Les plaintes d'un amant - L’histoire du Chevalier Des Grieux et de Manon Lescaut
Publié le 11/05/2023
Extrait du document
«
Lecture n°5 Les plaintes d’un amant
Introduction :
L’histoire du Chevalier Des Grieux et de Manon Lescaut est le septième tome des
Mémoires et aventures d’un homme de qualité écrit par l’abbé Prévost.
Dès sa parution
en 1731, il connaît un grand succès.
Cet extrait dont nous allons présenter l’étude
linéaire est situé dans la seconde partie du roman-mémoires Manon Lescaut de l’abbé
Prévost dont la vie fait écho à celle de Des Grieux pour ses débauches et aventures.
Le
passage suit l’évasion organisée par Des Grieux pour libérer Manon de la prison de La
Salpêtrière.
À la suite de cette évasion, le jeune M.
de G.
M.
a pris contact avec Manon
lui demandant d’être sa maîtresse.
Manon accepte et se rend chez lui.
Pour éviter de
laisser seul Des Grieux, elle lui envoie une jeune femme pour lui tenir compagnie.
Désespéré, Des Grieux décide de rejoindre Manon chez M.
de G.
M.
Il se précipite alors
pour lui demander des explications, et la trouve en train de lire tranquillement.
Il accuse
sa maîtresse de trahison ce qui provoque les larmes de la jeune femme.
Dans cet extrait
les deux amants se font face : Des Grieux fait des reproches à Manon qu’il considère
comme ingrate, inconstante, infidèle et sans parole.
Quant à Manon, elle ne comprend
sincèrement pas l’attitude de Des Grieux
Nous verrons en quoi cette scène est révélatrice de l’opposition des deux personnages.
Pour répondre à cette problématique, nous suivrons les mouvements du texte, en
commençant par les reproches de Des Grieux comme il se sent trahi par Manon.
Ensuite
la réponse de Manon face à ces accusations.
Puis pour finir la colère de Des Grieux qui
décide de quitter Manon et de l’oublier.
Lecture du texte :
« Ah ! Manon, Manon, repris-je avec un soupir, il est bien tard de me donner des larmes,
lorsque vous avez causé ma mort.
Vous affectez une tristesse que vous ne sauriez sentir.
Le plus grand de vos maux est sans doute ma présence, qui a toujours été importune à
vos plaisirs.
Ouvrez les yeux, voyez qui je suis ; on ne verse pas des pleurs si tendres
pour un malheureux qu’on a trahi et qu’on abandonne cruellement.
»
Elle baisait mes mains sans changer de posture.
Inconstante Manon, repris-je encore,
fille ingrate et sans foi, où sont vos promesses et vos serments ? Amante mille fois
volage et cruelle, qu’as-tu fait de cet amour que tu me jurais encore aujourd’hui ? Juste
Ciel, ajoutai-je, est-ce ainsi qu’une infidèle se rit de vous, après vous avoir attesté si
saintement ? C’est donc le parjure qui est récompensé ! Le désespoir et l’abandon sont
pour la constance et la fidélité.
Ces paroles furent accompagnées d’une réflexion si amère, que j’en laissai échapper
malgré moi quelques larmes.
Manon s’en aperçut au changement de ma voix.
Elle rompit
enfin le silence.
Il faut bien que je sois coupable, me dit-elle tristement, puisque j’ai pu
vous causer tant de douleur et d’émotion ; mais que le Ciel me punisse si j’ai cru l’être,
ou si j’ai eu la pensée de le devenir !
Ce discours me parut si dépourvu de sens et de bonne foi, que je ne pus me défendre
d’un vif mouvement de colère.
Horrible dissimulation ! m’écriai-je.
Je vois mieux que
jamais que tu n’es qu’une coquine et une perfide.
C’est à présent que je connais ton
misérable caractère.
Adieu, lâche créature, continuai-je en me levant ; j’aime mieux
mourir mille fois que d’avoir désormais le moindre commerce avec toi.
Que le Ciel me
punisse moi-même si je t’honore jamais du moindre regard !
Demeure avec ton nouvel amant, aime-le, déteste-moi, renonce à l’honneur, au bon sens
; je m’en ris, tout m’est égal.
»
Etude du texte :
La répétition « Manon, Manon » ligne 1 traduit le cri de douleur et de désespoir de Des
Grieux.
On retrouve le champ lexical de la souffrance psychologique qui renforce cet effet de
plainte avec « soupir» (ligne 1), «larmes» (ligne 1), «malheureux» (ligne 2).
Des Grieux en veut à Manon qui s’est montrée cruelle et a causé son désespoir comme le
suggère l’hyperbole « causer ma mort » qui accentue l’expression de sa douleur et l’effet
de sa plainte dramatisée.
Un autre reproche est fait à Manon, c’est d’être une femme
hypocrite, on le voit à travers l’emploi du verbe « affectez » qui fait de Manon une actrice
qui dissimule ses intentions.
Il ne croit pas en ses larmes.
Il met Manon face à ses
contradictions, comme en témoigne la négation « on ne verse pas des pleurs », avec les
deux propositions subordonnées relatives « qu’on a trahi et qu’on abandonne cruellement
».
Pour Des Grieux, cette trahison est incompatible avec des larmes, Manon joue la
comédie et simule la tristesse derrière les larmes.
Cette structure en proposition valorise
la parole sous forme de lamentation et le rythme des phrases par la ponctuation renforce
cet effet de parole dans un rythme lent.
Ce sont les exclamatives, le champ lexical de la souffrance et le rythme des phrases qui
suggèrent cette plainte et font ressortir les oppositions entre les deux amants.
Les reproches sont de plus en plus violents ainsi que le souligne la multiplication des
interrogations, questions rhétoriques qui mettent en valeur l’indignation du personnage....
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