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Gargantua et la poétique de Rabelais

Publié le 22/09/2011

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gargantua

Comique de mot : ex. le torchecul ch.XIII, p.141sq. + récit du combat de Frère Jean mélange entre le très sérieux vocabulaire médical et autres expressions dialectales plus ou moins amusantes    Comique de geste : frère Jean assaillant avec sa croix    Comique de situation : épisode de Bragmardo venant réclamer les cloches    Comique de caractère : figure de frère Jean, Picrochole par certains aspects  Ecriture de l’œuvre se fait ainsi sur un mode ludique, car « Mieulx est de ris que de larmes escripre, / Pour ce que rire est le propre de l’homme «. Elle s’appuie sur un « irréalisme bouffon « (Spitzer) fait pour « désopiler la rate de ses lecteurs «. Le rire est ainsi promu par Rabelais au rang de principe esthétique.

gargantua

« « J’entends et veux que tu apprennes les langues parfaictement.

Premièrement, la Grecque comme le veutQuintilien.

Secondement, la altine.

Et puis l’Hébraïcque pour les sainctes lettres, et la chaldaïque et arabicquepareillement.

»Enfin, cette soit s’accompagne de la croyance en le progrès ; celle-ci tient à la manière de penser l’homme enconformité aux idées de Plutarque : importance des dispositions naturelles, mais infinies possibilités de progressionpar l’exercice.La réflexion sur l’homme et sur sa place dans le mondeLe rôle de la fiction du géant est essentiel.

Il agit comme un miroir grossissant de l’humanité, par exemple dans sestares et ses conséquences avec l’épisode des fouaces comme point de départ d’une guerre horrible.

La fiction dugéant fait aussi réfléchir et travailler à la relativité.Interrogation sur un possible bonheur et ses modalitésLe texte de l’abbaye de Thélème propose tout une réflexion sur le bonheur.

Cette utopie souligne que le bonheur estlié à la possibilité de l’exercice de la liberté.

De plus, l’expérience de l’abbaye de Thélème étant limitée dans letemps, elle développe l’idée d’un retour à une vie sociale dans le siècle : le bonheur étant donc à chercher dans lavie.3.

Tant et si bien que le Gargantua est expression même de son siècle, est emblématique de son siècleIl est emblématique de la volonté de renouvellementEt ce notamment par sa dimension satirique : la satire sociale et la satire politique comprise dans l’œuvre sous-tendent la volonté d’instituer d’autres normes.

Cette dimension est aussi soulignée par le motif du géant, le géantest comme une figure utopique d’un homme nouveau, aimant la vie, la dévorant à pleines dents, érudit.Il est emblématique du vent de libertéLe passage du géocentrisme à l’héliocentrisme modifie l’idée de l’homme par rapport à l’univers.

La mise en place dela réflexion sur le libre-arbitre joue également un rôle important : Frère Jean peut être vu comme l’incarnation dulibre-arbitre, notamment dans sa décision seul contre tous, de se lancer contre l’ennemi pour sauver son petit coinde vigne.Il est emblématique de son siècle jusque dans ses paradoxesIl faut se référer ici au paradoxe d’un Eudémon qui fait montre des bienfaits de l’éducation de Ponocrates enélaborant un discours qui donne à voir - ou à entendre - un art de la rhétorique tout sophistique...

Ainsi qu’auparadoxe d’un Grandgousier qui présente la guerre comme le pire des maux mais assume que la guerre puisse êtreune décision sage, conforme au droit, à la morale, au bien, dès lors que les conditions la rendent telle.Mais limiter la lecture des œuvres de Rabelais à ces analyses reviendrait à les enfermer dans un réalisme qui conduitcomme le souligne Léo Spitzer dans son article « Rabelais et les Rabelaisants » p.134-165 (Etudes de style TelGallimard, 1970) à privilégier à tort la valeur documentaire de cette œuvre et négliger le fait qu’elle a une valeur ensoi, une valeur artistique.

Or, Gargantua tient sa valeur de la manière dont Rabelais met ses idées en scène.II.

Le sens de l’œuvre repose sur des représentations symboliques qui font l’originalité du Gargantua.1.

La mise en œuvre du sens repose en premier lieu sur la fiction narrativeUn schéma narratif qui s’inspire des romans en vogue du tempsIl faut d’abord procéder à un explicitation du schéma narratif de Gargantua.

Son fonctionnement est centré sur unpersonnage, éponyme, ici Gargantua.

Ce personnage est confronté à des péripéties qui sont autant d’épreuves :épreuve de son esprit (avec le torchecul par exemple), et formation à l’épreuve du réel quand il revient aux côtés deson père.

On peut ainsi parler de la mise en place d’un schéma qui permet l’élaboration d’une manière de roman deformation :* état de nature mais avec un état naturel prometteur* nature gâtée par une mauvaise formation* l’éducation de Ponocrates* l’épreuve du feuCependant Rabelais procède à un détournement du modèle canonique, qui est traité sur le mode grotesque.

On peutfaire ici référence en particulier avec l’épisode du torchecul pour l’épreuve de son esprit, tandis que l’épreuve du réelse fait aux côtés de la figure fantaisiste de Frère Jean, pris dans une guerre dantesque pour des raisons ridicules.D’ailleurs, la fin elle-même est curieuse : en principe, la situation finale est l’étape de reconnaissance finale.

Or la findeGargantua est diluée, centrée sur Frère Jean qui vole à Gargantua sa place de personnage principal.

C’est lesymbole d’une nouvelle ère, et de la modification des normes et des valeurs sociales.La fiction gigantaleLes personnages de géants induisent une hypertrophie des mesures du temps et de l’espace.

Ainsi le temps qu’il fautà Gargantua pour apprendre à lire se compte en années.

D’autres indices de brouillage des repères spatio-temporelspeuvent être relevés :* Gargantua se rend à paris en quelques galops de jument* Il est de retour auprès de son père en un instantCes dispositions burlesques produisent des effets comiques, comme le pipi de la jument qui provoque un véritabledélugeC’est le symbole d’un monde en pleine mutation où les repères sont brouillés : l’univers n’a plus la même taille.

Onpeut ici se référer à l’analyse de Butor (Répertoire II Ed.

de Minuit, coll.

« Critique » 1964) dans l’article « Rabelais »p.

135-138) :Il sentait proche l’avènement d’une nouvelle culture capable de retenir dans l’ancienne, la culture scholastique, cequ’elle avait de bon.

Il a pris conscience que les dimensions du monde étaient en train de changer, ce qui expliquel’importance que prend le thème du géant.

Le monde grandit, le réel le langage aussi, c’est pourquoi la différence de taille entre Pantagruel et les autres elles’amenuise de livre en livre ; mais il y a toute une foule de ralentisseurs, d’arriérés auxquels il faut faire la guerre, defaçon incessante.. »

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