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Le tragique de la chute chez Racine

Publié le 26/03/2015

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Dans l'esprit de la tragédie antique, Racine fait de la fatalité le moteur de l'action dramatique* : les héros ne sont que les victimes des dieux, de leur volonté impla­cable et de leurs jeux cruels. Dans Phèdre, les dieux (Vénus, Neptune) sont évoqués plus de 80 fois dans leur cruauté et les imprécations (« Ciel «, « Dieux «) qui abon­dent dans la parole de Phèdre sont autant de cris d'impuissance face à une fatalité divine qui pèse sur elle sans arriver à détruire le sentiment de sa culpabilité.

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« sont les personnages qui ont conscience d'être poursuivis, comme Atalide dans Bajazet (V, 12), Phèdre (1, 3) ou encore Oreste, lucide et désespéré (Andromaque ; 1, 1 V.

65-66 et 97-98) Chaque personnage racinien fait l'expérience, authentiquement tragique, des limites de la condition humaine et des souffrances que l'homme peut avoir à subir, sans solution ni recours.

Les dieux ne sont alors qu'une façon de désigner tout ce qui échappe à l'homme.

Il -LA PASSION DESTRUCTRICE La passion, figure de la fatalité Racine déplace le poids de la fatalité en l'intériorisant : ramenée au cœur de l'homme, elle prend la forme de la passion.

Dans la tragédie racinienne, l'amour ne peut être vécu que sur le mode de la souffrance et de l'aliénation: il s'agit d'une puissance fatale et aveugle, souvent frappée d'interdit.

Dans Britannicus, tout s'oppose à la passion de Néron pour Junie : « Octavie, Agrippine, Burrhus / Sénèque, Rome entière et trois ans de vertu » (Il, 2, v.

461-462).

Cet obstacle génère une violence doublement destructrice : le sadisme de Néron n'a d'égal que son masochisme et la violence qu'il déchaîne contre ceux qui lui résistent se retourne contre lui pour le détruire.

La dernière scène de Britannicus le montre incapable d'agir ou de parler, saisi par la tentation du suicide (V, 8).

L'é~~!em~!!t Dans le monde racinien, « la fureur » est partout : elle est un effet des passions humaines (l'amour et l'ambition surtout) et transforme les hommes en monstres d'égoïsme et de cruauté; elle est aussi le signe d'une impuissance radicale à exis­ ter.

Les personnages sont le plus souvent entraînés par l' « esprit d'imprudence et d'erreur» évoqué par Joad dans Athalie (1, 2): ces imprudences, en apparence ano­ dines, déclenchent « la machine infernale » définie par Anouilh et Cocteau.

Elles ont souvent pour origine l'amour: lorsque Phèdre revoit Hippolyte, sous le prétexte de lui recommander son fils, la tragédie se noue sans espoir de retour, dans la scène de !'aveu.

(Il, 5).

Toutes ces erreurs et leurs terribles conséquences sont autant de preuves qu'on n'échappe pas à l'engrenage de la passion.

_lJ n i:!!()!1~e.!~~~J~!ti~ Le tragique racinien repose donc sur un désespoir radical.

Toute espérance est minée par l'ironie tragique* : Andromaque (IV, 3), Britannicus (III, 6) et Iphigé­ nie (Il, 2) évoquent la« fausse espérance» dont on les a flattés.

À l'opposé de la tra­ gédie cornélienne, dont le dénouement ouvre une voie, même difficile, la tragédie racinienne pourrait se résumer à ce mot d' Atalide, quand elle vient d'apprendre les intentions de Roxane : « Mon unique espérance est dans mon désespoir.

» (I, 4, v.

336).

La lamentation tragique devant le destin, héritée de l' Antiquité, n'a plus chez Racine la dimension stoïque qu'elle revêtait chez Corneille: elle est liée à une fatalité intérieure et à la faute.

Conclusion : Le tragique racinien est donc celui de la chute du héros, menacé par un « dieu caché » aux décrets incompréhensibles et surtout par sa propre fatalité intérieure.

On peut voir là une métaphore de la sombre conception du monde et de l'homme proposée par les Jansénistes.. »

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