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Analyse raisonnée de l'Art Poétique (Fin) Chant IV (Boileau)

Publié le 28/04/2011

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boileau

   Raisons de l'existence de ce quatrième chant. — L'anecdote initiale ; le génie une seconde fois recommandé. — La flatterie et la critique. — Permission de transgresser les règles. — Le profit que comporte l'œuvre d'art : sa portée morale. — Le poète honnête homme. — L'éloge de Louis XIV. — Jugement de Boileau sur lui-même.    Il n'était pas indispensable d'ajouter un quatrième chant : le projet primitif ne le comportait sans doute pas. Si Boileau s'y est résolu, au prix de quelques répétitions, il a eu ses raisons qu'il convient de chercher.    En lisant attentivement le chant, on constate qu'il ne contient aucun précepte technique. Ce sont à nouveau des préceptes généraux, mais d'une valeur surtout morale. Ce n'est plus le poète dans son cabinet et à son travail, c'est le poète dans la vie et ses rapports avec le monde que Boileau veut nous montrer. Il ne s'agit donc plus de règles ; nous avons affaire à un moraliste.

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« t-il pas un poète pour mettre ses fautes contre les règles sur le compte d'une audace heureuse et nécessaire ? Notons toutefois la prudence de Boileau.

Il dit à Perrault, dans son Discours sur l'ode (1693) : « Ce précepte,effectivement, qui donne pour règle de ne point garder quelquefois de règles, est un mystère de l'art, qu'il n'est pasaisé de faire entendre à un homme sans aucun goût, qui croit que la Clélie et nos opéras sont les modèles du genresublime ; qui trouve Térence fade, Virgile froid, Homère de mauvais sens, et qu'une espèce de bizarrerie d'espritrend insensible à tout ce qui frappe ordinairement les hommes ».

D'ailleurs cette liberté que Boileau autorise ne doitse présenter que rarement.

Toute règle a ses exceptions, toute loi peut être interprétée dans ses applications.

Maisce n'est pas le poète qui de sa propre initiative se permettra une licence : il lui faut l'approbation éclairée d'un jugeimpartial.

Enfin il est bien certain que les grands principes de la poésie ne sont pas atteints par cette concession ;c'est au contraire pour les suivre qu'on fait fléchir l'étroitesse d'une règle technique particulière.

Ainsi dans l'exemplerapporté par Brossette, la règle de la propriété des termes paraît plus forte et plus impérieuse que celle qui règle lamesure et la cadence du vers. Nous voici arrivés au développement essentiel de ce chant : aux beautés de la forme poétique il faut joindre lasolidité et l'utilité des pensées.

La poésie ne doit pas être « un vain amusement » ; un profit réel pour le lecteurpeut et doit s'y joindre : Qu'en savantes leçons votre muse fertile Partout joigne au plaisant le solide et l'utile.

Un lecteur sage fuit un vainamusement, Et veut mettre à profit son divertissement. Ainsi est posé le débat des rapports de l'art et de la morale.

Il a été plus tard l'objet de discussions passionnées, autemps de l'art pour l'art.

Il ne peut être question de faire tomber sur Boileau les mépris dont Théophile Gautier, dansla préface de Mlle de Maupin, accable les partisans de l'art utilitaire.

Boileau d'ailleurs est fort modéré dans sesprétentions et il est difficile de ne pas être d'accord avec lui sur beaucoup de points. Qui ne concédera volontiers que c'est avilir la dignité de l'art que de l'employer à des fins coupables ? Une littératurepornographique est souillée par son sujet même et ce n'est pas le talent qui peut s'y révéler qui la rendra moinsdangereuse ou re-commandable. On sait d'ailleurs par Brossette que Boileau avait en vue les Contes de La Fontaine lorsqu'il écrivait : Je ne puis estimer ces dangereux auteurs Qui de l'honneur, en vers, infâmes déserteurs, Trahissant la vertu sur unpapier coupable, Aux yeux de leurs lecteurs rendent le vice aimable. Il est en outre permis de penser que l'influence du président de Lamoignon n'est pas étrangère au sentiment deBoileau ; on se rappelle que, très scrupuleux à cet égard, il avait interdit en 1667 la représentation de Tartuffe. La même opinion se trouve chez le P.

Rapin : « La fin principale de la poésie est de profiter (être utile), non seulement en délassant l'esprit.., mais bien davantageencore en purifiant les mœurs par les instructions salutaires qu'elle fait profession de donner à l'homme » (Réflexionssur la poétique, VIII, p.

123).

La réflexion est inspirée d'Horace, mais en modifiant sa pensée ; car celui-ci indiqueun choix possible, non une union forcée, lorsqu'il dit : Aut prodesse volunt aut delectare poetae. Mais un sujet peut être hardi sans être une invitation à la corruption.

Des censeurs sévères condamneront despeintures que d'autres estimeront innocentes.

C'est affaire à l'écrivain d'éviter de fausses interprétations.

Boileauaborde ici la question de l'amour, soit au théâtre, soit dans les romans.

Il n'est pas douteux que dans un sièclechrétien, on a dû condamner l'analyse d'un sentiment trop séduisant.

Nicole est particulièrement visé pour avoirtraité les faiseurs de romans et les poètes de théâtre « d'empoisonneurs publics non des corps, mais des âmes ».Avec plus de délicatesse que Racine ne l'avait fait en s'emportant contre les Jansénistes, Boileau répond trèsjustement : L'amour le moins honnête, exprimé chastement, N'excite point en nous de honteux mouvement.

Didon a beau gémiret m'étaler ses charmes : Je condamne sa faute en partageant ses larmes. C'est à l'avance la réponse d'Arnauld, moins intransigeant que Nicole, lorsque Phèdre lui fut soumise, puisqu'ilestimait que de ce caractère se dégageait une grande leçon.

Le poète lui-même y insistait dans sa préface etmarquait fortement la portée morale du spectacle tragique. Au fond la moralité de l'œuvre dépend de l'inspiration même du poète.

Celui qui a l'âme haute fera une œuvre haute.Boileau a raison de dire que son âme et ses mœurs sont peintes dans ses ouvrages et de conclure par un verscélèbre et digne de l'être : Le vers se sent toujours des bassesses du cœur.. »

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