Comment penser la condition humaine ?
Publié le 30/08/2014
Extrait du document
Il y a [...] deux vues classiques. L'une consiste à traiter l'homme comme le résultat des influences physiques, physiologiques et sociologiques qui le détermineraient du dehors et feraient de lui une chose entre les choses. L'autre consiste à reconnaître dans l'homme, en tant qu'il est esprit et construit la représentation des causes mêmes qui sont censées agir sur lui, une liberté acosmique'. D'un côté l'homme est une partie du monde, de l'autre il est conscience constituante du monde. Aucune de ces deux vues n'est satisfaisante. À la première on opposera toujours [...] que, si l'homme était une chose entre les choses, il ne saurait en connaître aucune puisqu'il serait, comme cette chaise ou comme cette table, enfermé dans ses limites, présent en un certain lieu de l'espace et donc incapable de se les représenter tous. Il faut lui reconnaître une manière d'être très particulière, l'être intentionnel, qui consiste à viser toutes choses et à ne demeurer dans aucune. Mais si l'on voulait conclure de là que, par notre fond, nous sommes esprit absolu, on rendrait incompréhensibles nos attaches corporelles et sociales, notre insertion dans le monde, on renoncerait à penser la condition humaine.
MERLEAU-PONTY.
1. Liberté acosmique : qui ne dépend pas de « notre insertion dans le monde «.
Kant signalait qu'une colombe s'illusionnerait en pensant qu'elle volerait plus aisément sans avoir à vaincre la résistance de l'air. Il montrait aussi qu'il y a dans l'homme deux « caractères « : l'un, « empirique «, où s'additionnent les déterminations subies, l'autre, « rationnel «, dans lequel c'est au contraire la libre raison qui élabore ses lois. Ce que suggère ici Merleau-Ponty, c'est que ces lois elles-mêmes sont, au moins partiellement, liées à la façon dont toute situation les rend possibles. Penser la condition humaine demande ainsi l'abandon de tout dualisme, et nécessite la constitution d'une pensée moniste et dialectique, qui commence par concevoir que, dans l'homme, il n'y a de conscience qu'incarnée, ou de corps que déjà spiritualisé.
«
Plan
Introduction
1.- L'homme comme« partie du monde»
II.
-L'homme comme « conscience constituante du monde »
III.
-Comment penser la condition humaine ?
Conclusion
CORRIGÉ
[Introduction]
Comment penser l'homme dans le monde? Le problème n'est pas
récent, il traverse même l'histoire de la philosophie dans son ensemble.
Merleau-Ponty propose dans ce texte de résumer les différentes concep
tions qui ont pu être formées en deux tendances principales : d'une part
on peut saisir l'homme comme une
« chose entre les choses », en insistant
sur l'ensemble des déterminismes qui pèsent sur son existence ; de l'autre
on peut au contraire souligner la spécificité de sa conscience, et la dis
tance qu'elle autorise relativement
au monde.
Mais Merleau-Ponty montre
également que, dans les deux cas, on aboutit
à une version incomplète ou
tronquée de la situation humaine.
[1 -L'homme comme « partie du monde »]
Si l'on insiste sur tout ce qui peut influencer(= déterminer) l'existence
de l'homme, on en fait une chose parmi les choses.
Quelles peuvent être
ces influences? Elles sont d'ordre physique (je subis les besoins de mon
corps, mais aussi les conditions atmosphériques, les obstacles naturels
peuvent empêcher mon action, etc.), physiologique (ma force ou mes fai
blesses corporelles conditionnent dans une large mesure mon comporte
ment, on peut même signaler que ce dernier est, d'après certains théori
ciens, largement soumis
à une hérédité) ou encore sociologique (mes
goûts, ma pensée, ma mentalité sont en grande partie, totalement selon
certains, liés au groupe social auquel j'appartiens -et ce jusque dans le
domaine des goûts artistiques, si
l'on en croit Pierre Bourdieu dans La
Distinction).
De ce point de vue, l'homme serait comparable, non seulement à l'ani
mal, mais bien
à tout élément naturel, qui se trouve entièrement soumis à
des lois strictes définissant sa façon d'être.
Il serait bien «chose entre les
choses», impossible à distinguer de ce qui n'est pas lui, doté d'un mode
d'existence de même niveau
qu'un objet ou une chose naturelle..
»
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