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d'expulsion de la substance divine, si l'on en croit la légende d'Isis et de Rê.

Publié le 06/01/2014

Extrait du document

d'expulsion de la substance divine, si l'on en croit la légende d'Isis et de Rê. De l'union du Sec et de l'Humide naît un deuxième couple : le Ciel, Nout, et la Terre, Geb, une femme et un homme. Le Ciel et la Terre ont quatre enfants : Isis et Osiris, Seth et Nephtys. Cette ennéade divine répartie sur quatre générations fait le lien entre la création et les hommes. Les deux dernières générations introduisent, en effet, le règne humain en intégrant la légende osirienne, modèle de la passion qui est le lot des mortels. Le second couple est stérile. Le premier, qui st fertile, constitue le prototype de la famille royale : Osiris, roi d'Égypte, est traîtreusement assassiné par son rère Seth -- qui représente donc la contrepartie négative et violente de la force organisatrice symbolisée par le haraon. Il s'empare de son trône après sa mort. Isis, modèle de l'épouse et de la veuve, aidée par sa soeur ephtys, reconstitue le corps dépecé de son mari. Anubis, le chacal né, dit-on, des amours illégitimes de ephtys avec Osiris, vient à son secours pour embaumer le roi défunt. Puis elle donne le jour à un fils posthume, Horus, homonyme du dieu solaire d'Edfou et, comme lui, incarné dans un faucon. Elle le cache dans es marais du Delta, à proximité de la ville sainte de Bouto, avec la complicité de la déesse Hathor, la vache nourricière. L'enfant grandit, et, après une longue lutte contre son oncle Seth, obtient du tribunal des dieux présidé par son grand-père Geb d'être réintégré dans l'héritage de son père qui, lui, se voit confier le royaume des morts... Sur ce schéma du règne des dieux se greffent de nombreuses légendes secondaires ou complémentaires que les théologiens ont multipliées à plaisir pour introduire une divinité locale, embellir son rôle dans la cosmologie ou assurer la fusion syncrétique de plusieurs ensembles. Il en résulte une imbrication complexe de mythes se recoupant souvent entre eux qui mettent tous en scène des dieux régnant sur la terre et soumis aux passions umaines. Il y est peu question de la création même des hommes, qui semble contemporaine de celle du onde, à une seule exception près : la légende « de l'oeil de Rê ». Le Soleil perd son oeil. Il envoie ses enfants, hou et Tefnout, à la recherche du fugitif, mais le temps passe sans que ceux-ci reviennent. Il décide donc de emplacer l'absent. Entre-temps, l'oeil fugitif revient et se voit remplacé. De rage, il se met à pleurer, et de ses armes (remout) naissent les hommes (remet). Rê le transforme alors en cobra et l'accroche à son front : il st l'uraeus chargé de foudroyer les ennemis du dieu. L'aspect anecdotique de la création des hommes est ici rès exceptionnel, et l'on peut supposer que cette origine est avant tout due au jeu de mots, trop tentant pour le héologien, entre le nom des larmes et celui de l'humanité. e thème de l'oeil endommagé ou remplacé connaît plusieurs développements : il sert aussi à expliquer la aissance de la lune, second oeil de Rê confié à Thot, le dieu scribe à tête d'ibis, ou oeil « sain » d'Horus. Celuii, en effet, perdit un oeil lors du combat qui l'opposa à Seth pour la possession du royaume d'Égypte; Thot le lui urait rendu et en aurait fait le prototype de l'intégrité physique. C'est la raison pour laquelle il figure d'ordinaire ur les cercueils où il garantit au mort le plein usage de son corps. ê, le roi des dieux, doit lutter pour conserver un pouvoir que tentent de lui ravir chaque nuit lors de sa course ans l'au-delà des ennemis acharnés conduits par Apophis, personnification des forces négatives. Horus, à la ête des harponneurs de la barque divine, l'aide à les vaincre, consacrant ainsi une nouvelle contamination des ythes solaire et osirien. Les tentatives menées contre le roi des dieux prennent parfois un tour plus inattendu. 'est, par exemple, Isis, la Grande Magicienne, qui essaie de prendre pouvoir sur Rê en le faisant mordre par n serpent façonné dans l'argile mouillée de la salive que le dieu, devenu un vieillard débile, laisse échapper de a bouche en partant le matin éclairer l'univers. Le roi divin est saisi par la propre puissance issue de son corps pour être sauvé, il doit révéler à celle qui a créé ce charme le secret de son énergie vitale -- les noms de ses aou. C'était le but poursuivi par Isis qui voulait ainsi prendre pouvoir sur lui en apprenant ses noms secrets... ans doute le vieux dieu arrive-t-il à déjouer le piège de la sorcière; mais le texte est interrompu, et on ne onnaît pas la fin de l'histoire. 