Devoir de Philosophie

LA LITTÉRATURE MILITANTE

Publié le 02/06/2012

Extrait du document

Cet homme inébranlable au milieu des factions, qui ne cherchait pas le nom de bonhomme, sachant ètre ferme à ses propres risques, et que les grands soucis ne détournaient pas des petits devoirs, eut le culte et la passion des lettres : il se consola de sa disgrâce en faisant des vers latins. Aussi son éloquence est-elle parfois encombrée d'érudition. L'Hôpital ne se fait pas faute de citer à la flle dans le mème discours Philippe, Démétrius, Louis XII, Théopompe, Galba, et bien d'autres: cela passait pour gentillesse dans le monde lettré du Palais. Mais, heureusement, il avait une éloquence de tous les jours, qui vaut mieux. Il a la phrase un peu lente et pesante, mais traversée de brusques éclairs, et parfois ramassée en fortes sentences. Dans ses visites aux Parlements, sa parole est familière, pittoresque, haussée par l'intérieure élévation de la pensée, échauffée soudain de passion spontanée, et redescendant sans heurt à l'aisance d'une grave causerie...

« calomnies des prédicans, I'lnstUution pour l'adol~scence du roi Charles IX, debordent tantôt d'indignation patriotique, tantôt de passion catholique, et tantôt de .dignité blessée : quaud Ronsard .

montre rhéritage de tant de générations, de tant de vaillants hommes et de grands rois, follement perdu par les furieuses discordes de ses contemporains, quand il oppose le néant de l'homme à l'énormité prodigieuse de ses passions, quand il donne aux peuples, aux huguenots, au roi des leçons de bqnne vie, quand enfin il dépeint fieremeut son humeur, ses goûts, ses actes, alors il est vraiment un grand poète.

Il enseigne à la poésie que le monde et la vie lui appartiennent, ct que des plus familieres comme des attristantes réalités elle peut sortir en ses plus belles formes.

La leçon ne fut pas perdue.

C'était un disciple de Ronsard que ce capitaine huguenot qui, dans les loisirs forcés d'une blessure lente à guérir 1 , mettait au service de ses irréconciliables haines une science des vers formée par les exemples de la Pléiade et par la pratique de la poésie mignarde et galante.

Les T1Ytgiques de D'Au­ bigné ne .verront le jour qu'att xv11• siècle, et nous les retrouverons au temps où le rude partisan se sera fait décidément homme de plume .

: mais il faut bien noter ici que ce chef-d'œuvre de la satire lyrique est né des guerres civiles, conçu dans le feu des combats, sous l'impression actuelle des vengeances réciproques; même une partie du poème s'est-fait « la botte en jambe », à cheval, ou dans les tranchées; c'était un soulagement pour cette âme forcenée d'épancher dans ses vers le tr·op-plein de ses fureurs, qui ne s'épuisaient pas sur l'ennemi.

_ Tandis que D'Aubigné attendait maladroitement l'apaisement universel pour publier ses vers enragés, Du Bartas 2 se faisait reconnaître pour un grand poète protestant.

Sa gloire inquiéta Ron­ sard, d'autant que l'esprit de parti se plut à exalter l'auteur des Semaines aux dépens de l'auteur des Discours.

Oubliée en France et dans lM pays catholiques/l'œuvre de Du Bartas resta populaire en pays protestant : de Milton à Byron, elle a laissé des traces dans la poésie anglaise, et Gœthe en a parlé en termes enthou- 1.

Blessé en 1577 à Casteljaloux, D'Aubigné "traça comme pot.r testament cet ouvrage, lequel encore quelques ànnées après il a pu polir et emplir ».

Preface des Tragiques.

- Sur l'œuvre et l'auteur, cf.

p.

363-367.

· 2.

Guillaume de Salluste, sieur du Bartas (1544-1590), était fils d'un marchand de Montfort en Fezenzaguet, nommé Salustre.

Il remplit plusieurs missions (?OUr le roi de Navarre en Angleterre, en Écosse et eu Danemark.

Il a tiré de Viret (Instruction chrétienne) une bonne partie de la science qui s'étale dans les Semaines.

Éditions :[-a Première Semaine, 1579.

Œuvres, 2 vol.

in-fol., 1611.- A consulter: G.Pellissier, la Vie et les Œuvres de Du B., 1882, in-8.

S.

du Bartas, Choix de Poésies, par O.

do Gourcuff et P.

Bénétrix (avec une Letlre de M.

Parfouru, archiviste du Gers, ilBportante pour la biographie du poète).

Sainte-Beuve, ouvr.

cité.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles