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Avez-vous éprouvé le sentiment d'être libre ? Avez-vous éprouvé le sentiment de ne pas être libre ? En quoi consistent ces sentiments et quelle valeur leur attribuez-vous ?

Publié le 23/03/2004

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L'échec est dynamogénique. La liberté pure est inertie. Ainsi l'échec manifeste-t-il un pouvoir infini, il regorge de « volonté de puissance », de désir de mieux faire, d'élan vers le progrès. La liberté est comme un don que l'on a obtenu, une grâce que l'on possède fugitivement. Et sa possession est le commencement même de sa perdition. C) Il reste que Léonard n'était jamais conscient d'avoir bien fait, tandis que Paul Bourget était enchanté de son oeuvre. Mais le sentiment de son libre arbitre n'est au fond guère plus sûr que la conscience de l'échec. Le refus trompe. Les limites affolent. L'angoisse étreint le coeur du recalé, et plus encore du quasi-évincé.

« on m'impose d'entrer comme aide-comptable aux établissements Duchemin et Cie.

Je pourrais me révolter(L'Homme révolté doit être une de vos lectures favorites !) — protester, discuter — mais non : je me laissefaire.

Je cède à la volonté d'autrui.

J'aliène ma liberté.

Je suis dans une attitude absolument passive.C) Eh bien, précisément, il n'y a point de contrainte dans la passivité : la volonté, l'aboulie, l'apathie sont desétats privatifs, ou plutôt négatifs.

Ils ne veulent rien dire, ils ne sont rien.Et pour Malebranche, penser à rien, c'est proprement ne rien penser.

Lorsque je me laisse glisser vers unedécision prise par un autre, lorsque je me décide par autosuggestion, il n'y a pas véritablement le sentiment den'être pas libre.

Il y aurait plutôt carence de sentiment ; absence totale du moindre sentiment.

En revanchedans le sentiment que j'éprouve à tenter de peindre, et dans l'insuccès complet de mon entreprise, je ressenscette sorte d'obligation qui est à l'origine de la non-liberté.

Je suis lié.

Je suis coincé par l'échec.

J'essaye defaire mieux, et je fais pire : mon esquisse est devenue lavasse, mon aquarelle est une mare boueuse, ma «croûte » est devenue « je ne sais quoi d'informe et qui n'a pas de nom ».

Ici il y a vraiment limite de ma liberté. TROISIÈME PARTIE : VALEUR A) Il est d'une banalité évidente de dire que la conscience de la liberté est ce qui caractérise l'homme même, leSage, le Héros et le Saint ; ces « consciences qui comptent » pour parler comme Rauh — sont en effet ceuxqui ont le plus souvent éprouvé le sentiment d'être libres.

La création ne saurait donc se faire sans cetteconscience de la pleine responsabilité de ses actes.

M.

Sartre a insisté avec force sur cette attitude : l'hommese sent absolument libre, mais aussi seul, responsable, « injustifiable et sans excuse ».

L'homme libre agit avecle maximum de densité de son être.

Bergson le disait déjà et Platon avant lui : « xun holê té psykë », avecl'âme tout entière, Plus l'acte est libre, plus sa valeur est grande.

L'acte libre est comme la libération de ce moiprofond qui n'agira qu'une ou deux fois peut-être dans toute une vie ; ainsi Plotin avouait-il n'avoir vu que deuxou trois fois l'UN, et Porphyre nous conte-t-il qu'il avait eu l'extase mystique une seule fois.

De même pourSpinoza : « Omnia praeclara tam difficilia quam rara sunt » (Éthique V, in fine).B) Mais le sentiment de la contrainte est beaucoup plus enrichissant encore que celui de la liberté.

Car sentirses limites, c'est vraiment progresser.

La conscience de l'échec peut être un breuvage amer mais tonique pourla conscience, sentir l'obstacle c'est déjà commencer à le surmonter.

La conscience de l'échec pour l'échec, lemasochisme du névrosé, la mauvaise foi du perpétuel vaincu sont autant de tentatives infructueuses oustériles.

Mais les essais et les erreurs peuvent donner à l'homme le désir du progrès.

Se sentir dépassé, c'estvouloir surpasser.

Se laisser limiter, c'est vouloir l'emporter sur le vainqueur provisoire.

La contemplation de saliberté créatrice ne laisse pas de manifester une morne passivité.

L'homme arrivé n'est jamais très sûr d'êtredéjà parti.

Il croit le plus souvent qu'il n'est encore pas mûr.

Tandis que l'homme libre se complaît dans saliberté déjà perdue, l'homme enchaîné aspire à la liberté et se force à l'attention.

L'échec est dynamogénique.La liberté pure est inertie.

Ainsi l'échec manifeste-t-il un pouvoir infini, il regorge de « volonté de puissance »,de désir de mieux faire, d'élan vers le progrès.

La liberté est comme un don que l'on a obtenu, une grâce quel'on possède fugitivement.

Et sa possession est le commencement même de sa perdition.C) Il reste que Léonard n'était jamais conscient d'avoir bien fait, tandis que Paul Bourget était enchanté de sonoeuvre.

Mais le sentiment de son libre arbitre n'est au fond guère plus sûr que la conscience de l'échec.

Lerefus trompe.

Les limites affolent.

L'angoisse étreint le coeur du recalé, et plus encore du quasi-évincé.

Nesommes-nous point, d'ailleurs, tous candidats à des échecs éventuels, à des refus, à des insuccès futurs ? Ladéception aigrit, si la contrainte enivre.

Sans doute le contraint est-il surexcité, et le libéré plus exalté encore: mais l'ivresse est ambiguë, et l'on ne peut jamais compter pleinement sur elle.Ce qui semble le sentiment le plus valable, ce sera moins le sentiment d'avoir été ou d'être libre dansl'immédiat, dans l'instant présent, mais bien plutôt la conscience de le devoir être.

Le participe futur latin rendexcellemment cette nuance « destiné à », « sur le point de » car il faudrait toujours pouvoir agir en étant sûrque l'action nous engagera tout entier, qu'elle sera la plus réussie de notre existence.

Alors, mais alorsseulement, la conscience de la liberté sera fructueuse et utilisable.

Mais le sentiment sera moins alors le sensdu réel, du présent, du donné, que celui du possible, du futur contingent, du potentiel.

N'avions-nous pointdéjà dit que la liberté était une conquête ? CONCLUSION. - La valeur du sentiment de la liberté nous paraît donc résulter essentiellement de la responsabilité que nous lui attribuons.

Il faut en effet se sentir responsable pour que la liberté ait un sens.

Ellen'en a point dans la perspective du jeu, de l'acte gratuit gidien ou du geste stérile.Elle ne peut prendre un sens que dans une perspective morale.

Aussi l'expérience de la liberté est-elle déjà uneprofession de foi.

Là ou il y a liberté, il ne saurait y avoir immoralité.. »

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