Arts et Culture LE ROMAN FRANÇAIS
Publié le 09/02/2019
                            
                        
Extrait du document
                                propres préoccupations esthétiques que de délivrer un message politique, annoncent les bouleversements: Julien Gracq (né en 1910), auteur de romans «surréalistes» comme Le rivage des Syrtes (1951), est un des plus originaux, par la qualité poétique de son style et la peinture d’un univers étrange, dans l’attente d’une catastrophe indéfinissable; Raymond Queneau (1903-1976) remet en cause la validité de la langue littéraire, en introduisant des «photographies du langage populaire» dans Zazie dans le métro (1959), et propose une nouvelle orthographe adéquate à la langue parlée (ainsi le «doukipudonktan»).
Le nouveau roman
L’expression «nouveau roman» désigne les œuvres qui prônent la recherche de l’innovation formelle. Si les auteurs qui s’en réclament -Nathalie Sarraute (née en 1902), Alain Robbe-Grillet (né en 1922), Claude Simon (né en 1913), Michel Butor (né en 1926)- ne constituent pas un mouvement à proprement parler, ils partagent le même souci d’associer écriture littéraire et réflexion théorique. Il s’agit de refuser les conventions du roman classique. Cette réflexion théorique passe par une critique du romancier omniscient, de la continuité temporelle et spatiale que suppose l’histoire, de la notion de caractère logique, pour s’interroger sur la conscience des
situations décrites, particulièrement sur la conscience de l’écrivain.
Le roman, qui ne s’interdit pas le réalisme, est appréhendé comme une recherche. La modification (1957) de Michel Butor recourt à une «fiction rusée» où les phrases s’étirent sur plusieurs paragraphes: présenté à la deuxième personne, le récit est le discours intérieur d’un homme qui voyage dans un train; le livre est formé des images, des rêveries, des cauchemars, des pensées qui défilent dans sa tête. La jalousie (1957) d’Alain Robbe-Grillet illustre une conception cinématographique du récit: une série de «plans» subjectifs nous suggère la présence d’un personnage invisible, et désoriente la logique traditionnelle.
Dans cette lignée s’inscrit le mouvement d’écriture expérimentale «Oulipo» - Ouvroir de Littérature Potentielle - avec Georges Pérec (1936-1982), qui élabore ses romans sous la contrainte formelle: La disparition (1969) écrit sans -e- Le «nouveau roman» a entraîné dans son sillage des écrivains de qualité, comme Marguerite Duras (1914-1996), qui s’attache à rendre l’indicible (India Song, L’amant). Dans un récit très dépouillé, sans notations psychologiques, elle montre surtout le vide de l’existence et l’impossibilité de la communication entre des êtres qui cherchent vainement l’amour (Moderato cantabile, 1958).
Depuis, le roman contemporain oscille entre les valeurs humanistes, chez Marguerite Yourcenar (1903-1987), L’œuvre au noir et la dimension
métaphysique chez Michel Tournier (né en 1924), Le roi des Aulnes (1970), Les météores (1975).
Le roman contemporain
À la fin des années 1970, Jean-Marie Gustave Le Clézio (né en 1940) et Patrick Modiano (né en 1945) écrivent sur la quête d’identité, ouverture sur le monde pour le premier (Onitsha, 1991), introspection angoissante pour le second (Dora Bruder, 1997). Le désarroi caractérise Les noces barbares (1985) de Yann Queffélec, comme les romans pessimistes de Philippe Djian (37°2 le matin, 1989). On est loin de cette violence dans les opus d’Alexandre Jardin (L’Tle des Gauchers, 1995; Le zubial, 1997). Une société sans repère engendre une littérature sans école: entre l’humanisme d’un Paris populaire chez Daniel Pen-nac (La fée carabine, 1989), la gaie sensualité ou les affres d’auteur chez Erik Orsenna (L’exposition coloniale, 1988; Deux étés, 1997) et l’épure bouleversante des récits de vie périssable mais d’amour persistant de Christian Bobin (L’épuisement, 1994; La plus que vive, 1997), quel trait d’union en effet, sinon une assurance de pérennité pour une certaine liberté de créer?
L'année dernière à Marienbad (1961) d’Alain Resnais, sur un scénario du chef de file du « nouveau roman », Alain Robbe-Grillet. Ce film inclassable mêle avec une audace inusitée, le passé au présent, le fantasme et le mensonge à la réalité, au fil d'une subtile alliance visuelle et sonore.
Zazie dans le métro (1960), comédie burlesque de Louis Malle, d’après le roman de Raymond Queneau : l’histoire d'une petite provinciale dégourdie venue à Paris dans le but de voir le métro.
ŒUVRES PRINCIPALES
1913
Alain Fournier: le GrandMeaulnes Marcel Proust: Du côté de chez Swann
1923
Raymond Radiguet: le Diable au corps
1926
André Gide: les Faux-Monnayeurs
1928
André Breton : Nadja
1932
Céline: Voyage au bout de la nuit
1933
André Malraux: la Condition humaine
1937
Georges Bernanos: Nouvelle Histoire de Mouchette
André Malraux: l'Espoir
1946
Georges Bernanos: Monsieur Ouine
1951
Jean Giono : le Hussard sur le toit
1953
Alain Robbe-Grillet: les Gommes
1954
Françoise Sagan: Bonjour tristesse
Le roman, action de vie
La seule imagination ne pouvait contenter certains romanciers qui, traumatisés par la Grande Guerre, ont cherché dans l’action, la vraie mesure de leur art. Ainsi, Jean Giono (1895-1970) n’exclut pas la vision dionysiaque (Regain, 1930), le lyrisme cosmique (Que ma joie demeure, 1935), la chronique légendaire (Le Hussard sur le toit, 1951), un optimisme fondamental dans l’homme qui transparaît dans le bonheur d’écriture.
La légende du héros de l’Aéropostale (Vol de nuit, 1931) et l’indéniable lyrisme du Petit Prince (1943) a donné le plus vif rayonnement aux récits d’Antoine de Saint-Exupéry (1900-1944): avec lui, l’exigence éthique et l’expérience d’une
vie dépassent désormais la fiction. Comme chez André Malraux (1901-1976) fasciné par l’aventure et la participation à l’histoire, qui forment les conditions de la création littéraire. La soumission du récit à une expérience de vie -la guerre civile en Chine dans La condition humaine (1933), la guerre d’Espagne dans L’espoir (1937) -, qui veut donner un sens à l’existence, est un jalon décisif dans la transformation du roman moderne.
Si, depuis le début du xxe siècle, certains écrivains ont remis en cause les conventions romanesques, ils ont néanmoins respecté le recours à une langue «classique». C’est par Le voyage au bout de la nuit, roman de Céline paru en 1932, que le scandale éclate. Non seulement Céline dévalorise le roman d’apprentissage et exprime une vision extrêmement négative de l’humanité avec ce roman, mais il le fait dans une langue chargée de transmettre toute la violence qu’inspire à l’auteur le spectacle de la misère et du désespoir humains. Il veut communiquer «l’émotion du langage parlé à travers l’écrit»; ce faisant, il attribue à son narrateur un langage chargé d’expressions populaires et argotiques, il fabrique une langue personnelle parsemée de néologismes, d’incessantes dislocations syntaxiques qui bouleversent l’ordre des phrases et révolutionnent l’écriture romanesque, la subvertissant, la vulgarisant à plaisir. Sa langue a fait école, notamment dans les truculentes parodies de San-Antonio, pseudonyme de Frédéric Dard (né en 1921).
L’après-guerre
La période de l’immédiat après-guerre est dominée par l’existentialisme de Jean-Paul Sartre (1905-1980) dont les romans illustrent ses idées
L'écrivain américain francophone, Julien Green. On lui doit une œuvre impressionnante à l'atmosphère sombre d'où se dégage une profonde tristesse, qui résume, selon lui, le sentiment fondamental de l’existence.
Écrivain francophone, née en Belgique et ayant vécu aux États-Unis, Marguerite Yourcenar témoigne d’un sens exceptionnel de la narration historique dans Mémoires d’Hadrien (1953) ou L’œuvre au noir (1969).
Jules Romains, ici assis à sa table de travail, avait le goût du canular, que l’on retrouve dans sa fameuse pièce Knock (1923), et l’idéal classique d'une « confrérie d’honnêtes gens » illustrés dans les 27 volumes des Hommes de bonne volonté.
philosophiques: La nausée (1938) est l’histoire d’un intellectuel, Roquentin, qui fait l’expérience du sentiment de l’absurdité de l’existence et du malaise devant les choses; englué dans son angoisse, il prend conscience de la contingence absolue de toute existence. Le mur (1939) est un recueil de nouvelles où Sartre affirme certains des thèmes majeurs de sa pensée : la mauvaise foi, la responsabilité, l’aliénation. Avec une grande économie de moyens et une langue simple, Albert Camus (1913-1960) décrit l’affrontement de l’homme et de l’absurde, et prône la nécessité de la révolte. Écrit mythique et symbolique, La Peste (1947) marque le passage d’une révolte individuelle à la lutte pour la reconnaissance d’une communauté.
À la recherche d’un nouvel humanisme, l’existentialisme et l’absurde inspirent fortement les milieux intellectuels ainsi que de jeunes romanciers marqués par la tradition française du réalisme pessimiste, tel Bonjour tristesse (1954) de Françoise Sagan (née en 1935). Une double réaction contre l’idéologie de gauche anime les «hussards» -du Hussard bleu (1950) de Roger Nimier (1925-1962)- un groupe comprenant Jacques Laurent (né en 1919), Antoine Blondin (1922-1991) et Michel Déon (né en 1919). Ces romanciers, qualifiés de «nouvelle vague réactionnaire», exaltent la quête du bonheur individuel, la dérision et l’immoralité. Dans le genre historico-romanesque, Maurice Druon (né en 1918) se démarque avec une fresque limpide et vivante sur les débuts de la Guerre de Cent ans (Les mis maudits, 1970). Foisonnantes, mais plus intimistes, les fresques d’Henri Troyat évoquent la Russie, où il est né en 1911 (La lumière des justes, 1959-1965).
Cette tendance classique n’exclut pas une volonté de «nouveau roman» dont plusieurs précurseurs, plus soucieux de faire passer leurs
                                «
                                                                                                                            Le 
roman  français 
la  vérité  des situations  sans préjugés,  s'exprimer 
sans  artifices,  dévoiler la véritable  nature humai
ne.
                                                            
