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David HUME: Justice et convention

Publié le 06/04/2005

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hume
J'ai déjà observé que la justice naît de conventions humaines ; et que celles-ci ont pour but de remédier à des inconvénients issus du concours de certaines qualités de l'esprit humain et de la situation des objets extérieurs. Les qualités de l'esprit sont l'égoïsme et la générosité restreinte : la situation des objets extérieurs est la facilité de les échanger jointe à leur rareté en comparaison des besoins et des désirs des hommes (...). On remarque aisément qu'une affection cordiale met tout en communauté entre amis ; et que des époux, en particulier, perdent l'un et l'autre leur propriété et ne connaissent plus le tien et le mien qui sont si nécessaires et qui pourtant causent tant de trouble dans la société humaine. Le même effet résulte d'un changement des circonstances où vivent les hommes ; quand par exemple il y a une assez grande abondance d'un bien pour contenter tous les désirs des hommes ; dans ce cas disparaît complètement toute distinction de propriété et tout demeure en commun. Nous pouvons observer cette situation pour l'air et pour l'eau, qui sont pourtant les plus estimables des objets extérieurs (...). Voici donc une proposition qu'on peut, à mon avis, regarder comme certaine : c'est uniquement de l'égoïsme de l'homme et de sa générosité limitée, en liaison avec la parcimonie avec laquelle la nature a pourvu à la satisfaction de ses besoins, que la justice tire son origine. David HUME

Hume réfute à la fois ceux qui pensent que l'homme est par nature incapable de générosité et ceux qui pensent qu'il est par nature dévoué à ses semblables. Ni ange, ni bête, l'homme a besoin de recourir à l'artifice de la justice, parce que les circonstances la rendent nécessaire.      POUR MIEUX COMPRENDRE LE TEXTE    Dès le début du texte, Hume se situe sur le terrain de l'expérience et de l'observation. Son ambition est d'étudier l'homme tel qu'il est et non tel qu'il devrait être, ou tel que nos préjugés nous le font dépeindre.  Or il ressort de cette observation que la nécessité d'établir des règles de justice naît de la réunion de certaines circonstances. D'une part, l'homme est capable de générosité, mais elle se limite à ses proches. L'homme est naturellement partial. D'autre part, les biens qui sont à sa disposition ne sont pas illimités. Leur rareté oblige à établir des règles de propriété.  Mais c'est seulement la réunion de ces deux facteurs qui rend la justice nécessaire. Il suffit de faire varier l'un des éléments (par exemple, la rareté), pour que le second (la partialité) ne soit pas un obstacle à l'entente des hommes entre eux. Si tous les biens étaient abondants, le besoin d'établir des règles de propriété disparaîtrait.

hume

« par contraste, à démontrer la véracité de sa théorie relative à la justice. - 3e Mouvement : Ce 3 e mouvement s'étend de « voici donc une proposition » jusqu'à la fin du texte.

Il s'agit ici pour Hume de tirer les conclusions de son analyse en énonçant un principe général qui est apte àmettre au jour l'origine de la justice. Explication détaillée - 1er MOUVEMENT « J'ai déjà observé que la justice naît de conventions humaines ; et que celles-ci ont pour but de remédier à des inconvénients issus du concours de certaines qualités de l'esprit humain et de la situation des objetsextérieurs.

Les qualités de l'esprit sont l'égoïsme et la générosité restreinte : la situation des objets extérieurs estla facilité de les échanger jointe à leur rareté en comparaison des besoins et des désirs des hommes.

» Hume commence par rappeler le fait qu'il a déjà fait démonstration du fait que la justice est une vertu non pasnaturelle – comme certains philosophes le défendent – mais bien artificielle.

C'est précisément ce que signifie lefait de naître « de conventions humaines ».En effet, si Hume ne nie jamais qu'il existe bien un sentiment de justice en chaque homme, il nie cependantqu'un tel sentiment soit inné.

La justice est une vertu artificielle mais qui n'a de sens qu'une fois desconventions établies.

Elle n'est pas l'expression d'un instinct naturel en l'homme.

