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Aux vitraux diaprés des sombres basiliques, Théophile Gautier (commentaire)

Publié le 12/02/2012

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gautier

Aux vitraux diaprés des sombres basiliques,

Théophile Gautier  1811 - 1872 Aux vitraux diaprés des sombres basiliques, Les flammes du couchant s’éteignent tour à tour ; D’un âge qui n’est plus précieuses reliques, Leurs dômes dans l’azur tracent un noir contour ; Et la lune paraît, de ses rayons obliques Argentant à demi l’aiguille de la tour Et les derniers rameaux des pins mélancoliques Dont l’ombre se balance et s’étend alentour. Alors les vibrements de la cloche qui tinte D’un monde aérien semblent la voix éteinte Qui, par le vent portée, en ce monde parvient ; Et le poète, assis près des flots, sur la grève, Écoute ces accents fugitifs comme un rêve, Lève les yeux au ciel et, triste, se souvient.

1830 ! Date prestigieuse. Envol magnifique de mille espoirs politique, religieux, sociaux, littéraires, artistiques. Année des «trois glorieuses.«,  année d'Hernani et des Contes d'Espagne. Le souffle ardent du romantisme pénètre tout : poésie, histoire, éloquence... même celle de la chaire, peinture, modes vestimentaires. Il a passé dans l'atelier du peintre Rioult où, depuis sa rhétorique, s'exerçait un jeune rapin nommé Théophile Gautier. De connivence avec la myopie; il a fait de lui un poète....

gautier

« A la Cathedra le gothique sont consacres le premier quatrain, le deuxieme vets du second et le premier tercet.

Des les premiers mots on se sent en presence d'un artiste a exerce apte a salmi* l'aspect fugitif des choses au moment précis oil elles offrent.leur maximum de beaute.

Deux notes justes evoquent aussitet dans la partie de notre memoire ou se conservent les images, les cathedrales que nous avons pu visiter, celles du moins qui, comme Chartres et Bourges, ont garde leurs verrieres merveilleuses on qui, comme Notre-Dame de Paris, en ont recu de nou- velles en harmonie avec les desseins des premiers batisseurs.

L'expression vitraux diapres nous rememore leurs bleus profonds, leurs rouges purpurins, leurs ors flamboyants; les Prophetes portant sur leurs epaules les Evangelistes et encadrant la Vierge benie, au visage basane : nigra sum, sed formosa; ou bien les vieux saints barbus, faisant un cor- tege d'honneur au Christ triomphant...

Elle nous rappelle les rosaces des transepts, miracles de la couleur, joie des yeux recueillis; elle nous rap- pelle surtout, a cette heure, la rose mystique du portail royal de Char- tres, don de Saint Louis a l'insigne basilique, dans laquelle, depuis 700 ans, Les flammes du couchant s'eteignent tour a tour. Encore qu'il observe de l'exterieur c'est a cette ultime feerie que songe le pate, plutot qu'aux reflets du soleil A son declin sur la surface externe des vitraux.

Le mot sombre est non moins evocateur.

Amiens est clair, trop clair, au gre de beaucoup : it lui manque, pour etre la cathedrale parfaite, ce voile multicolore qui filtrerait dans ses nefs audacieuses un jour discret. Chartres, Bourges, Paris, plus encore Saint-Etienne de Vienne, par leur « sombre vastite », comme disait le vieux Montaigne, saisissent l'Ame et la plongent subitement dans les regions mysterieuses de la surnature.

La priere, in meditation s'accommodent volontiers de cette ombre que le style roman, aux massives murailles, aux baies rares et exigues tree sans peine, ce que le style ogival, aux murailles allegees de tons les blocs passes dans ses contreforts et ses arcs-boutants, est oblige de realiser artificiellement par l'opacite de ses « vitraux diapres ».

Mais la « cathedrale gothique », chef-d'oeuvre de Part medieval, est encore autre chose pour nos romantiques de 1830, epris d'histoire et devots de tout ce moyen Age gulls concoivent un peu A leur maniere.

Elle est A leurs yeux le symbole, et davantage : la « relique »« d'un age qui n'est plus » ; elle rappelle les grandeurs evanouies l'elan mystique des Ames ancestrales, Gautier y revient dans une autre poesie, La Basilique II est une basilique Aux murs moussus et noircis Du vieux temps noble relique Ort l'dme melancolique Flotte en pensers indecis. C'est un theme partout exploite.

Michelet dans son Introduction a VIM- toire universelle (1831) parle de e ce long miracle du moyen Age...

dont on douterait dans quelques siecles...

s'il n Wait comme cristallise pour toujours dans les fleches et les aiguilles et les roses et les arceaux sans nombre des cathedrales ».

Musset, a son tour, s'enthousiasme et regrette le temps OA tons nos monuments et toutes nos croyances Portaient le manteau blanc de leur virginite... ou Cologne, Strasbourg, Notre-Dame s'agenouiilaient « dans leurs robes de pierre »...

Depuis Chateaubriand et Lamartine, on ne saurait evoquer « la fleche gothique » sans songer aux « saints concerts » qui s'en echappent...

