'accentuer.

L'Afrique noire, plus encore quele nord du Sahara, se transforme en peau de léopard, où les taches du XXe siècle parsèment de grands espacesintacts. Intacts, c'est beaucoup dire.

La réorganisation économique des colonies affecte nécessairement ne serait-ce quepar les clivages qu'elle introduit dans les sociétés africaines l'ensemble de leurs territoires, à des degrés diverssuivant les régions.

Ainsi, en Afrique orientale et australe, le climat encourage les Européens à s'établir commeplanteurs, et l'on assiste au développement de véritables colonies blanches, dites colonies de peuplement.

S'il estvrai qu'ailleurs (notamment en Afrique occidentale), le nombre des résidents européens se limite au strict minimum,de quoi assurer la marche des affaires et le maintien de l'ordre, cela ne signifie pas que les nombreux villages qui,apparemment, poursuivent leur vie quotidienne à l'écart de la civilisation industrielle, échappent aux effets de lacolonisation.

La seule présence, même lointaine, même épisodique, de l'homme blanc mine de manière insidieuse lesfondements des sociétés autochtones.

A cet égard, l'activité incessante du missionnaire joue un rôle important.C'est lui, souvent, qui ouvre la voie au marchand, au soldat, à l'administrateur.

Dans un roman devenu célèbre,Things fall apart (Tout se désagrège), l'écrivain nigérian Chinua Achebe décrit de façon poignante l'émiettement desstructures d'un village au contact de l'Occident.

Quelque chose d'essentiel a changé dans la nature même dupouvoir, qui se répercute à tous les échelons de la société. Et, de ce point de vue, que l'administration coloniale soit française, belge, anglaise importe peu.

Sans doute, le styleest différent, les attitudes varient.

Ainsi, le Français, au-delà du mépris qu'il peut nourrir pour l'indigène, prétendmalgré tout le "civiliser", l'intégrer à sa propre culture, une façon de nier celle dont il le dépouille avec tantd'assurance.

Tandis que sous ses airs plus tolérants, l'Anglais demeure, profondément, bien trop imbu de sasupériorité pour vouloir inculquer aux autres les vertus inimitables du peuple britannique.

En tout état de cause, laculture du colonisateur finit, peu ou prou, par déteindre sur les élites qu'il forme pour ses besoins.

Et lesconséquences politiques de la mainmise étrangère sont, fondamentalement, les mêmes partout.

L'indigène n'est laplupart du temps qu'un sujet livré à l'arbitraire du gouverneur ou du commandant local, sur lesquels le contrôleépisodique de la métropole demeure très théorique.

En Europe, l'opinion publique n'a pratiquement aucune idée de cequi se passe réellement dans les colonies.

C'est donc de la personnalité des Blancs chargés d'administrer lesterritoires d'outre-mer que dépend en dernier ressort le sort des populations africaines.

Et seuls les personnagesexceptionnels savent résister aux tentations et aux abus d'un pouvoir quasi discrétionnaire.

Dans le meilleur des cas,les communautés locales perdent le droit ou, du moins, la faculté de disposer d'elles-mêmes.

A cet égard, il ne fautpas exagérer les différences qui, en matière de politique coloniale, séparent deux options apparemment opposées :administration directe et indirecte.

L'indirect rule tant vantée par Lord Lugard n'est le plus souvent qu'une façadederrière laquelle se déroule en définitive le même scénario qu'ailleurs : si les chefs locaux les plus complaisants àl'égard de la puissance coloniale restent en place, la source réelle de leurs pouvoirs change de manière radicale ;ces derniers ne relèvent plus ni du peuple ni des traditions, mais bel et bien du supérieur hiérarchique de soucheeuropéenne ; la nature du respect qu'ils inspirent en est irrémédiablement altérée.

Tout au plus cette formulepermet-elle à certaines aristocraties locales de renforcer leurs privilèges.

Au reste, les peuples soumis à cette formede gouvernement n'y trouvent guère leur compte.

Seule l'administration étrangère en profite pleinement, qui exerceainsi son autorité à moindres frais et de manière plus discrète. Tandis que l'Afrique dépecée n'est plus, semble-t-il, qu'un objet aux mains des puissances coloniales, c'est dudehors que sont fécondés les germes d'une sorte de renaissance africaine.

On assiste en effet aux États--Unis etdans les Antilles à l'apparition chez certains intellectuels noirs (tels Du Bois et Williams) d'un mouvement vers le"retour aux sources".

A plusieurs siècles de distance, les descendants de ceux qu'on a arrachés à leur pays natal etenchaînés au Nouveau Monde, eux-mêmes encore en butte au racisme larvé d'une société à laquelle ils neparticipent pas de plein droit, sentent le besoin de se tourner vers la terre de leurs ancêtres pour y puiser uneidentité distincte.

"L'Afrique est ma patrie", affirment-ils au moment même où les peuples du continents'appartiennent moins que jamais ; et, ajoutent-ils, "si le Noir devait un jour jouer un rôle dans l'histoire du monde,ce serait grâce à un mouvement pan nègre".

Le panafricanisme est né.

Sans avoir jamais pris beaucoup d'ampleuroutre-Atlantique, le mouvement exercera une influence non négligeable sur l'Afrique elle-même.

Le premier congrèspanafricain de l'après-guerre se tient à Paris en 1919.

Ni le lieu ni la date, bien sûr, ne sont choisis au hasard.

Ils'agit de faire entendre à Versailles, sinon la voix de l'Afrique, du moins celle de la solidarité noire.

Lespanafricanistes reprennent à leur compte certains des principes contenus dans les fameux quatorze points duprésident Wilson et discutés à la Conférence de la paix.

Sans doute, le droit à l'autodétermination, dans l'esprit desdiplomates de Versailles, s'applique uniquement aux peuples européens, et plus particulièrement à ceux de l'ex-empire austro-hongrois.

Il s'agit néanmoins d'une première brèche que les mouvements d'émancipation africains (àl'intérieur comme à l'extérieur) ne vont pas manquer d'exploiter.

D'autant plus qu'un des quatorze points se réfèreexpressément aux questions coloniales et invite les métropoles à tenir compte des intérêts des peuples colonisés.C'est dans cette perspective que la Société des Nations introduit en faveur des nouveaux territoires d'outre-meracquis par les Alliés à la suite de la guerre le régime des mandats.

Sans doute, les mandats B applicables aux ex-colonies allemandes laissent en réalité toute latitude aux puissances mandataires.

Le contrôle soi-disant exercé parla S.D.N.

est purement théorique.

Sans compter l'impuissance qui caractérise la nouvelle organisation, incapable. »

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