La justice suppose descirconstances, elle aurait pu ne pas s'instituer, dans deux cas possibles : dans l'âge d'or (état où tous lesbiens sont en abondance) et si les hommes étaient universellement bienveillants.

La justice ne vient pas d'uninstinct naturel des hommes.Ce qu'il faut donc comprendre c'est que la justice, comme vertu artificielle, naît du fait de plusieursconditions : d'abord il s'agit d'une condition inhérente à la nature humaine elle-même, ensuite il s'agit d'unecondition relevant de la nature extérieure.L'homme n'est par nature ni purement égoïste, ni purement bienveillant : il possède une bienveillance limitée,limitée d'ailleurs par son égoïsme.

Les instincts naturels pour l'homme sont un égoïsme et une bienveillance limités, mais certainement pas unecrainte pour ses semblables.

Même si une fois le gouvernement institué, il renforce les lois instituées, il y a biendistinction entre gouvernement et justice.

L'origine de la justice n'est pas celle des promesses.

On a tendancesouvent à établir une confusion entre convention et promesse.

La promesse ne peut pas être à l'origine de lasociété puisqu'elle la présuppose.

La justice est une convention et non une promesse, elle n'est pas une vertunaturelle puisqu'elle dépend des circonstances.

Ces circonstances qui amènent les hommes à établir la justicesont celles de son état naturel habituel ; il y a une constante chez les hommes à se réunir en société.

Lajustice peut être dite naturelle en ce sens seulement, c'est-à-dire au sens d'habituel, en tant qu'elle désigneune tendance naturelle des hommes à vivre ensemble, « propension universelle » influencée par lescirconstances.

La tendance à vivre en société est rapportée à la nature humaine en tant que lescirconstances s'imposent à elle.Le souci de la justice qui procède au départ à la conscience de son intérêt, s'accompagne par le mécanisme desympathie qui fait que l'on désapprouve l'injustice.

Elle devient donc une vertu morale, qui à son tour renforcela pratique ® il s'agit là d'une forme dialectique de l'origine et de l'observance de la justice. La justice ne relève pas d'une promesse par laquelle chaque homme s'engagerait à acquérir ce qu'il veut.

Ilexiste une différence entre cette convention qui est à l'origine de la justice et l'idée de pacte.

Qu'est-ce quipoussent les hommes à faire et à tenir des promesses ? Elles ne sont intelligibles que dans une société déjàformée.

L'obligation de tenir ses promesses est donc bien évidemment une vertu artificielle.

L'obligation que l'onressent de tenir ses promesses n'a rien de naturel.

Pas plus que le sentiment de respect de la justice n'estnaturel, pas davantage l'obligation de tenir ses promesses ne l'est.

Elle ne relève pas d'un sentiment immédiat,contrairement à d'autres obligations qui sont elles ressenties immédiatement et qui ne suppose aucuneconvention.

Quand Hume parle de vertus naturelles, il s'agit de disposition par lesquels on a tendance à agirselon certaines prescriptions que l'on découvre immédiatement et qui ne suppose aucune convention.L'obligation d'honnêteté ne relève pas d'instincts directs.D'où l'on comprend, à travers cette exemplification de la justice dans la promesse, que la nature humaine,n'étant par elle-même ni purement égoïste ni purement bienveillante, conjuguée à des conditions extérieuresqui font que la nature est insuffisamment généreuse, sont à l'origine de l'institution de la justice qui est doncbien une vertu artificielle. - 2e MOUVEMENT « On remarque aisément qu'une affection cordiale met tout en communauté entre amis ; et que des époux, en particulier, perdent l'un et l'autre leur propriété et ne connaissent plus le tien et le mien qui sont si nécessaires etqui pourtant causent tant de trouble dans la société humaine.

Le même effet résulte d'un changement descirconstances où vivent les hommes ; quand par exemple il y a une assez grande abondance d'un bien pourcontenter tous les désirs des hommes ; dans ce cas disparaît complètement toute distinction de propriété et toutdemeure en commun.

Nous pouvons observer cette situation pour l'air et pour l'eau, qui sont pourtant les plusestimables des objets extérieurs.

». »

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