'Égypte possède, elle aussi, le mythe de la révolte des hommes contre leur créateur, qui décide alors, sur le conseil de l'assemblée des dieux, de les détruire. Il envoie pour cela sur terre son oeil sous la forme de la déesse Hathor, messagère de son courroux. Celle-ci dévore en un jour une partie de l'humanité puis s'endort. Rê, jugeant la punition suffisante, répand dans la nuit de la bière qui, mêlée aux eaux du Nil, a l'apparence du sang. A son réveil, la déesse lape ce breuvage et s'écroule, terrassée par l'ivresse. L'humanité est sauvée, mais Rê, déçu par elle, décide de se retirer dans le ciel, sur le dos de la vache céleste qui sera soutenue par le dieu Chou. Il remet l'administration de la terre à Thot et les serpents, insignes de la royauté, à Geb. Ainsi se trouve consommée la séparation des dieux et des hommes, chacun se voyant assigner sa place dans l'univers, qui connaît désormais l'espace et la durée -- djet et neheh. Cette légende du courroux apaisé rappelle celle de la Déesse Lointaine : une lionne furieuse terrorisait la Nubie. Un messager de son père Rê la ramena, apaisée, en Égypte, sous l'apparence d'une chatte dont le Soleil fit sa gardienne. La cosmologie héliopolitaine, on le voit, l'emporte en s'assimilant les principaux mythes du pays. Mais elle n'est pas la seule. La ville d'Hermopolis, aujourd'hui Achmounein, à environ trois cents kilomètres au sud du Caire, qui était la capitale du XVe nome de Haute-Égypte, a élaboré sa propre cosmologie, qui fut un temps rivale de celle d'Héliopolis. Elle prend le problème à rebours de cette dernière : le soleil n'y est pas le premier, mais le dernier maillon de la chaîne. Le point de départ est le même : un chaos liquide incréé, dans lequel s'ébattent quatre couples de grenouilles et de serpents qui assemblent leurs forces pour créer et déposer un oeuf sur une utte émergeant hors de l'eau. Ces couples sont chacun composés d'un élément et de sa parèdre : Noun et aunet, l'océan primordial qu'Héliopolis intègre, comme nous l'avons vu, dans son propre système, Heh et ehet, l'eau qui cherche sa voie, Kekou et Keket, l'obscurité, et, enfin, Amon, le dieu caché et sa parèdre maunet. Par la suite, lorsque le dernier élément de l'ogdoade, Amon, deviendra le dieu dynastique, le clergé hébain se chargera de reconstituer une « famille » au schéma plus humain, assurant, comme celle d'Héliopolis, a transition entre la création et le règne humain. es systèmes héliopolitain et hermopolitain, ainsi que les grands mythes populaires comme celui d'Osiris, résentent des éléments tirés du substrat profond de la civilisation, dont certains ont des résonances dans les ivilisations africaines : Anubis rappelle le chacal incestueux au rôle prométhéen antérieur aux Nommos chez es Dogons du Mali, dont la cosmogonie repose également sur huit dieux fondateurs. On pourrait, d'ailleurs, ultiplier ce type de rapprochements : Amon est, ici comme là, le bélier d'or céleste, au front orné de cornesrochet et d'une calebasse évoquant le disque solaire; Osiris rappelle le Lébé, dont la résurrection est nnoncée par la repousse du mil, tandis que, plus profondément encore et au-delà du verbe créateur, l'individu st composé d'une âme et d'une énergie vitale (Griaule : 1966, 28-31; 113-120; 66; 194 sq.), que les Égyptiens ppelaient ba et ka... Du Mythe à l'Histoire a troisième cosmogonie est, elle, beaucoup plus achevée d'un point de vue théologique. Nous la connaissons ar un document unique, tardif puisqu'il date du règne du souverain kouchite Chabaka, à la charnière du VIIe et u VIe siècle avant notre ère : une grande dalle de granit provenant du temple de Ptah à Memphis et conservée u British Museum. Elle se présente comme la copie d'un ancien papyrus « mangé aux vers » et combine les léments des deux précédentes tout en reconnaissant au dieu local, Ptah, le rôle du démiurge. On pourrait ême dire que ce sont les éléments héliopolitains et osiriens qui dominent, avec toutefois une recherche très ette de l'abstraction dans la formulation du mécanisme de la création qui se fait par l'exercice combiné de la ensée et du verbe. e texte date manifestement de l'Ancien Empire, période où Memphis joua le premier rôle national, et sans oute même de la Ve dynastie, c'est-à-dire de l'époque où la doctrine héliopolitaine l'a définitivement emporté. 