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Segrais : Les " Nouvelles françaises "

Publié le 23/03/2018

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Segrais : Les \" Nouvelles françaises \"

Segrais fait la transition entre le roman baroque et le roman classique. La Lettre de l'origine des romans, monument anachronique élevé par Huet à la gloire du premier, lui est dédiée, et La Princesse de Clèves, chef-d'œuvre du second, a été rédigée avec sa collaboration ou du moins selon ses conseils. Plusieurs années avant le tome X de Clélie Mlle de Scudéry introduisit une conversation sur la « fable ))' les six devisantes des Nouvelles françaises (1657) ' disaient leurs goûts en matière de roman; la curiosité du public ne se porte plus seulement sur les œuvres romanesques, mais sur la façon dont elles sont faites; la bonne société, qui laisse aux littérateurs de métier les grands genres poétiques et le théâtre, voit dans le roman une forme de création à sa portée, dont elle discute les aspects et les principes; déjà avant Segrais, l'abbé de Pure dans la Prétieuse ou le mystère des ruelles (1656) avait rapporté les propos tenus dans les cercles précieux sur les différences du roman et de l'histoire, sur la vraisemblance romanesque, sur la priorité à donner à l'étude du cœur humain, etc. L'admiration des précieuses allait aux romans de Mlle de Scudéry, alors dans leur nouveauté, mais non sans quelque impatience de leur longueur excessive, et elles s'intéressaient beaucoup plus à la psychologie qu'aux aventures.

La princesse Aurélie, qui s'est retirée dans son château des Six-Tours, y a été rejointe par Frontenie, Gelonide, Aplanice, Silerite et Uralie; un beau jour de printemps, lê spectacle de la nature ayant excité l'imagination de ces six dames, elles en viennent à parler de leurs lectures, de L' Astrée, de Polexandre, du Grand Cyrus, de ce qu'elles admirent dans ces œuvres, de ce qu'elles aimeraient trouver dans un roman; les Contes de Marguerite de Navarre sont cités au cours de leur conversation, et la princesse Aurélie propose à ses compagnes d'en imiter l'exemple et de raconter chacune à son jour une histoire véridique. C'est ainsi que débutent les Nouvelles françaises ou les Divertissemens de la Princesse Aurélie. Segrais affecte de n'être que le fidèle secrétaire de la petite société, dont les participantes ont été identifiées: la princesse Aurélie est Mlle de Montpensier, retirée après la Fronde dans son château de Saint-Fargeau, et dont Segrais fut effectivement le secrétaire; mais même si quelques opinions de Mlle de Montpensier ou de ses amies et quelques souvemrs de la vie à Saint-Fargeau ont passé dans les Nouvellesfrançoises, la mise en scène et les six nouvelles du recueil sont de l'invention de Segrais.

 

Comme chez Marguerite de Navarre, les nouvelles sont suivies de débats : mais le lien entre ceux-ci et celles-là est chez Segrais beaucoup plus lâche, sauf quand l'entretien roule sur l'esthétique du genre romanesque; les réflexions de morale et de psychologie n'approfondissent pas le sens des récits qui leur servent de prétexte, elles restent spéculatives et abstraites comme les conversations des romans de Mlle de Scudéry; les récits eux-mêmes ne sont pour les devisantes

« qu'une variété de divert issements et non l'expression transposée des problèmes de leur existen ce; l'unité et le mouvement de l' He ptaméron n'ont pas été retrouvés par Segrais.

Ils ne pouvaient pas l'être : les Nouvelles françaises ne sont pas inspirées par une grande idée directrice, réforme du roman ou vue nouvelle sur l'homme, mais par une inquiétude du goût et le désir d'explorer les ressources du genre romanes que.

Chaque devisante a sa personnalité, chacune a ses préf érences et ses préjugés et, comme les devisants de Marguerite de Navarre, on peut les répartir en deux groupes selon qu'elles sont plus sensibles à l'attrait de la vérité et du naturel, ou au charme de l'imagination romanesque.

La princesse, Gelonide et Aplanice forment le premier groupe, Frontenie, Uralie et Silerite forment le second ; mais ces groupes ne se heurtent pas comme le groupe des réalistes et celui des idéalistes chez Marguerite de Navarre : ils se complètent, leurs opinions se nuancent les unes par les autres.

La princes se formule avec clarté la distinction entre le genre ancien et le genre nouveau, c'est-à-dire entre le roman et la nouvelle :. »

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