Chateaubriand écrit à Fontanes, vers 1800 ; il lui expose ses plans d'avenir, l'état des esprits et les destinées qu'il entrevoit pour la littérature.
Publié le 10/07/2011
Extrait du document
Mon cher ami,
Votre lettre m'est venu trouver au fond de la Bretagne, dans ce vieux manoir de Combourg, où s'écoulèrent les journées de mon adolescence. Là, je partage mon temps entre la chasse et les mélancoliques rêveries. La vie a déversé sur moi tant d'amertumes que, parfois, je me sens l'âme d'un vieillard ; alors je voudrais m'ensevelir ici sous la bure du moine, et ne plus converser qu'avec Dieu.
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- Madame de Staël écrit on 1800 dans De la Littérature (Première Partie, chap. 11 ) : « Ce que l'homme a fait de plus grand, il le doit au sentiment douloureux de l'incomplet de sa destinée. Les esprits médiocres sont, en général, assez satisfaits de la vie commune: ils arrondissent, pour ainsi dire, leur existence, et suppléent a ce qui peut leur manquer encore par les illusions de la vanité: mais le sublime de l'esprit, des sentiments et des actions doit son essor au besoin d'échapper
- Madame de Staël écrit en 1800 dans De la Littérature (Première Partie, chap.11) : «Ce que l'homme a fait de plus grand, il le doit au sentiment douloureux de l'incomplet de sa destinée. Les esprits médiocres sont, en général, assez satisfaits de la vie commune ; ils arrondissent, pour ainsi dire, leur existence, et suppléent à ce qui peut leur manquer encore par les illusions de la vanité ; mais le sublime de l'esprit, des sentiments et des actions doit son essor au besoin d'échapper a
- Michelet écrit en 1855: "Nous avons évoqué l'histoire, et la voici partout; nous en sommes assiégés, étouffés, écrasés; nous marchons tout courbés sous ce bagage, nous ne respirons plus, n'inventons plus. Le passé tue l'avenir. D'où vient que l'art est mort (sauf de si rares exceptions) ? c'est que l'histoire l'a tué." Est-ce qu'au XIXe siècle l'histoire a tué ou renouvelé l'art et la littérature ?
- «Pour douer notre littérature d'une action efficace, il fallait trouver le secret de l'action sur les esprits : ce secret est la clarté. Comprenons ce mot : il faut évidemment le soustraire à des interprétations grossièrement faciles. Paul Valéry a insisté souvent sur le fait que de nombreuses gens la confondent avec leur propre paresse d'esprit. Il ne s'agit pas d'être compris par les distraits. La clarté de Racine n'est qu'une apparence ; je défie un lecteur moyen d'expliquer tout ce
- Fontanes, écrit Chateaubriand, « était ennemi juré des principes de la composition moderne : transporter sous les yeux du lecteur Faction matérielle, le crime besognant [c est-à-dire en action] ou le gibet avec sa corde lui paraissait des énormités; il prétendait qu'on ne devait jamais apercevoir l'objet que dans un milieu poétique, comme sous un globe de cristal ». Vous montrerez comment Fontanes opposait ainsi l'esprit classique à certains aspects de l'esprit romantique.