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Commentaire incipit: Les bonnes de Jean Genet

Publié le 21/05/2012

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Ce texte est extrait de la pièce Les Bonnes, écrite par Jean Genet en 1947. A la fois romancier, poète et dramaturge, celui-ci est connu pour avoir vécu une existence assez marginale et dépeint dans son œuvre engagée le monde des parias de la société, à travers les thèmes dominants du mal et de l’érotisme. N’échappant pas à cette règle, cette pièce a d’ailleurs défrayé la chronique lors de sa première représentation à l’Athénée, avec une mise en scène de Louis Jouvet.

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« Dans ce contexte de doute quant à l’identité réelle de ces deux personnages, deux autres élément s prennent un relief particulier.

Il s’agit tout d’abord de l’évocation d’un laitier, dont Madame et sa bonne semblent se disputer les faveurs, ce qui peut paraître surprenant en ce qu i concerne cette première , en raison de la différence de statut socia l.

Mais aussi de la mention soudaine, par la supposée Claire, de la présenc e en ces lieux de deux bonnes apparemment solidaires dans leur haine pour leur maîtresse et semblant « confondues » en une seule personne .

Le spectateur se demande alors qui est cette seconde dome stique, tandis que le lecteur m ieux informé se doute qu’il s ’agit de la fe mme endossant le rôle de Madame.

Encore des indice s, semé s par l’auteur, venant brouiller les pistes de début de pièce bien inhabituel… A cette confusion identitaire vient s’ajouter la révélation progressive de relations complexes et troublantes entre les personnages présents sur scène, qui ne facilite pas la tâche du spectateur en quête de repères stables pour suivre le dérouleme nt de la pièce.

Ce qui vaut surtout au niveau du couple formé par Madame et sa bonne, mais aussi, par ricoc het, en ce qui concerne Claire et Solange.

En première lecture, ce passage met en effet en scène une domestique qui, après avoir subi les propos méprisants de sa patronne, exprime à son tour sa haine de celle -ci, sans aucun détour, comme en témoignent les expressions « Je vous hais! Je vous méprise ! » et « Solange vous emmerde ! », réitérées à plusieurs re prises.

De t oute évidence, cette haine se fonde certes sur les humiliations subies, mais aussi sur la frustration générée chez la bonne par sa condition inférieure et sa jalousie vis -à-vis des conditions de vi e luxueuses de Madame , dont elle est le témoin quotidien. Ce qu e souligne l’opposition du champ lexical grâce auquel la su pposée Claire décrit l’univers raffiné dans lequel baigne sa maîtresse , qui a manifestement les moyens d’entretenir et d’habiller somptueusement son corps comme de maquiller et parfumer son visage , avec les termes utilisés pour évoquer son propre environnement, essentiellement constitué d’une cuisine nauséabonde .

Ce contraste se trouve magnifiquement résumé par la phrase « Vous avez vos fleurs, j’ai mon évier », où la répéti tion du verbe avoir souligne l’opposition des deux couple s de termes « vous/je » et « fleurs/évier » sous -entendant cet autre : fragrance agréable/exhalaisons douteuses… Il semble d’ailleurs que le monde dans le lequel chacune de ces femmes évolue embellit la première et souille la seconde, comme en atteste l’alexandrin « J’y retrouve mes gants et l’odeur de mes dents », dont les deux hémistiches riment et forme nt un zeugma qui exprime parfaitement le dégoût identique qu’éprouve la bonne pour sa fonction et son propre corps.

Mais à la haine de la domestique envers sa maîtresse se mêle à une attirance manifeste pour celle - ci.

En effet, à trois reprises dans notre passage, la supp osée Claire mentionne l a beauté de Madame.

Et tout au déb ut, elle déclare haïr différentes parties du corps de celle -ci, qu ’elle décrit pourtant de manière ext rêmement valorisante, en les associant notamment à des matériaux nobles et précie ux comme l’ivoire, l’or et l’ambre.

Le souci du détail et l a poésie présent s dans ces propos, assez étonnant s dans la bouche d’une domestiqu e, trahissent d’ailleurs à eux seul s le caractère appréciateur et sensuel du regard que pose celle -ci sur sa patronne… Du coup, les aspects contradictoires de la relation d’amour/haine existant entre les deux femmes prennent. »

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