'est également de la Ve dynastie que date le premier document connu d'un autre type, dont le but est, xplicitement, de rendre compte de la continuité qui lie les hommes aux dieux : la Pierre de Palerme. lle appartient à la catégorie des annales, qui nous sont parvenues en relativement grand nombre sous la orme de listes royales agrémentées ou non de commentaires. La plus célèbre est l'oeuvre de Manéthon, un rêtre de Sébennytos (aujourd'hui Samanoud sur la rive occidentale de la branche de Damiette dans le Delta) ui vivait à l'époque grecque, sous le règne des deux premiers Ptolémées. C'est lui qui a déterminé le écoupage de la chronologie historique en trente dynasties, depuis l'unification du pays par Ménès, auquel on a ssimilé Narmer, jusqu'à la conquête macédonienne. Ses Aegyptiaca ne nous sont, malheureusement, arvenues que de façon très fragmentaire à travers des oeuvres tardives (Helck : 1956). Les listes antérieures atent presque toutes de l'époque ramesside. La plus importante est un papyrus rédigé sous le règne de amsès II conservé au Musée de Turin, sur lequel Champollion fut le premier à travailler, et qui porte une liste rganisée par dynasties allant des origines au Nouvel Empire. C'est sans doute d'une liste de ce type que se ont inspirées les « tables » comme celles de la « Chambre des Ancêtres » de Karnak, aujourd'hui au Louvre, u du temple funéraire de Séthi Ier à Abydos, celle que l'on a retrouvée à Saqqara dans le tombeau de Tounroï, n contemporain de Ramsès II, et d'autres de moindre ampleur (Grimal : 1986, 597 sq.). a Pierre de Palerme est une plaque de pierre noire fragmentaire donnant la liste des rois depuis Aha, le remier souverain de la Ire dynastie, et au moins jusqu'au troisième de la Ve dynastie, Néferirkarê. alheureusement, ce document est incomplet et de provenance inconnue : il est entré au Musée de Palerme ar legs en 1877, et, depuis, six nouveaux fragments sont apparus dans le commerce, qui sont conservés aintenant au Musée du Caire et à l'University College de Londres. On a mis en doute leur authenticité et leur ppartenance même à la Pierre de Palerme, et une vive controverse se développe à leur sujet depuis presque n siècle. es fragments du Caire énumèrent des rois qui, au début, portent alternativement la couronne de Haute et de asse-Égypte. Manéthon et le Canon de Turin, présentent, eux, tout en conservant la structure annalistique, ne formulation cosmologique des origines : l'intégration du Mythe à l'Histoire se fait par le recours à l'Âge d'Or, endant lequel les dieux ont régné sur terre. Les listes royales reproduisent les données des cosmogonies et lus particulièrement de celle de Memphis : au départ se trouve le fondateur, Ptah, dont le rôle est ici proche de elui de Chnoum, le potier qui a créé l'humanité sur son tour, façonnant le réceptacle de l'étincelle divine dans e matériau depuis toujours à la disposition de l'homme : l'argile. Rê lui succède. Soleil qui crée la vie en issipant les ténèbres, il est le prototype de la royauté, qu'il cédera à Chou, l'air, séparateur de la Terre et du iel. Ainsi sont mis en place les temps principaux de la création. Les compilateurs grecs de Manéthon ne s'y sont pas trompés, qui ont vu dans Ptah Héphaïstos, le dieu forgeron, et dans Rê Hélios, le soleil. Chou et son successeur Geb, la Terre, se partagent le rôle de Kronos et de Zeus chez Diodore de Sicile, qui reconnaît ainsi en Geb le père des hommes. On voit que l'Histoire est un prolongement du Mythe et qu'il n'existe, pour les Égyptiens, aucune solution de continuité entre les dieux et les hommes : leur société est une reproduction quotidienne de la création et se doit, en tant que telle, de refléter l'ordre du cosmos à tous ses niveaux. Son mode de constitution suit donc volontairement celui de l'univers, ce qui n'est pas sans influencer les analyses contemporaines qui en sont faites. Osiris succède à Geb, et, après l'usurpation de Seth, Horus monte sur son trône. Le Canon de Turin donne ensuite