                                                                                
                                                                     Les  chefs-d'œuvre  du genre  vont des Lettres 
persanes,  de La  vie  de Marianne  et des  romans  de 
Crébillon  fils (1707-1777),  tels Les  égarements  du 
cœur  et de  l'esprit  (1736) et La  nuit  et le  moment 
(1755),  aux Liaisons  dangereuses:  dénonciation 
du  libertinage  aristocratique  ou chef-d'œuvre  de 
scélératesse  psychologique,  ce dernier  roman se 
pr�te  à une  interprétation  équivoque.
                                                            
                                                                                
                                                                    
Equivoques,  les œuvres  du marquis  Donatien
Alphonse-François  de Sade  (1740-1814)  le sont 
également.
                                                            
                                                                                
                                                                     Dans  ses romans provocateurs,  de 
Justine  ou les  infortunes  de la vertu  (1791)  à 
La  philosophie  dans le boudoir  (1795), Sade fait 
alterner  scènes d'orgie  et dissertations  morales, 
qui empruntent  leurs arguments  à la  philosophie 
des  Lumières,  pour mieux  les renverser.
                                                            
                                                                                
                                                                    
Le  roman  philosophique 
Par  l'ironie  et la distance  qu'il pratique  vis-à-vis 
des  genres  et de  l'ordre  établis,  le roman  libertin 
est  une  forme  du roman  philosophique  qui met 
en  lumière  des réflexions  sur la religion  et les 
pouvoirs, comme  les Lettres  persanes  de Montes
quieu,  sur  la condition  humaine et le mal, 
comme  Candide  ou l'optimiste  (1759) de Voltaire, 
sur  les préjugés  sociaux et la  tolérance,  comme 
La  nouvelle  Héloïse, sur la morale  et la liberté, 
comme  Le neveu  de Rameau  et Jacques  le Fatalis- te.
                                                            
                                                                                
                                                                    
Voltaire  (1694-1778),  qui crée  le conte  philo
sophique,  projette sa personnalité  et ses  idées 
dans  ses récits.
                                                            
                                                                                
                                                                     Rien de  ce qui  arrive  à ses  person
nages  n'est gratuit:  chacune  des péripéties  aux
quelles  sont confrontés  ses héros  édifie  leur per
sonnalité.
                                                            
                                                                                
                                                                     Tel est le principe  du roman  d'appren
tissage,  autre forme  du roman  philosophique,  qui 
relate  la rencontre  entre une conscience  et le 
monde  : la  destinée  d'un homme  résulte d'une 
succession  de rencontres  avec l'extérieur;  le 
héros  se forme  par l'expérience,  il ne  devient  lui
même  qu'à la  fin  de l'ouvrage,  après maintes 
aventures  dont il ne  perçoit  pas la cohérence.
                                                            
