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Blaise PASCAL: Cette superbe puissance, ennemie de la raison

Publié le 01/04/2005

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pascal
Cette superbe puissance, ennemie de la raison, qui se plaît à la contrôler et à la dominer, pour montrer combien elle peut en toutes choses a établi en l'homme une seconde nature. Elle a ses heureux, ses malheureux, ses sains, ses malades, ses riches, ses pauvres. Elle fait croire, douter, nier la raison. Elle suspend les sens, elle les fait sentir. Elle a ses fous et ses sages. Et rien ne nous dépite davantage que de voir qu'elle remplit ses hôtes d'une satisfaction autrement pleine et entière que la raison. [...] Qui dispense la réputation, qui donne le respect et la vénération aux personnes, aux ouvrages, aux lois, aux grands, sinon cette faculté imaginante ? Toutes les richesses de la terre sont insuffisantes sans son consentement. Ne diriez-vous pas que ce magistrat dont la vieillesse vénérable impose le respect à tout un peuple se gouverne par une raison pure et sublime, et qu'il juge des choses par leur nature sans s'arrêter à ces vaines circonstances qui ne frappent que l'imagination des faibles ? Voyez-le entrer dans un sermon, où il apporte un zèle tout dévot, renforçant la solidité de sa raison par l'ardeur de sa charité ; le voilà prêt à l'ouïr avec un respect exemplaire. Que le prédicateur vienne à paraître, si la nature lui a donné une voix enrouée et un tour de visage bizarre, que son barbier l'ait mal rasé, si le hasard l'a encore barbouillé de surcroît, quelques grandes vérités qu'il annonce, je parie la perte de la gravité de notre sénateur. Le plus grand philosophe du monde sur une planche plus large qu'il ne faut, s'il y a au-dessous un précipice, quoique sa raison le convainque de sa sûreté, son imagination prévaudra. Plusieurs n'en sauraient soutenir la pensée sans pâlir et suer. [...] L'homme a bien eu raison d'allier ces deux puissances, quoique dans cette paix l'imagination ait bien amplement l'avantage, car dans la guerre elle l'a bien plus entier. Jamais la raison ne surmonte totalement l'imagination, mais le contraire est ordinaire. Blaise PASCAL

Dans ces quelques lignes extraites des célèbres Pensées  de Pascal, notre auteur s'attache à « définir « l'imagination et à montrer l'étendue de son pouvoir. Mais « définir « est encore un terme ici inapproprié car  il se réfère au vocabulaire de la démonstration, au domaine de la raison.  Aussi, Pascal utilise-t-il davantage les métaphores et les exemples : il serait invraisemblable, en effet, de nous persuader de la toute-puissance de l'imagination et de l'aborder rationnellement.  Dans ses Méditations Métaphysiques, Descartes rappelait la conception classique de l'imagination et son caractère inférieur par rapport à la raison. A l'occasion de l'observation du morceau de cire, il cherchait à savoir ce qui nous permettait de reconnaître la même cire malgré ses modifications sensibles. Or, l'imagination se trouvait limitée quand il s'agissait de répertorier toutes les différentes perceptions que nous pourrions avoir de la cire. A l'inverse, la raison, qui nous permet de concevoir la cire, nous donne un objet stable : nous pouvons ainsi reconnaitre la cire quelque soient les formes qu'elle pourra prendre. L'imagination ne pouvait nous donner  accès à une connaissance. Mais en est-il véritablement ainsi? Si le statut ontologique de l'imagination peut bien être inférieur à celui de la raison, qu'en est-il de l'emploi quotidien de l'imagination et du pouvoir qu'elle exerce? Le monde des apparences, dit trompeur, n'est-il pas le monde dans lequel nous sommes jetés? Aussi, il est normal que nous nous référions le plus souvent à ce qui nous est montré, à ce qui nous paraît familier, pour nous trouver des repères. Il s'agit donc ici de mettre en avant le pouvoir de l'imagination en montrant son omniprésence et sa raison d'être, afin d 'en arriver à un discours sensé et raisonnable sur sa nature.

pascal

« métaphores et les exemples : il serait invraisemblable, en effet, de nous persuader de la toute-puissance del'imagination et de l'aborder rationnellement.

Dans ses Méditations Métaphysique s, Descartes rappelait la conception classique de l'imagination et son caractère inférieur par rapport à la raison.

A l'occasion de l'observationdu morceau de cire, il cherchait à savoir ce qui nous permettait de reconnaître la même cire malgré sesmodifications sensibles.

Or, l'imagination se trouvait limitée quand il s'agissait de répertorier toutes les différentesperceptions que nous pourrions avoir de la cire.

A l'inverse, la raison, qui nous permet de concevoir la cire, nousdonne un objet stable : nous pouvons ainsi reconnaitre la cire quelque soient les formes qu'elle pourra prendre.L'imagination ne pouvait nous donner accès à une connaissance.

Mais en est-il véritablement ainsi? Si le statutontologique de l'imagination peut bien être inférieur à celui de la raison, qu'en est-il de l'emploi quotidien del'imagination et du pouvoir qu'elle exerce? Le monde des apparences, dit trompeur, n'est-il pas le monde dans lequelnous sommes jetés? Aussi, il est normal que nous nous référions le plus souvent à ce qui nous est montré, à ce quinous paraît familier, pour nous trouver des repères.

