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Appréciez ce mot de Renan (« L'Avenir de la science ») : « Toute pensée est une analyse entre deux synthèses » ?

Publié le 24/06/2009

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Position de la question. Au § XVI de L'Avenir de la science (éd. Calmann-Lévy, p. 301), RENAN distingue trois âges de la pensée humaine qui, dit-il, correspondent aux trois étapes successives de la connaissance chez l'individu : « De même que le fait le plus simple de la connaissance humaine s'appliquant à un objet complexe se compose de trois actes : 1° vue générale et confuse du tout ; 2° vue distincte et analytique des parties ; 3° recomposition synthétique du tout avec la connaissance que l'on a des parties ; de même l'esprit humain, dans sa marche, traverse trois états qu'on peut désigner sous les trois noms de syncrétisme, d'analyse, de synthèse et qui correspondent à ces trois phases de la connaissance. « Laissant de côté cette extrapolation, nous nous appliquerons à montrer que le processus de la connaissance indiqué dans la première partie de la phrase est bien celui que parcourt l'esprit de l'individu lorsqu'il cherche à connaître un objet quel qu'il soit.

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« effet, d'insister sur cette idée que l'induction, en tant qu'elle ramène les faits concrets et complexes à desconcepts.

bien définis et relativement simples, est une analyse.

C'est pourquoi LIARD caractérisait le « passage desfaits à la loi » comme « une réduction du complexe au simple » et Jean PERRIN avait assigné pour but à la science d'« expliquer du visible compliqué par de l'invisible simple ».

Il y a d'ailleurs bien des degrés dans l'analyse : celle-cin'atteint pas d'emblée les éléments les plus simples, les éléments ultimes (qu'on songe aux étapes successives del'analyse chimique : les « quatre éléments » ; puis les « corps simples » ; ceux-ci à leur tour décomposés enmolécules et en atomes ; l'atome à son tour en corpuscules élémentaires et en noyau ; le noyau à son tour, etc.)et il arrive qu'on s'aperçoive, à l'expérience, que les faits sont moins simples qu'on ne l'avait cru d'abord, à, tel pointque BACHELARD dénonce « le brevet de simplicité » qu'on accorde à leurs composants comme étant souvent uneillusion.

Il arrive, dans des sciences très complexes comme la Psychologie, qu'une analyse maladroite aboutisse àdes résultats tout artificiels.La psychologie, de son côté, nous montre que l'analyse correspond, dans notre esprit, à une fonction dedissociation qui brise le bloc de l'expérience brute et qui est la condition de l'aperception des rapports.

C'est cettefonction qui nous libère du syncrétisme primitif.

C'est elle aussi qui permet à l'invention de dépasser le stade del'intuition confuse dont il a été question ci-dessus. III.

La synthèse. La synthèse pourrait se définir par la troisième règle énoncée par DESCARTES dans le Discours de la Méthode : «conduire par ordre mes pensées en commençant par les objets les plus simples et les plus aisés à connaître pourmonter peu à peu et comme par degrés jusques à la connaissance des plus composés ».

Elle est en effet le procédéqui consiste à recomposer le tout à l'aide des éléments distingués par l'analyse.

Ainsi, « l'analyse est la conditionnécessaire de la synthèse véritable » (RENAN).

Il serait tout à fait impropre de donner le nom de synthèse — commele fait la formule proposée — à la phase de syncrétisme primitive.

Car, tandis que celle-ci ne nous donne qu'une vueconfuse, la synthèse nous fournit une notion claire et distincte de l'ensemble puisqu'elle est fondée sur laconnaissance des éléments et des relations qu'ils soutiennent entre eux.

Elle nous permet ainsi de comprendre ceque le syncrétisme se bornait à nous donner : en un mot, elle est explicative.

Je comprends le fonctionnement d'unemachine lorsque je recompose son ensemble à l'aide des différents organes qui la constituent et du rôle que jouechacun d'eux dans cet ensemble.

J'ai une notion claire d'une période historique lorsque, connaissant les différentsaspects de la vie sociale pendant cette période, les différents courants qui y ont agi, je replace ces aspects et cescourants dans l'ensemble, je saisis leurs relations mutuelles et, par ce moyen, ce qui donne à cette période saphysionomie propre.

Je comprends une doctrine philosophique lorsque je m'élève à ce point de vue central quiconstitue, comme dit BErgson, « l'âme » de la doctrine et d'où les théories particulières apparaissent comme descorollaires ou plutôt comme des émanations, des irradiations de cette perspective unique.L'histoire des sciences nous offre bien des exemples de ce travail de synthèse.

La règle de Descartes décrit trèsexactement le travail de la démonstration constructive, par exemple en Géométrie, lorsqu'elle « monte peu à peu »des principes simples : définitions, postulats, etc., jusqu'à des théorèmes de plus en plus complexes.

Les Sciencesexpérimentales, lorsque l'analyse y fut suffisamment avancée, ont édifié ces vastes synthèses qu'on appelle lesthéories.

La psychologie nous montre que cette troisième phase de la connaissance relève d'une activité desynthèse, comme l'a appelée Pierre Janet, qui a comme condition préalable la fonction de dissociation et qui est à labase des formes les plus hautes de la vie mentale : invention, jugement, raisonnement, etc. Conclusion. Il est donc bien vrai que la pensée suit, dans l'acte de la connaissance, le rythme ternaire indiqué dans la formule proposée.

Mais il est inexact de qualifier de synthèse le premier temps.

La « synthèse véritable », commedit Renan, suppose l'analyse préalable, et c'est pourquoi d'ailleurs il n'y a pas lieu d'opposer ces deux procédés del'esprit, qui sont complémentaires.. »

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