                                                                                
                                                                    
La  naissance 
du  roman  psychologique 
On  découvre  dans le genre  romanesque  le lieu  de 
l'exploration  psychologique.
                                                            
                                                                                
                                                                     De Marivaux  à 
Prévost,  de Rousseau  à Laclos,  la peinture  du 
cœur  humain  utilise l'intrigue  romanesque 
comme  un lieu  d'expérience  véritable et ses  per
sonnages  comme de simples  incarnations  des 
diverses  dispositions  de la nature  humaine.
                                                            
                                                                        
                                                                     Le 
roman  apparaît  comme le genre  le plus  apte  à 
peindre  la réalité  humaine,  quotidienne  et inté
rieure.
                                                            
                                                                                
                                                                     Nulle part l'implication  du romancier  dans 
ses  personnages  n'est plus profondément  réalisée 
que  dans  le roman  par lettres  de Jean-Jacques 
Rousseau,  Julie ou la nouvelle  Héloïse.
                                                            
                                                                                
                                                                     À 
la  finesse  d'analyse  et au  réalisme  psycholo
gique,  dont sont empreints  les romans  du 
xviiie  siècle,  Rousseau  ajoute un investissement 
personnel  total: il est  le premier  à s'être  autant 
impliqué  dans un roman  et dans  ses  person
nages,  expressions  passionnées  de son moi  mul
tiple,  qui lui permettent  de faire  passer  ses senti
ments  mais  aussi  de donner  la somme  de ses 
idées,  sur la pédagogie,  la philosophie,  la religion 
et  même  l'économie.
                                                            
                                                                                
                                                                    
Les  romans  du XVIII"  siècle, comme  on l'a vu,  ne 
peuvent  se réduire  à une  forme  littéraire  unique; 
par  leur  complexité,  ils transgressent  les catégories 
strictement  définies: un roman  peut être à la  fois 
épistolaire,  libertin, philosophique,  pathétique et 
psychologique.
                                                            
                                                                                
                                                                     Ils présentent  aussi  un paradoxe : 
le  rationalisme,  si vivement  arboré par le siècle  des 
Lumières  (L'Encyclopédie),  n'empêche aucune
ment  d'épanouir  la sensibilité  individuelle  et la 
connaissance  intuitive du cœur  et des  aspects 
inexplorés  de l'homme:  un épanouissement  dont 
l'expression  culmine dans l'idylle  tragique  des 
deux  adolescents  amoureux de Bernardin  de 
Saint-Pierre  (1737-1814),  Fbul et Virginie  (1788).
                                                            
                                                                                
                                                                    
Le  XIXe  siècle  fut surn ommé  «le  siècle  du 
roman ''· La  plasticité  du roman,  qui permet 
d'aborder  tous les sujets,  est la cause  essentielle  de 
son  succès.
                                                            
                                                                                
                                                                     Il devient  peu à peu  un genre  littéraire 
majeur  et populaire,  notamment  sous l'impulsion 
du  mouvement  romantique.
                                                            
                                                                                
                                                                     En 1810,  Mme de Staël, 
introduit  le mot  «romantique>>  dans De l'Alle
magne.
                                                            
                                                                                
                                                                     Selon elle, l'inspiration  romantique est 
«n ée  de  la chevalerie  et du  christianisme >>.
                                                            
                                                                                
                                                                    
Le  romantisme 
Au  début  du XIX"  siècle,  le romantisme,  venu d'An
gleterre  et d'Allemagne,  gagne la France.
                                                            
                                                                                
                                                                     Il s'affir-
.......
                                                            
                                                                                
                                                                     Portrait  de Jean-J acques  Rousseau.
                                                            
                                                                                
                                                                    
Initiateur  de la confidence  intime, 
chantre  de la liberté  individuelle, 
il  fut  un précurseur  du romantisme.
                                                            
                                                                                
                                                                    
'  Portrait  de Marivaux  en 1743.
                                                            
                                                                                
                                                                    
Romancier  et dramaturge,  il fut 
le  peintre  subtil des passions  naissantes, 
et  du  «marivaudage",  terme qui exprime 
l'ambiguité  des rapports  amoureux..
                                                                                                                    »
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