Il s'agit donc ici de mettre en avant le pouvoir de l'imaginationen montrant son omniprésence et sa raison d'être, afin d 'en arriver à un discours sensé et raisonnable sur sanature. I/ L'imagination surpasse la raison (Début....

»satisfaction autrement pleine et entière que la raison ») Pascal se détache assez vite de la conception classique de l' imagination, même si elle conserve à sesyeux un aspect trompeur.

Si l'imagination est « superbe », si elle contrôle et domine la raison, en effet, celanécessite que l'imagination dépasse entièrement la raison, d'une part, et, d'autre part, qu'elle lui indique la directionà prendre.

Que l'on songe ici aux hypothèses scientifiques par exemple.

Galilée devait bien imaginer qu'il existait uneloi rendant compte de la chute des corps pour mettre en place ses expériences et parvenir à démontrer ce qu'iln'avait d'abord qu'imaginé.

L'imagination, loin d'être ici ce qui caractérise les fous ou les rêveurs, est ainsi unequalité des plus utiles et côtoie la sagesse.

Elle n'est donc pas une puissance inférieure à la raison : elle surpasseinfiniment la raison par sa puissance. Comment caractériser cependant ce terme d' « ennemie de la raison »? L'opposition est ici classique.

L'imaginationne donnerait lieu qu'à des rêves, des délires, alors que la raison nous permettrait d'acquérir une sagesse et unecompréhension des événements.

De la même façon que les Grecs prétendaient accéder au bonheur par la raison,l'imagination rendrait malheureux ceux qui s'y fieraient puisqu'elle les condamnerait à l'ignorance.

En est-il pourautant uniquement ainsi? Pascal explique que l'imagination établit en nous une « seconde nature ».

Pour Pascal, lanature de l'homme est d'être un néant, une créature finie qui est jetée entre deux infinis.

Il peut bien espérer apercevoir par les sciences la présence de ces infinis (l'infiniment petit et l'infiniment grand) , mais il ne peut enaucun cas espérer pouvoir les contrôler par la raison, qui elle,est la qualité des êtres finis que nous sommes.

Eneffet, même les plus rigoureuses démonstrations s'appuient sur des principes premiers...qui, eux, ne peuvent êtredémontrés.

Ainsi, les hommes, qui en eux-mêmes et par eux-mêmes ne sont rien, essayent d'être quelque chosevis-à vis des autres hommes en misant tout sur l' apparence .

Nous avons donc l'habitude d'employer l'imagination pour juger de ce qu'est quelqu'un ou quelque chose d'après les apparences.

L'imagination est alors un pouvoir bienplus couramment employé que la raison.

Imaginons par exemple quelqu'un qui veut se faire passer pour riche : ilconsacrera toutes ses activités à l'économie d'une part, et 'autre part, il affichera sa richesse sur ses vêtements,sa voiture, sa demeure et autres biens.

Et tout le monde jugera de sa richesse en fonction du faste qu'il auradéployé.

L'imagination est donc puissante en ce qu'elle guide et oriente nos jugements.

La place sociale que nousacquérons dépend également de l'effet que nous provoquons sur l'imagination des autres et de la façon dont nousnous imaginons nous-mêmes dans notre apparat. Pascal use d'ailleurs de sa superbe rhétorique (et de son effet sur l'imagination) pour parler avec raison decette faculté et mettre en valeur sa toute-puissance.

« Elle fait croire, douter, nier la raison.

» Notez que lacroyance et le doute sont deux résultats contraires.

Lorsque nous croyons quelque chose, nous ne le remettonsplus en doute.

Or, c'est la même faculté, l'imagination, qui produit ces deux effets opposés.

Elle produit en nous laconviction, la certitude (par les effets rhétoriques ou la persuasion) comme l'incertitude.

(la peur par exemple).

Celaau point même d 'en arriver à nier les certitudes que la raison pourrait fournir (essayez donc de convaincre unearachnophobe qu'une araignée ne va pas la dévorer...) Même les sens, qui paraissent nous donner accès au réeldépendent d'elle.

L'imagination peut très bien remettre en question ce qu'ils nous montrent (douter des sens, c'estd'abord imaginer qu'ils nous trompent) ou infléchir leur perception (nous ne percevrons pas un chien de la mêmefaçon s'il nous effraie ou nous semble affectueux).

De même, l'artiste comme le fou font preuve d'imagination.

Ladifférence est dans le fait qu'elle a un effet créateur pour l'un alors que l'autre est complètement enfermé dans sesvisions.

Pascal en arrive enfin à conclure que l'imagination a le pouvoir de rendre heureux, alors que la raison rendmalheureux.

Que faut-il comprendre ici? Il rappelle ici que les personnes qui s'imaginent heureuses ont le pouvoir dele devenir, alors que ceux qui essayent de se gouverner par la raison, et qui voient combien son influence est faiblesur les hommes, n'en sont que plus tristes.

La hardiesse, la joie, l'audace de ceux qui s'imaginent des maîtres permetà ces hommes d'être reconnus comme tels par les autres, parce que, de fait, ils apparaissent comme tels, bien qu'ilsne le soient pas nécessairement.

Les gens de raison, qui connaissent la tromperie des apparences et qui se plaisentà ne pas les suivre sont à l'inverse considérés comme originaux, rêveurs, quand bien même ils « ont raison.

». »

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