une séquence de trois dieux : Thot, dont nous avons vu plus haut le rôle, Maât, et un Horus dont le nom est perdu... Maât tient une place à part dans le panthéon : elle n'est pas, à proprement parler, une déesse, mais plutôt une entité abstraite. Elle représente l'équilibre auquel l'univers est arrivé grâce à la création, c'est-à-dire sa conformité à la vérité de sa nature. En tant que telle, elle est la mesure de toutes choses, de la justice à l'intégration de l'âme du mort dans l'ordre universel lors du jugement dernier. Elle lui sert alors de contrepoids pour équilibrer sa pesée sur la balance de Thot. Elle est également la nourriture des dieux, auxquels elle apporte son harmonie. Ainsi, le règne de Maât est l'Âge d'Or que chaque souverain va entreprendre de faire régner à nouveau en affrontant les forces négatives traditionnelles qui cherchent chaque jour à entraver la course du soleil : Maât est le point de départ d'une histoire cyclique. Neuf dieux leur succèdent, qu'Eusèbe assimile aux héros grecs. Ils assurent, comme ceux-ci, la transition vers le pouvoir des fondateurs humains : les « âmes » (akhou) d'Hiérakonpolis, Bouto et Héliopolis, dont la série se clôt par les « compagnons d'Horus ». Sans doute faut-il voir là le reflet des luttes qui ont conduit à l'unification du pays, et pour lesquelles le Canon de Turin reconnaît plusieurs lignées locales. Il distingue clairement le premier « roi de Haute et Basse-Égypte » (nysout-bity) Meni, dont il répète deux fois le nom, mais avec une différence d'importance : la première fois, il l'écrit avec un déterminatif humain, la seconde, avec un déterminatif divin (Gardiner : 1959, pl. I; Malek, BIFAO 68 (1982), 95). Ce Meni -- Ménès chez Ératosthène et Manéthon -- est-il, comme on le pense généralement, Narmer, ou simplement une façon de désigner, comme c'est l'habitude dans les textes, « quelqu'un » en général dont on a perdu le nom ? On penserait alors au roi Scorpion ou à quelque autre, dont le nom ne nous serait pas parvenu. On comprend tout de même mal pourquoi il est nommé deux fois. Est-ce parce qu'il est passé de la situation de « untel » à celle de « roi untel », changeant de nom en même temps que de statut, le document voyant en lui l'incarnation non individualisée de la somme des détenteurs locaux du pouvoir fondue en un archétype de l'unité ? Cela expliquerait que la Pierre de Palerme ne connaisse comme premier roi qu'un Aha, qui serait alors un autre nom, celui « d'Horus », de Narmer-Ménès... CHAPITRE III La période thinite Les premiers rois Quelle que soit la solution retenue, Aha ouvre la Ire dynastie, que Manéthon qualifie, comme la IIe, de « thinite , du nom de sa ville d'origine supposée, This, non loin d'Abydos. On a retrouvé à Abydos les tombeaux de tous es rois de la Ire dynastie et de quelques-uns de la IIe; mais la plupart d'entre eux avaient une autre sépulture à roximité de Memphis. L'état de ces tombeaux ne permet pas de savoir si, comme on l'a supposé, ces rois se aisaient enterrer à proximité de la nouvelle capitale politique du pays pour respecter la dualité du pays tout en onservant un cénotaphe en Haute-Égypte, d'où était censé venir leur pouvoir, dans un site qui sera bientôt onnu comme étant la ville sainte d'Osiris. es deux dynasties forment un tout, de 3150 vers 2700 avant notre ère, presque cinq siècles au cours desquels a civilisation achève de prendre ses caractères définitifs. C'est une période assez mal connue, essentiellement ar manque de documentation, la principale source de nos connaissances restant, la Pierre de Palerme mise à art, les tombeaux découverts à Abydos et à Saqqara et le matériel qu'ils ont livré. ha, comme tout fondateur, se voit attribuer sans doute plus qu'il n'a réalisé. S'il ne fait qu'un avec Narmer, 'est lui le promoteur du culte du crocodile Sobek dans le Fayoum et le fondateur de Memphis. Il y aurait robablement installé, en même temps que son administration, le culte du taureau Apis. On suppose également u'il a organisé le pays nouvellement unifié en menant une politique de conciliation avec le Nord. C'est du oins ce que l'on déduit du fait que le nom de son épouse Neïthhotep, « que Neïth soit apaisée », était formé à 3150-2700 PÉRIODE THINITE 3150-2925 Ire DYNASTIE .... -3150 Plusieurs rois (?) dont « Scorpion » 3150-3125 Narmer-Ménès 3125-3100 Aha 3100-3055 Djer 3055-3050 Ouadji (« Serpent ») 3050-2995 Den 2995-.... Adjib ....-2950 Semerkhet 2960-2926 Qaâ 2925-2700 2925-.... IIe DYNASTIE Hotepsekhemoui ....-.... Nebrê ....-.... Nineter ....-.... Ouneg ....-.... Senedj ....-.... Peribsen ....-.... Sekhemib ....-2700 Khâsekhem/Khâsekhemoui ig. 13 Tableau chronologique de la période thinite. partir du nom de la déesse Neïth, originaire de Saïs dans le Delta. On a retrouvé le tombeau de cette reine à Nagada, pourvu d'un abondant mobilier parmi lequel se trouvait une tablette au nom d'Aha. Ce dernier aurait encore fondé un temple de Neïth à Saïs et célébré les fêtes d'Anubis et de Sokaris, le faucon momifié, ainsi que son propre jubilé -- sa fête-sed. Il aurait eu un règne pacifique, ce qui ne l'empêcha pas d'inaugurer la longue série des guerres que mèneront ses successeurs contre les Nubiens et les Libyens, les voisins du Sud et de l'Ouest, et de commercer, si l'on en croit la mention de bateaux en cèdre sur la Pierre de Palerme, avec la SyroPalestine. On voit que son règne est, au total, assez bien documenté. Il a dû se terminer aux environs de 3100 avant notre ère. Aha possède deux tombeaux : l'un à Saqqara, l'autre à Abydos. Sa succession ne s'est probablement pas passée sans problèmes. La liste de Turin laisse un blanc entre Meni et son successeur It(i), lui-même prédécesseur d'un autre It(i) que l'on assimile à l'Horus Djer. Ce flottement reflète-t-il une courte régence de la reine Neïthhotep, régence à l'issue de laquelle le trône serait allé au fils d'une concubine du roi ? Ces questions de filiation, bien difficiles à trancher étant donné la minceur de la documentation, se posent également pour les successeurs de Djer. Celui-ci aurait eu pour fille une reine Merneïth, « l'aimée de Neïth », dont on a retrouvé le tombeau dans la nécropole royale d'Abydos; on a déduit qu'elle a été l'épouse de son successeur, Ouadji, de ce que les documents de sa tombe la donnent pour mère de Den, le quatrième roi de la Ire dynastie. Le règne de Djer amplifie la politique extérieure du pays : expéditions en Nubie jusqu'à Ouadi Halfa, peut-être en Libye, et au Sinaï si l'on se fonde sur la présence dans sa tombe de bijoux en turquoise, pierre traditionnellement importée du Sinaï. Il poursuit également l'organisation du pays sur le plan économique et religieux, fonde le palais de Memphis et se fait inhumer à Abydos où il est peut-être le prototype historique d'Osiris. Il est enterré en compagnie de sa Cour -- ce qui ne veut pas dire pour autant que, comme on l'a longtemps pensé, les courtisans devaient suivre leur souverain dans la mort de façon violente (Kaplony, LÄ 1, 1111, n. 9) : il s'agit au contraire de la première attestation de l'assomption par le souverain du devenir funéraire de ses subordonnés, dont les tombes sont associées à la sienne comme elles le seront plus tard dans les grandes nécropoles royales. Autant que l'on puisse en juger d'après le mobilier funéraire de ses contemporains, comme celui provenant de la tombe du chancelier Hemaka à Saqqara, son époque a été brillante et prospère. Calendrier et datation Un document de son règne a remis en cause toute la datation de la Ire dynastie en soulevant la question du alendrier : il s'agit d'une plaquette d'ivoire ( fig. 14 ) sur laquelle on a pensé voir la représentation, sous forme d'une vache couchée portant entre les cornes une pousse de plante qui sert à désigner l'année, de la déesse Sothis, c'est-à-dire de l'étoile Sirius (Vandier : 1952, 842-843; Drioton & Vandier : 1962, 161). Ce simple signe, si cette interprétation est correcte, veut dire que les Égyptiens avaient fait le rapprochement dès le règne de Djer entre le lever héliaque de Sirius et le commencement de l'année donc qu'ils avaient inventé le calendrier solaire. Il est probable que, dans les premiers temps, ils utilisaient un calendrier lunaire, dont on a conservé de nombreuses traces. Puis le décalage entre ce comput et la réalité les a conduits à adopter un calendrier fondé sur le phénomène le plus facilement observable et le plus régulier qui s'offrait à eux : la crue du Nil. C'est ainsi qu'ils répartirent l'année en trois saisons de quatre mois de trente jours chacun correspondant au rythme agricole déterminé par la crue. La première est l'inondation (Akhet), la deuxième la germination et la

