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Les critères de la vérité

Publié le 20/07/2004

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La réussite. Faire du succès pratique le critère de la vérité est une conséquence de l’anti-intellectualisme ou du pragmatisme, qui accorde à l’intelligence une fonction essentiellement pratique. William James (« L’idée de vérité » 1913) défendit ce point de vue.

1 — « Est vrai ce qui réussit ». Une image un peu facile illustre l’attitude pragmatiste : imaginez une passerelle sur un abîme ; le rationaliste qui voudrait savoir vraiment s’il peut passer, étudierait la passerelle, ses matériaux, leur résistance et calculerait la solution ; l’empiriste avancerait à pas prudents, ne jugeant que par l’expérience ; le pragmatiste s’installerait de ce côté-ci de la passerelle et attendrait que quelqu’un passât de l’autre côté, puisqu’il juge de la vérité par le succès.

Ce machiavélisme de la vérité est bien souvent le nôtre : le bon général est celui qui gagne les batailles, la véritable préparation au bac est celle qui assure la réussite... on devine que la chance, la fraude, la ruse reprennent tous les droits ; on ne doit plus se montrer difficile sur le choix des moyens, le succès final les justifiera et les validera.

Ces conséquences du pragmatisme sont, à dire vrai, assez éloignées de la pensée de William James. Pour lui, est vrai « ce qui est avantageux à peu près de n’importe quelle manière » (ce qui rejoindrait les conceptions sophistiques), mais il ajoute « est vrai ce qui nous donne la plus forte somme de satisfactions » ; cette précision remet bien des choses en place. La vérité est dans l’action et elle suscite une satisfaction. Sous cette forme, la réaction pragmatiste nous montre que la vérité n’est pas la fascination des mathématiques, elle est engagement dans l’action, et dans l’action utile. Si l’ambiguïté morale de la notion d’utilité permet des interprétations paradoxales, la pensée de James est non ambiguë : « la plus forte somme de satisfactions » implique la satisfaction de soi et la bonne conscience. L’échec est signe d'erreur parce qu’il signifie qu’on devait faire davantage. La thèse pragmatiste recommande finalement une insertion vigoureuse vers le futur, la joie de l’action efficace, c’est-à-dire qu’elle fait de la vérité une attitude de la volonté plus qu’une vision de l’intellect.

« pas y avoir d'intuition fausse, mais seulement de pseudo-intuitions ; de même la certitude est une pseudo-évidence.

Descartes écrit dans le «Discours de la Méthode" : "Je jugeai que je pouvais prendre pour r,ègle générale que les choses que nous concevons clairement et distinctement sont toutes vraies, mais qu'il y a seulement quelque difficulté à bien remarquer quelles sont celles que nous concevons distinctement.

• Cette dernière proposition précise bien la difficulté.

Nous prenons facilement nos images pour des idées, nos mobiles pour des raisons, nos croyances pour des vérités.

Par-dessus le marché, les influences, la confiance envers des Maîtres, la pression de ceux qui • font autorité "• l'assentiment collectif ...

contribuent à former en nous des certitudes auxquelles nous ne pouvons pratiquement pas résister.

Il est frappant de lire les débats à l'Académie des Sciences le jour où Pasteur présenta son exposé lumineux démontrant qu'il n'y avait pas de « génération spontanée "• que les vers ne naissent pas du fromage, que les souris ne naissent pas des fonds de sacs ni les têtards de la vase, ou plus exactement que les colonies microbiennes des bouillons de culture ne naissent pas du bouillon mais des germes apportés par l'air.

Voilà bien une idée qui nous semble aujourd'hui l'évidence même ; et pourtant Pasteur fut ridiculisé dans le discours du Directeur du Muséum, vénérable savant surchargé de titres, impressionnant d'autorité, porté par les croyances collectives, tonnant du haut de la Tribune au nom de l'évidence.

Le critère de la vérité n'est pas tant l'évidence, que l'effort par lequel 11n fait table rase des causes d'erreur, par lequel on dépiste les opinions et les croyances pour s'ouvrir à une vision renouvelée et pure du réel.

C'est la bonne foi et la sincérité de l'homme qui garan­ tissent la qualité de sa méthode et qui finissent par ébranler les convictions périmées ; c'est son humanité qui émeut, et non pas la clarté de ce qu'il dit.

- II - La conformité au réel.

Selon les scolastiques et la métaphysique traditionnelle, la vérité est « adœquatio rei et intel­ lectus "• c'est-à-dire l'accord de la pensée et de son objet.

Il faut trois conditions pour qu'il y ait vérité : une idée, un objet de pensée, la conformité de l'idée avec son objet.

On peut concevoir 3 modalités de cet accord : accord de l'objet avec l'idée qu'on s'en faisait (l'idée était vraie parce qu'elle se reconnaît dans l'objet) ; accord de la pensée avec l'objet (opinion qui se vérifie) ; accord de la pensée avec elle-même (vérité formelle, vérité d'un raisonnement mathématique).

- Dans cette conception, la vérité se ramène ou à la réalité ou à la logique d'un raisonnement.

Dans les deux cas, elle implique une maîtrise de l'imagination et des croyances, un effort de méthode, un souci de se transcender et là encore c'est dans cet effort qu'il faut. »

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