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La Renaissance, en détournant de ses voies l'esprit français, en l'asservissant à l'Antiquité, a-t-elle substitué à l'originalité gauloise un caractère d'emprunt qu'il nous a fallu dépouiller tardivement pour revenir à notre vraie nature ?

Publié le 13/02/2012

Extrait du document

esprit

Cette question nous rappelle aussitôt la « Querelle des Anciens et des Modernes «. Soulevée au xviie siècle par Ch. Perrault, admirateur des « Modernes « et détracteur des « Anciens «, elle reprit au XIXe siècle, sur de nouveaux frais, alors que les « Romantiques « révolutionnaires menèrent l'assaut contre les « Classiques « conservateurs et traditionalistes. De nos jours encore, des esprits éminents regrettent l'abandon de la littérature chrétienne et nationale et l'importation intempestive des modèles grecs et latins au xixe siècle. 

Qu'en faut-il penser ?

esprit

« un contempteur de P« originalite nationale », est, trois siecles plus tard, un de ses plus fervents admirateurs.

La poesie lyrique des Troubadours (langue d'oc) n'appartient pas a la lit- terature francaise; celle des Trouveres (langue d'oil) se developpe du xne au xvie siecle sous ('influence des poemes meridionaux; elle lui reste inferieure, sans etre toutefois negligeable.

Trois noms ont surnage : Rute- beuf au mar siecle; Eustache Deschamps au lave, Vi llon au xve.

Le premier, a excelle dans In satire lyrique.

II se lamente sur sa pauvrete, sur son ma- riage; it chante la Vierge, l'amitie; it s'attaque it la Royaute, a l'Eglise, rUniversite.

Boheme impenitent, il est le Villon de son siecle.

Le deuxieme, grand voyageur, personnage important, est un poste aussi mediocre qu'abon- dant; de ses 80.000 vers on ne retiendra sans doute que le beau decasylla- bique dedie it Du Guesclin, La fleur des preux et la gloire de France. Le troisieme, grand poste, au contraire, mais malandrin, qui tata de la prison, et faillit etre pendu haut et court, quoiqu'il nous emeuve par son repentir, par la maniere dont il fait parler sa pauvre mere it Notre-Dame. ou dont il célèbre « Jehanne la Pucelle », la « bonne Lorraine qu'Anglois bruslerent it Rouen », illustre trop souvent le jugement severe de Boileau : Le vers se sent toujours des bassesses du coeur. Ses « gauloiseries », ses obscurites, ses crudités crapuleuses ne sont pas precisement la fine fleur de l'esprit francais.

Au siecle suivant, Marot et Regnier lui feront trop souvent echo.

Le theatre est-il plus specifiquement national? Aux xie' et mire siecles, le Brame liturgique, joint aux offices religieux, n'est que chretien et catholique; it possede, a Petranger, les memes caracteres qu en France.

Au xiir siecle, le Jeu de Saint Nicolas, de Jean Bodel, est tout plein de la Chevalerie et des Croisades, le mediocre Miracle de Theophile, de Rutebeuf, n'a rien de parti- culierement francais.

Au my' siècle fleurissent les Miracles de Notre-Dame, temoins, au meme titre que les cathedrales, de la devotion de notre pays pour la Vierge.

Les uns empruntent leur sujet a notre histoire (la Conversion de Clovis), les autres s'inspirent des pays strangers (Comment la femme du roi de Portugal fut condamnee it etre bralee...).

Le xve siècle volt naitre les Mgsteres, qui, tires de la vie des saints, representent le theatre serieux, tandis que Moralites, Sotties et Farces, interpretees par de joyeux compagnons, comme les Enfants Sans-Souci, sont la comedic de ce temps-la.

De ces deux dernieres (Farces et Sotties) il sera aise de retrouver la trace au xvie et au xvir' Restent it signaler, parmi ceux qui comptent, avant la Renaissance, nos grands chroniqueurs.

Villehardouin (xur siecle) est en meme temps l'homme de la Croisade, ebloui par l'Orient, chantre herolque des exploits guerriers, et le Champenois, diplomate pratique et positif.

Joinville (xiir siècle), Cham- penois aussi, et croise, compagnon de saint Louis, n'est plus comme son devancier l'homme d'un parti, l'ame de la France semble vivre en lui : chre- tien convaincu, non saint comme son roi, brave au combat, equitable avec ses vassaux, gai avec tous et toujours.

Il excelle dans les recits, mais s'avere incapable de composer avec ordre.

Froissart (xive siècle), grand peintre, a ecrit in chronique imagee de son siècle.

Son recit deborde la France, mais, cet « Europeen » manque de critique et d'idees generates.

Communes (xve siècle) n'est point an litterateur; chez lui, aucun souci d'art.

Sobre, précis, c'est un psychologue politique, un philosophe et un moraliste.

Dis- ciple de Machiavel, il a de la vie une conception purement utilitaire.

Intel- ligence toute moderne déjà, il a, lui, le gout du detail exact et des idees generates. Ce coup d'oeil d'ensemble, si rapide qu'il ait ete, nous a permis de relever au passage les caracteres essentiels de Vesprit francais et de l'ori- ginalite gauloise, deux choses quelque peu differentes, que semble confondre le texte de notre dissertation.

Desire Nisard, voulant dank l'esprit francais, commence par dire ce qu'il n'est pas.

II n'est pas celui qui copie les defauts du peuple conquis ou de 1Q nation conquerante; it n'est pas celui qui exagere, tantot romanesque, un contempteur de l'« originalité nationale », est, trois siècles plus tard, un de ses plus fervents admirateurs.

La poésie lyrique des Troubadours (langue d'oc) n'appartient pas à la lit­ térature française; celle !fes Trouvères (langue d'oïl) se développe du xn• au xvi• siècle sous l'influence des poèmes méridionaux; elle lui reste inférieure, sans être toutefois négligeable.

Trois noms ont surnagé : Rute­ beuf au XIII• siècle; Eùstache Deschamps au xxv•, Villon au xv•.

Le premier, a excellé dans la ·satire lyrique.

Il se lamente sur sa pauvreté, sur son ma­ riage; il chante la Vierge, l'amitié; il s'attaque à la Royauté, à l'Eglise, à l'Université.

Bohème impénitent, il est le Villon de son siècle.

Le deuxième, grand voyageur, personnage important, est un poète aussi médiocre. »

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