« quatre couples degrenouilles etde serpents quiassemblent leursforces pourcréer etdéposer unœuf surune butte émergeant horsdel'eau.

Cescouples sontchacun composés d'unélément etde saparèdre :Noun et Naunet, l'océanprimordial qu'Héliopolis intègre,commenousl'avons vu,dans sonpropre système, Hehet Hehet, l'eauquicherche savoie, Kekou etKeket, l'obscurité, et,enfin, Amon, ledieu caché etsa parèdre Amaunet.

Parlasuite, lorsque ledernier élément del'ogdoade, Amon,deviendra ledieu dynastique, leclergé thébain sechargera dereconstituer une«famille »au schéma plushumain, assurant, commecelled'Héliopolis, la transition entrelacréation etlerègne humain. Les systèmes héliopolitain ethermopolitain, ainsiquelesgrands mythes populaires commeceluid'Osiris, présentent deséléments tirésdusubstrat profonddelacivilisation, dontcertains ontdes résonances dansles civilisations africaines:Anubis rappelle lechacal incestueux aurôle prométhéen antérieurauxNommos chez les Dogons duMali, dontlacosmogonie reposeégalement surhuit dieux fondateurs.

Onpourrait, d'ailleurs, multiplier cetype derapprochements :Amon est,icicomme là,lebélier d'orcéleste, aufront orné decornes- crochet etd'une calebasse évoquantledisque solaire; Osirisrappelle leLébé, dontlarésurrection est annoncée parlarepousse dumil, tandis que,plusprofondément encoreetau-delà duverbe créateur, l'individu est composé d'uneâmeetd'une énergie vitale(Griaule :1966, 28-31; 113-120; 66;194 sq.), quelesÉgyptiens appelaient baetka... DuMythe àl'Histoire La troisième cosmogonie est,elle, beaucoup plusachevée d'unpoint devue théologique.

