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Samuel Beckett dans Fin de partie, fait dire à un de ses personnages: "Rien n'est plus drôle que le malheur." Pensez-vous que cette déclaration s'applique à Oh les beaux jours et aux pièces représentant la condition humaine que vous avez lues ?

Publié le 08/05/2020

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Dissertation – Beckett

Le sujet : Samuel Beckett dans Fin de partie, fait dire à un de ses personnages: \"Rien n'est plus drôle que le malheur.\" Pensez-vous que cette déclaration s'applique à Oh les beaux jours et aux pièces représentant la condition humaine que vous avez lues ?

 

« Rien n’est plus drôle que le malheur ». Par cette phrase, que Samuel Beckett considère comme la plus importante de son œuvre, l’auteur de Oh les beaux jours appuie sur la rupture entre ses pièces et le théâtre classique en établissant un paradoxe basé sur la mise en lien des mots « drôle » (ce qui est plaisant, comique) et « malheur » (sort funeste). Ce paradoxe est de plus accentué par le placement du malheur au sommet de la hiérarchie humoristique. Le mot drôle peut cependant avoir un autre sens et signifie aussi ce qui est bizarre : expliquant ainsi la présence de l’absurde dans certaines pièces de Beckett, afin de toucher et choquer le spectateur et le faire réfléchir sur sa condition en posant des questions qui diffèrent de l’ordinaire ou du moins de les poser d’une manière différente. L’utilisation du présent à valeur gnomique témoigne de la volonté qu’a Beckett de définir la condition humaine en établissant une vérité générale et ramène ainsi Fin de partie à une réflexion sur cette condition humaine. Samuel Beckett veut montrer donc par ce paradoxe que comique et malheur peuvent cohabiter et sont liés mais la question se pose de connaître la nature du lien établi entre ces deux notions et de la place de cette relation dans les pièces représentant la condition humaine.  

Comment malheur et comique sont-ils associés dans certaines pièces représentant la condition humaine ?

Nous verrons dans un premier temps si malheur et comique cohabitent dans certaines pièces représentant la condition humaine puis les différents liens entre malheur et comique. Nous verrons enfin que la phrase de Beckett s’applique aux hommes et est révélatrice de sa condition.

 

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« Ainsi, on remarque dans l’exemple d’ Hamlet que l’auteur ne se contente pas de faire cohabiter rire et malheur mais que ceux-ci sont liés par de liens de causalité différents selon l’auteur et selon l’objectif de la pièce.

Dans un premier temps, le malheur peut directement être la source du comique.

Dans Fin de partie , ce qui peut paraître drôle, c’est l’entêtement des personnages dans l’échec, malgré les exagérations et amplifications de l’auteur qui montrent qu’une autre situation est possible. De plus, le comique peut être utilisé intentionnellement pour vaincre le malheur.

En effet le rire permet de détendre le tragique pour éviter de tomber dans le pathos mélancolique. Ainsi l’humour est une lutte contre certaines réalités de la vie telles que la mort ou la maladie (dans Fin de partie , les personnages sont handicapés).

La mort de Nell, dans Fin de partie , apparaît comme une des scènes les plus pathétiques, mais tout ce pathos est détruit par des propos incongrus qui annulent complétement l’émotion de cette scène : « il pleure… - donc il rit » qui caricature le célèbre « je pense donc je suis » et l’impassibilité du fils à la vue de sa mère morte.

Dans Oh les beaux jours la stratégie de Winnie confrontée à l’absurdité de sa condition passe, comme le conseille Pascal dans Pensées , par le divertissement.

Winnie se divertit en effet grâce aux objets que son sac contient mais aussi grâce à l’humour qui la pousse même à rire avec Willie, et qui lui permet de combattre la solitude qu’elle redoute.

Enfin le comique de ces pièces demeure dans le malheur des autres et c’est ce pourquoi il est si drôle.

Si l’on rit de la situation absurde de ces personnages, le spectateur n’aimerait pas pour autant se retrouver dans pareille situation.

Le comique passe donc ici pour l’auteur par la dégradation de ses personnages : Lucky est trainé par une laisse, Nag et Nell sont dans des poubelles.

Le malheur des personnages peut donc pousser à l’humour par la moquerie ou au moins par une certaine ironie comme dans Andromaque où Pyrrhus, Hermione et Oreste sont frappés d’infériorité : celui ou celle qu’ils aiment les refuse pour aimer plus haut.

Ainsi, Oreste aime Hermione qui la rejette car elle aime Pyrrhus, qui la rejette perce qu’il aime Andromaque, qui la rejette parce qu’elle aime Hector : l’irone est ainsi accentuée par la répétition de la situation de Pyrrhus et celle d’Hermione qui refusent et sont refusés pour la même raison.

Ces échecs poussent ainsi le spectateur à se moquer des personnages et Oreste, lui-même, par l’autodérision qu’il pratique incite le spectateur à en rire.

En effet, la dérision dont sont victimes les personnages de ces pièces de théâtre montre que le comique que le lecteur pense trouver vient de la façon dont le lecteur perçoit la situation.

Ainsi par cette phrase paradoxale, Samuel Beckett attaque directement le lecteur et donc l’homme : par « drôle », Beckett fait en effet ressortir ce qui permet à ces auteurs de la condition humaine de choquer le lecteur en utilisant un malheur bizarre, absurde pour intriguer le lecteur et le pousser à se poser des questions sur sa condition.

Si le lecteur acquiesce à la première lecture de cette phrase étant donné qu’il parvient à rire du destin tragique des personnages, une seconde lecture plus réfléchie fait ressortir l’ironie de Beckett et pousse le lecteur à se demander pourquoi il rit et à se demander plutôt si « rien n’est plus drôle que le malheur des autres ».

Cette lecture de la citation de Beckett touche en effet la société dans ces mœurs en attaquant l’importance de l’autre, seul être capable de trouver du comique dans le malheur des uns.

Ainsi cette considération rejoint celle de Sartre qui indique dans Huis-clos que « l’enfer c’est les autres » car les autres sont le seul moyen pour l’homme, comme le dit lui- même Sartre, de se juger, parce que le jugement d’autrui entre forcément dans la considération que se fait l’homme de lui-même.

La seule existence de mauvais rapports entre deux personnes suffit donc à faire rentrer l’un dans l’enfer : la pièce Huis-clos permet à Sartre de développer ce point en constituant l’enfer par la simple cohabitation de trois personnes dans un espace fermé et ainsi confrontés à eux-mêmes.

Même si cette phrase ne condamne. »

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