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le songe d'un habitant du mogol

Publié le 07/04/2013

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Le Songe d'un habitant du Mogol (Fables, XI, IV)   Le Songe d'un Habitant du Mogol est l'une des quelques fables dont la moralité prend la forme d'une méditation personnelle longue de plusieurs dizaines de vers : petit poème à part entière où La Fontaine, sur le ton de la confidence lyrique, fait l'éloge de la retraite en célébrant la douceur d'une vie consacrée à la rêverie et à la poésie. Au XVIIe siècle, le terme de retraite désignait aussi bien le mouvement d'abandon du monde, de fuite de soucis et de contraintes de la vie en société, que le lieu écarté où l'on cultivait cette solitude en méditant, et, le plus souvent, en priant. L'extrême beauté de cet éloge a souvent conduit à détacher le passage du récit qui donne son titre à la fable : entre les deux parties du texte existent pourtant des liens complexes et subtils, susceptibles d'aider le lecteur à mieux comprendre l'idéal de vie rêvé par le poète. I Du récit à la méditation lyrique Un apologue en forme de paradoxe. Avant de commenter l'éloge de la solitude que La Fontaine entreprend dans la seconde partie de la fable, il est indispensable de s'intéresser au récit qui en est le prétexte (v. 1-17). Cette petite histoire est plus complexe qu'il n'y paraît : elle est construite sur deux niveaux de récit, et sa signification repose sur quelques sous-entendus qu'il importe de bien comprendre. Au premier niveau de narration, deux personnages : un dormeur qui donne son titre à la fable (« certain Mogol «, v. 1) et un songe capable d'interpréter les songes du premier (« L'interprète «, v. 12). A l'intérieur de ce récit, une autre histoire, énigmatique (second niveau de narration) : le songe lui-même (v. 1-6), qui donne à voir un Ermite aux Enfers (« entouré de feux, v. 5) et un Vizir aux « champs Elysiens « (v. 2), autrement dit au Paradis. Pourquoi ce songe est-il paradoxal (« étrange, et contre l'ordinaire «, v. 7) ? En toute logique, l'Ermite aurait dû gagner le Paradis, s'étant retiré du monde pour prier, alors que le vizir, sans doute moralement corrompu par la vie à la cour et l'exercice du pouvoir, semblait a priori voué aux flammes infernales... Or c'est l'inverse qui apparaît au dormeur d'où son étonnement (v. 9) : le juge des Enfers (« Minos «, v.8) aurait-il commis une erreur ? Le réveil du Mogol surpris marque un retour au premier niveau de narration (v. 9-15). La clé du songe. Pour découvrir le « sens « caché (v. 13) de cette vision mystérieuse, il faut recourir à l'interprète. Celui-ci complète le songe sur deux points importants (retour au second niveau de narration, v. 15-17) : le Vizir a su parfois s'abstraire de la cour pour chercher la solitude (v. 16) ; il a gardé ses distances avec les charmes trompeurs du monde et fait preuve d'une sagesse salutaire. L'Ermite, au contraire, se faisait volontiers courtisan (v. 17) : malgré les apparences, il n'a pas su se détacher de ses désirs (l'ambition, la vanité ?) pour se consacrer tout entier à la prière ; pire, il a dissimulé ces désirs sous le masque de la dévotion - conduite hypocrite qui lui vaut un châtiment éternel. Au terme du récit, le paradoxe est résolu : le sage n'était pas celui que l'on croyait. Comme La Fontaine l'écrit un peu plus loin dans ce même livre XI, « Il ne faut point juger les gens sur l'apparence « (Le Paysan du Danube). Un récit seulement esquissé ? Ce petit récit, malgré la séduction de sa couleur orientale et le charme qu'il tire du va-et-vient entre songe et « réalité «, diffère sur bien des points de la ma...

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