Nouslaconnaissons par undocument unique,tardifpuisqu'il datedurègne dusouverain kouchiteChabaka, àla charnière duVIIe et du VIe siècle avantnotreère:une grande dalledegranit provenant dutemple dePtah àMemphis etconservée au British Museum.

Elleseprésente commelacopie d'unancien papyrus «mangé auxvers »et combine les éléments desdeux précédentes toutenreconnaissant audieu local, Ptah, lerôle dudémiurge.

Onpourrait même direque cesont leséléments héliopolitains etosiriens quidominent, avectoutefois unerecherche très nette del'abstraction danslaformulation dumécanisme delacréation quisefait par l'exercice combinédela pensée etdu verbe. Ce texte datemanifestement del'Ancien Empire,périodeoùMemphis joualepremier rôlenational, etsans doute même delaVe dynastie, c'est-à-dire del'époque oùladoctrine héliopolitaine l'adéfinitivement emporté. C'est également delaVe dynastie quedate lepremier document connud'unautre type,dontlebut est, explicitement, derendre compte delacontinuité quilieles hommes auxdieux :la Pierre dePalerme. Elle appartient àla catégorie desannales, quinous sontparvenues enrelativement grandnombre sousla forme delistes royales agrémentées ounon decommentaires.

Laplus célèbre estl'œuvre deManéthon, un prêtre deSébennytos (aujourd'huiSamanoudsurlarive occidentale delabranche deDamiette dansleDelta) qui vivait àl'époque grecque, souslerègne desdeux premiers Ptolémées.

C'estluiqui adéterminé le découpage delachronologie historiqueentrente dynasties, depuisl'unification dupays parMénès, auquelona assimilé Narmer,jusqu'àlaconquête macédonienne.

SesAegyptiaca nenous sont,malheureusement, parvenues quedefaçon trèsfragmentaire àtravers desœuvres tardives (Helck:1956).

Leslistes antérieures datent presque toutesdel'époque ramesside.

Laplus importante estunpapyrus rédigésouslerègne de Ramsès IIconservé auMusée deTurin, surlequel Champollion futlepremier àtravailler, etqui porte uneliste organisée pardynasties allantdesorigines auNouvel Empire.

C'estsansdoute d'unelistedecetype quese sont inspirées les«tables »comme cellesdela«Chambre desAncêtres »de Karnak, aujourd'hui auLouvre, ou dutemple funéraire deSéthi Ier àAbydos, cellequel'onaretrouvée àSaqqara dansletombeau deTounroï, un contemporain deRamsès II,et d'autres demoindre ampleur(Grimal:1986, 597sq.). La Pierre dePalerme estune plaque depierre noirefragmentaire donnantlaliste desroisdepuis Aha,le premier souverain delaIre dynastie, etau moins jusqu'au troisième delaVe dynastie, Néferirkarê. Malheureusement, cedocument estincomplet etde provenance inconnue:il est entré auMusée dePalerme par legs en1877, et,depuis, sixnouveaux fragments sontapparus danslecommerce, quisont conservés maintenant auMusée duCaire etàl'University CollegedeLondres.

Onamis endoute leurauthenticité etleur appartenance mêmeàla Pierre dePalerme, etune vive controverse sedéveloppe àleur sujet depuis presque un siècle. Les fragments duCaire énumèrent desroisqui, audébut, portent alternativement lacouronne deHaute etde Basse-Égypte.

ManéthonetleCanon deTurin, présentent, eux,toutenconservant lastructure annalistique, une formulation cosmologique desorigines :l'intégration duMythe àl'Histoire sefait par lerecours àl'Âge d'Or, pendant lequellesdieux ontrégné surterre.

Leslistes royales reproduisent lesdonnées descosmogonies et plus particulièrement decelle deMemphis :au départ setrouve lefondateur, Ptah,dontlerôle esticiproche de celui deChnoum, lepotier quiacréé l'humanité surson tour, façonnant leréceptacle del'étincelle divinedans le matériau depuistoujours àla disposition del'homme :l'argile.

Rêluisuccède.

Soleilquicrée lavie en dissipant lesténèbres, ilest leprototype delaroyauté, qu'ilcédera àChou, l'air,séparateur delaTerre etdu Ciel.. »

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