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Le premier Livre des Confessions de Rousseau

Publié le 17/01/2022

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Ce livre I est important pour comprendre la continuité de pensée entre les écrits théoriques et les écrits autobiographiques de Rousseau. Important aussi dans l'histoire littéraire : l'originalité, la richesse de son élaboration, qui est à la fois analytique (expliquer l'origine d'une personnalité) et poétique (réécriture de mythes fondateurs de notre culture) font de ce premier récit autobiographique sur l'enfance une réussite esthétique majeure ; elle inaugure brillamment une tradition dont notre littérature est aujourd'hui l'héritière.
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« d'Ulysse son époux).

La seconde et ultime rêverie concerne la vie modèle de Jean-Jacques, citoyen artisan àGenève, où l'écrivain, sur un mode imaginaire, réinscrit son histoire personnelle dans celle, idyllique et stable, de lalignée familiale : J'aurais passé dans le sein de ma religion, de ma patrie, de ma famille et de mes amis, une vie paisible et douce.

(p.78) — Contrastant avec ces deux rêveries idéalisées, la réalité vécue — celle initiale de la naissance et celle ultimede la fuite hors de Genève — est présentée comme un désastre; les deux événements sont marqués par la fatalité : je naquis infirme et malade; je coûtai la vie à ma mère, et ma naissance fut le premier de mes malheurs.

(p.

35) Avant de m'abandonner à la fatalité de ma destinée, qu'on me permette de tourner un moment les yeux sur celle quim'attendait naturellement [...] (p.

77) Rousseau est convaincu qu'il est né sous une mauvaise étoile (p.

91), que son destin le voue au malheur.

En vertude cette croyance, qui forme la trame sur laquelle se développe le récit des Confessions, les instants de bonheur,où l'être semble échapper à la fatalité, seront des moments volés, toujours vécus comme intenses et fragiles, brefsmais délicieux (soyez attentif à l'emploi fréquent de cet adjectif dans le texte).E3 Une éducation manquée?Par rapport à l'idéal proposé dans l'Émile, l'éducation de Jean-Jacques est ambivalente : l'autobiographie la présentecomme désordonnée, tantôt réussie, tantôt désastreuse ; elle n'a en tout cas pas le caractère progressif queRousseau a recommandé dans l' Émile.

Le livre I des Confessions correspond à deux âges décrits dans l'essaipédagogique : « l'âge de nature » (livre II de l' Émile: 2 à 12 ans) et «l'âge de force » (livre III: 12 à 15 ans).L'âge de nature.

Cet âge coïncide avec le paradis de l'enfance (Genève jusqu'à dix ans, Bossey de 10 à 12 ans).L'éducation de Jean-Jacques est réussie sur certains points, moins ,sur d'autres.— L'éducation de la sensibilité et l'éducation intellectuelle ne sont pas satisfaisantes.

Jean-Jacques est mis encontact avec les livres trop précocement : sa sensibilité n'a pas le temps de se former graduellement (alors que le livre I des Confessions nous montre un Jean-Jacques qui dévore littéralementles livres, dans l' Émile Rousseau interdit la lecture des livres jusqu'à 12 ans).

Les études à Genève puis à Bosseysont interrompues.

Un fait important: Rousseau apprend à aimer la musique en écoutant chanter sa tante Suzon ;c'est le début d'une vocation (n'oubliez pas que Rousseau sera musicien et copiste).— L'éducation morale est plus solide.

L'enfant bénéficie de l'exemple d'un entourage aimant et vertueux.

Plus loin, lerécit insistera sur cela: J'ai dit, je répète [...] que si jamais enfant reçut une éducation raisonnable et saine, ç'a été moi.

Né dans unefamille que ses moeurs distinguaient du peuple, je n'avais reçu que des leçons de sagesse et des exemplesd'honneur de tous mes parents.

(P.

98) À Bossey, même si elle met fin à un séjour heureux, l'injustice que subit Jean-Jacques façonne son être moral: ilapprend à haïr d'instinct l'injustice et la violence que le plus fort exerce sur le plus faible. L'âge de force.

Cet âge coïncide avec le retour à Genève et l'apprentissage chez le graveur: sur le plan éducatif,c'est une catastrophe.— L'éducation intellectuelle est interrompue.

L'apprentissage est un abrutissement, une régression.

Tout l'acquisantérieur est mis entre parenthèses: «Mon latin, mes antiquités, mon histoire, tout fut pour longtemps oublié; je neme souvenais même pas qu'il y eut des romains au monde».

Quand Jean-Jacques reprend ses lectures, elles sontboulimiques, et ont une vertu plus consolatrice que formatrice. — L'éducation morale et sociale est désastreuse.

Jean-Jacques fait l'expérience de la brutalité, de l'inégalité alorsqu'il était auparavant «accoutumé à une égalité parfaite avec [ses] supérieurs dans la manière de vivre», del'oppression (« je n'osais pas ouvrir la bouche »), et de l'exclusion («sans cesse enchaîné à mon travail, je ne voyaisqu'objets de jouissance pour d'autres et de privations pour moi seul»).

Après avoir bénéficié de l'autoritébienveillante et juste du milieu familial, il subit l'autorité tyrannique d'un maître qui le maintient dans un état d'«esclavage servile».

Il fait enfin l'expérience de l'aliénation : sous le regard d'un homme qui le considère comme unvaurien, il devient voleur, menteur, gourmand, fainéant.

Les punitions qu'on lui inflige sont des incitations àpersévérer : Je jugeais que me battre comme fripon, c'était m'autoriser à l'être.

Je trouvais que voler et être battu allaientensemble, et constituaient en quelque sorte un état » [...].

(p.

67). »

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