Et Gautier a lu, sans doute, le Chant de la Cloche de Schiller.

Aussi n'a-t-il garde de negliger cet element dans son tableau fantaisiste.

11 y fait inter- venir les « vibrements >> - vibrations, terme exact, ayant une syllabe de trop - « de la cloche qui tinte ».

Et it interprete A la romantique ce tin- tement de la cloche.

II elargit son cadre, it nous lance dans les espaces que la nuit nous revele infinis.

C'est « la voix eteinte d'un monde aetien » que nous percevons.

Un autre element mysterieux - le vent - nous apporte ces echos de l'Au-dela.

Remarquons le vague, fres poetique, mais qui ne A la Cathédrale gothique sont consacrés le premier quatrain, le deuxième v~s ..

du second et Je premier tercet.

Dès les .

premic;rs mots on se sent en présence d'un artiste à l'œil exercé.

apte à saisir l'aspect fugitif des choses au moment précis où elles offrent leur maximum de beauté.

Deux notes j_ustes évoquent aussitôt dans la partie de notre mémoire où se conservent les images, les cathédrales que nous avons pu visiter, celles du moins qui, comme Chartres et Bourges, ont gardé leurs verrières merveilleuses ou qui, comme Notre-Dame de Paris, en ont reçu de nou­ velles en harmonie avec les desseins des premiers bâtisseurs.

L'expression vitraux diaprés nous remémore leurs bleus profonds, leurs rouges purpurins, leurs ors flamboyants; les Prophètes portant sur leurs épaules les Evangélistes et encadrant la Vierge bénie, au visage basané : nigra sum, sed formosa; ou bien les vieux saints barbus, faisant un cor­ tège d'honneur au Christ triomphant...

Elle nous rappelle les rosaces des transepts, miracles de la couleur, joie des yeux recueillis; elle nous rap­ pelle surtout, à cette heure, la rose mystique du portail royal de Char­ tres, don de Saint Louis à l'insigne basilique, dans laquelle, depuis 700 ans, Les flammes du couchant s'éteignent tour à tour.

Encore qu'il observe de l'extérieur c'est à cette ultime .féerie que songe le poète, plutôt qu'aux reflets du soleil à son déclin sur la surface externe des vitraux.

Le mot sombre.

est non moins évocateur.

Amiens est clair, trop clair, au gré de beaucoup : il lui manque, pour être la cathédrale parfaite, ce voile multicolore qui filtrerait dans ses nefs audacieuses un jour discret.

Chartres, Bourges, Paris, plus encore Saint-Etienne de Vienne, par leur « sombre vastité », comme disait le vieux Montaigne, saisissent l'âme et la plongent subitement dans les régions mystédeuses de la surnature.

La prière, la méditation s'accommodent volontiers de cette ombre que le style roman, aux massives murailles, aux baies rares et exiguës crée sans peine, ce que le style ogival, aux murailles allégées de tous les blocs passés dans ses contreforts et ses arcs-boutants, est obligé de réaliser artificiellement par l'opacité de ses « vitraux diaprés ».

· Mais la « cathédrale gothique »• chef-d'œuvre de l'art médiéval, est encore autre chose pour nos romantiques de 1830, épris d'histoire et dévots de tout ce moyen âge· qu'ils conçoivent un peu à leur manière.

Elle est à leurs yeux le symbole, et davantage : la « relique » « d'un âge gui n'est plus » ; elle rappelle les grandeurs évanouies.

l'élan mystique des âmes ancestrales, Gautier y revient dans une autre poésie, La Basilique Il est une basilique Aux murs moussus et noircis Du vieux temps noble relique Où l'lime mélancolique.

Flotte en pensers indécis.

C'est un thème partout exploité.

Michelet dans son Introduction à l'His­ toire universelle (1831) parle de « ce long miracle du moyen âge...

dont on douterait dans quelques siècles...

s'il n'était comme cristallisé pour toujours dans les flèches et les aiguilles et les roses et les arceaux sans nombre des cathédrales».

Musset, à son tour, s'enthousiasme et regrette le temps Où tous nos monuments et toute.ç nos croyances Portaient le manteau blanc de leur virginité ...

où Cologne, Strasbourg, Notre-Dame s'agenouillaient «dans leurs robes de pierre»...

, Depuis Chateaubriand et Lamartine, on ne saurait évoquer « la flèche gothique » sans songer aux « saints concerts » qui s'en échappent...

Et Gautier a lu, sans doute, le Chant de la Cloche de Schiller.

Aussi n'a-t-il garde de négliger cet élément dans son tableau fantaisiste.

Il y fait inter­ venir les « vibrements » - vibrations, terme exact, ayant une syllabe de trop - « de la cloche qui tinte ».

Et il interprète à la romantique ce tin­ tement de la cloche.

Il élargit son cadre, il nous lance dans les espaces que la nuit nous révèle infinis.

C'est «la voix éteinte d'un monde aérien » que nous percevons.

Un autre élément mystérieux - le vent - nous apporte ces échos de l'Au-delà.

Remarquons le vagne, très poétique, mais qui ne. »

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