Devoir de Philosophie

L'espace et le temps - LA TRAGÉDIE RACINIENNE

Publié le 26/03/2015

Extrait du document

temps

Tous les héros raciniens savent ce qui les attend et l'urgence n'est atténuée que par d'illusoires sursis : Hermione peut croire au retour de Pyrrhus (Andromaque), Bajazet à la défaite d' Acomat (Bajazet) ou Antiochus à la possible conquête de Bérénice. C'est ce qui justifie leurs tentatives d'infléchir le destin. Mais tous les actes ou scènes d'exposition sont la mise en place d'une défaite annoncée : au moment où s'ouvre la tragédie, « les jeux sont faits, l'avenir est décidé depuis long­temps et le passé est une menace actuelle et imminente. Les trois dimensions de la temporalité se trouvent ainsi contractées en un présent atemporel qui n'a 

temps

« publique, tandis que Néron perd son pouvoir d'empereur face à la foule qui protège Junie (Britannicus; V, 8).

De même, la mer est une issue illusoire : elle est pour l'homme un lieu naturellement hostile (Phèdre, Mithridate).

Pour le héros racinien, il n'y a donc pas d'espace de liberté ni de salut: il est condamné à vivre dans un huis clos étouffant des conflits que le resserrement de l'espace porte à leur paroxysme.

La contrainte esthétique liée à l'unité de lieu devient dès lors un élément dramatique déterminant : elle met en évidence l'enfermement du héros tragique.

Il -LE TEMPS RACINIEN URGENCE ET SURSIS La densité du temp~ Le temps de la tragédie racinienne est un temps accumulé : le temps du présent de l'action, extrêmement réduit par la règle de l'unité de temps, est conditionné par le temps passé, au cours duquel la machine tragique s'est mise en marche.

L'action de la tragédie se nourrit donc d' « un passé monstrueusement amassé et tendu à écla­ ter : lorsqu'il est sur le point d'éclater, c'est alors que commence la pièce, dont l'action est comme catapultée par cette tension antérieure » (Jean Rousset, La Lit­ térature de /'âge baroque, Corti, 1954 ).

Lorsque Phèdre arrive sur scène, tout, ou presque, est dit:« Mon mal vient de plus loin ...

» (l, 3).

De même, Néron bascule dans la tyrannie par une sorte de nécessité interne mise en place dès sa naissance.

!:~ension tragique du temps Le temps racinien est également inexorable: il ne sert qu'à déployer les divers aspects d'une situation donnée dès le départ comme irrémédiable.

La dynamique de toutes les tragédies est dans cette tension vers « le point où se heurtent et se confon­ dent cause efficiente et cause finale » (G.

Poulet, Études sur le temps humain, IV, 1949).

Tous les héros raciniens vivent dans l'Ürgence : ils courent, se précipitent vers une issue forcément fatale.

Les personnages d'Andromaque illustrent cette pré­ cipitation du héros tragique qui court à sa perte ; Oreste dit ainsi à Pylade : « Mais admire avec moi le sort dont la poursuite Me fait courir alors au piège que j'évite» (I, 1, v.

65,66).

Hermione, elle aussi,« errante et sans dessein( ...

) cour(t) dans ce palais» (V, 1, v.

1395), à la recherche d'une issue qu'elle sait funeste.

Tous les héros raciniens savent ce qui les attend et l'urgence n'est atténuée que par d'illusoires sursis : Hermione peut croire au retour de Pyrrhus (Andromaque), Bajazet à la défaite d' Acomat (Bajazet) ou Antiochus à la possible conquête de Bérénice.

C'est ce qui justifie leurs tentatives d'infléchir le destin.

Mais tous les actes ou scènes d'exposition sont la mise en place d'une défaite annoncée : au moment où s'ouvre la tragédie,« les jeux sont faits, l'avenir est décidé depuis long­ temps et le passé est une menace actuelle et imminente.

Les trois dimensions de la temporalité se trouvent ainsi contractées en un présent atemporel qui n'a d'ouver­ ture que sur l'éternité» (L.

Goldmann, Racine, L'Arche, 1956).

Dans l'alternance de l'urgence et du sursis, qui assure la respiration de la tragédie, se dit le destin du héros tragique, entre liberté et impuissance.

Conclusion: L'espace et le temps raciniens sont donc des modalités impor­ tantes du tragique : bien loin d'être un obstacle à la création dramatique, les contraintes liées à l'unité de temps et de lieu sont pour Racine une manière de donner forme et force à la fatalité* tragique.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles