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La forme du conte dans le débat d'idées et dans la critique de la société

Publié le 17/01/2022

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« [2.2.

Liberté et libre arbitre bafoués: le fanatisme] Partout où passe Scarmentado, sa liberté et son libre-arbitre sont contrecarrés par des autorités religieuses, aussiintolérantes que répressives.

Le fanatisme, les préjugés, les superstitions, les vaines querelles sur des dogmesimbéciles mènent le monde, de Paris à Pékin.

L'homme ne supporte pas la différence, alors il emprisonne, il mutile, ilbrûle ce qui ne lui ressemble pas, ceux qui ne pensent pas comme lui. [2.3.

Un monde cruel] Voltaire ici fait plus oeuvre de moraliste que de philosophe: l'homme est cruel, excessif, hypocrite, vaniteux,superstitieux et il est rare de rencontrer un sage.

Les Lumières de la raison auront du mal à dissiper les ténèbres del'obscurantisme. Cependant, c'est le plus souvent avec légèreté et fantaisie que le conteur fait ses graves observations. [3.

Instruire et amuser] [3.1.

Le lecteur doit tirer ses conclusions lui-même] En fait, Voltaire ne procède pas de façon didactique en formulant de façon explicite ses conclusions devantl'absurdité, la cruauté des personnages et des situations que rencontre Scarmentado.

C'est le lecteur qui doit tirerses conclusions, à partir de ces anecdotes successives. [3.2.

Des registre variés] Pour soutenir l'intérêt de son lecteur et ne pas l'ennuyer, Voltaire mène son récit sur un rythme allègre et varie lesregistres.

La question de divisions religieuses en Perse se réduit à choisir entre le mouton noir ou le mouton blanc.Pour Scarmentado, l'essentiel est que le mouton soit...

tendre, ce qui lui vaut quelques ennuis! Il suffit d'un motpour caricaturer et ridiculiser le pape et sa troupe « qui montaient la garde avec un parasol».

De temps en temps, Voltaire agrémente son récit de quelques polissonneries: sommé de choisir entre être circoncis ou empalé,Scarmentado préfère payer une amende et il conclut: «Je sauvai mon prépuce et mon derrière avec mille sequins.» Mais, à l'humour, succède l'émotion quand il évoque l'extermination des populations mexicaines par lesconquistadores: «On avait égorgé, ou brûlé, ou noyé dix millions d'infidèles en Amérique pour les convertir.» [3.3.

L'ironie] Parler avec sérieux de ce qui est dérisoire et avec légèreté de ce qui est grave, dire le contraire de ce que l'onpense pour faire comprendre son véritable point de vue, voilà la marque de l'ironie voltairienne. Un horrible autodafé devient une délicieuse « petite fête»; Scarmentado, l'apprentissage, doit quitter la Hollandequi, par tempérament «est porté(e) au dogme si funeste de la tolérance».

Impassible, Scarmentado enchaîne des propositions paradoxales à propos d'un prince d'Orient: «C'était l'homme le plus pieux de tout l'Indoustan.

Il est vraiqu'il avait égorgé un de ses frères et empoisonné son père.» Pour stigmatiser la violence hypocrite et perverse del'Inquisition, il suffit à Voltaire de décrire, avec quelques antiphrases, le comportement du père inquisiteur:«charitablement», «cordialement», «avec une affection toute paternelle» «tendrement». Dans le discours du capitaine corsaire nègre justifiant les violences qu'il inflige à ses prisonniers blancs, Voltaireretrouve les accents de Montesquieu dénonçant l'esclavage des nègres dans L'Esprit des lois.

L'esclavagiste y disait: «On ne peut se mettre dans l'esprit que Dieu qui est un être très sage ait pu mettre une âme, surtout uneâme bonne, dans un corps tout noir.

Ils ont le nez si écrasé qu'il est presqu'impossible de les peindre».

Le capitainecorsaire de Voltaire semble avoir médité cette leçon : «Vous avez le nez long, et nous l'avons plat; vous avez lapeau couleur de cendre et nous de couleur d'ébène, par conséquent nous devons, par les lois sacrées de la nature,être toujours ennemis.» Le lecteur se pique au jeu de l'ironie et Voltaire met les rieurs de son côté en rendant ridicules les pouvoirs abusifs,les préjugés, les fausses certitudes.

Mais ce n'est pas par sécheresse de coeur, impuissance affective: il suffit delire sa Lettre au comte d'Argentai à propos de l'affaire Calas, victime du fanatisme injuste et imbécile : il trouve alorsdes accents d'une belle éloquence.

Mais — et c'est la limite du genre — il ne s'adresse ici qu'a un correspondant etne prend la défense que d'un innocent.

Alors, quand il faut alerter le monde pour le mettre en garde contre seserreurs passées et à venir, le conte garde toute sa force et son efficacité parce que chaque lecteur peut accrocherun nom, un crime à ces marionnettes ridicules que Voltaire manipule avec bonheur.. »

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