CRÉATION ET INSATISFACTION Je n'aime pas l'homme; j'aime ce qui le dévore. André Gide
Publié le 28/03/2015
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«Chacun de mes livres se retourne contre les amateurs du précédent.«
Toute sa vie, il préféra une recherche ardente à la quiétude et ce n'est que sur son lit de mort qu'il se résolut à prononcer le « Tout est bien« qui sert de titre au livre de Roger Stéphane.
be• On pourrait suivre de Socrate à Montaigne et de Goethe à Sartre, en passant par Gide bien sûr, cette hantise de la sclérose qui menace la pensée satisfaite. Pour Socrate, le vrai philosophe était celui qui savait qu'il ne savait rien de définitivement certain. Montaigne préfère le mouvement de sa pensée à sa pensée elle-même. Goethe, comme Gide, pensait qu'il fallait laisser s'épanouir l'inéclos qui résidait en nous. Quant à Sartre, il rebondissait sans cesse jusqu'à l'inconséquence, tenant à ne pas ressembler à ces «salauds «, les bourgeois de Bouville (La Nausée) qui avaient vécu, confondus avec leur rôle, sans que jamais le doute ne les traverse.

«
§1 .
Création et insatisfaction / 125
dieux, celui qui s'est affirmé contre eux, inaugurant un
monde où l'homme refuse d'être écrasé par les puissances
qui
le dépassent.
Dans
la sotie de Gide, Prométhée est mal enchaîné
puisqu'il se promène sur les boulevards parisiens mais,
du
moins au début, il est accompagné par son aigle.
Il fait
même une conférence dans laquelle
il explique qu'il faut
avoir
un aigle et que, d'ailleurs, nous en avons tous un.
Dans le cadre
de cette conférence, il prononce la formule
étudiée ici :
«Quand je déclare: il faut avoir un aigle, vous pourriez
tous vous écrier : Pourquoi? -
Or, que voulez-vous que
je réponde, qui ne puisse se ramener
à cette formule où
s'affirme mon
tempérament: Je n'aime pas l'homme;
j'aime ce qui le dévore.»
.....
André Gide reviendra à plusieurs reprises sur cette for
mule qui exprime la nécessité pour rester vivant et homme
de toujours s'interroger, de toujours tendre au dépassement
de soi-même et de n'être jamais satisfait.
En octobre 1894,
il notait déjà dans son Journal ces paroles
de Lessing (Allemagne, 1729-1781) qu'il jugeait admi
rablëS' et qm le sont eifecdvement :
«Ce qui fait la valeur d'un homme, ce n'est pas la vérité
qu'il possède, ou qu'il croit posséder; c'est l'effort sin
cère qu'il fait
pour la conquérir.
Ce n'est point par la
possession, mais
par la recherche de la vérité que
l'homme grandit
ses forces et qu'il se perfectionne.
Si
Dieu tenait enfermée dans sa main droite la Vérité tout
entière, et dans sa main gauche l'aspiration éternelle
vers la
Vérité, même avec la condition de se tromper
toujours, et s'il me disait: choisis! je saisirais humble
ment sa main gauche, et
je dirais : Donne, mon père, car
la Vérité pure n'est faite que pour toi.»
Le 4 novembre 1929, il s'exprime ainsi dans son Journal:
« ...
je crois maladroit, improfitable, ininstructif, de se
mettre (uniquement) sur le plan du bien et du mal pour
juger les actions humaines, ou plus exactement pour.
»
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