ARRAGEOISE (littérature)
Publié le 14/11/2018
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ARRAGEOISE (littérature). De la fin du xiie siècle à 1290, Arras est un haut lieu de la poésie française. Entre ces deux dates, quelque 70 « trouvères » y ont écrit ou présenté des œuvres lyriques par dizaines (dont 114 des 182 jeux-partis actuellement recensés), des fabliaux parmi les plus anciens que l’on connaisse, le premier jeu dramatique en langue vulgaire, les seuls congés parvenus jusqu’à nous, des Vers de la mort à la virulente éloquence, une curieuse collection de satires locales éditées sous le titre impropre mais commode de Chansons et Dits artésiens, le déroutant Jeu de la feuillée et, peut-être, une série de fatrasies. On s’est souvent demandé comment cet ensemble remarquable par son ampleur, son originalité et sa précocité a pu naître dans un centre urbain, important certes mais que rien ne distingue a priori des autres grandes cités médiévales. La réponse est simple. En cette ville opulente, dynamisée par des hommes entreprenants, remarquablement doués pour le négoce et les relations publiques, très tôt ouverts aux choses de l’esprit, deux associations très différentes, le puy et la carité des jongleurs et bourgeois, formaient un terrain favorable à l’éclosion d’une vie littéraire.
Créée avant 1194, la carité doit son existence à des ménestrels et son succès à la chandelle qu’ils prétendent avoir reçue de la Vierge pour guérir le mal des ardents. Au XIIIe siècle, c’est encore une association professionnelle de jongleurs recrutant largement hors d’Arras. C’est aussi une confrérie accueillant par centaines les bourgeois de la ville. Elle possède, à deux pas du Petit Marché, un vaste local où, chaque jeudi de la Trinité, tous les membies des deux groupes se retrouvent pour une réunion. Cette dernière est marquée annuellement par une « beuverie », qui, selon la tradition des ghildes, se prolonge au moins toute la nuit. Le climat de fête, la durée de la manifestation, la présence en un même lieu d’un important public et de nombreux ménestrels ne pouvaient que favoriser les concerts d’instruments, les chants, les déclamations et les représentations théâtrales. C’est là que trouvent tout naturellement leur place le Saint Nicolas de Bodel, la Feuillée d’Adam de la Halle et les scènes de taverne si caractéristiques du théâtre arrageois. Là aussi, dans cette joyeuse atmosphère de saturnales, les auteurs des Chansons et Dits ont, avant le Bossu, décoché les traits de leur satire.
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