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Corrigé Alain "Dans le sommeil je suis tout..."

Publié le 16/05/2023

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« Proposition de corrigé : Alain, Manuscrits inédits, 1928 1.

Ligne 1, Alain distingue deux modes d’existence du sujet : l’existence inconsciente dans le sommeil et l’existence consciente à l’état de veille.

Si « je suis tout dans le sommeil » c’est peut-être au sens où je suis à la fois moi et le monde.

En effet, dans un sommeil sans rêve, ma conscience est comme suspendue.

Aussi, dans ce cas, je n’existe que comme totalité indivise puisqu’aucun effort d’attention me permet de me séparer du reste du monde.

« Je suis tout », c’est-à-dire que j’existe comme une totalité indistincte, sans exister spécifiquement pour moi : je n’existe que sur le mode de l’en soi.

Dans le sommeil ma conscience n’exerce pas cette « réflexion » (l.1) qui consiste à revenir sur soi, à se penser, activité que l’on nomme introspection.

Réfléchir signifie à la fois faire un effort de distinction (ici se distinguer du monde comme totalité qui n’est pas moi) mais aussi refléter, c’est-à-dire mettre à distance ce que je suis pour me représenter moi-même par la pensée.

Cette mise à distance de soi-même par la réflexion est bien une forme de « division » (l.1) puisque la prise de conscience de soi-même produit un dédoublement de soi : je ne suis plus simplement un sujet, je suis un sujet pour moi, je suis donc un sujet devenu objet de pensée pour lui-même. Je ne suis plus une fois en soi mais deux fois : comme sujet et comme objet de pensée. 2.

Affirmer que « la conscience n’est pas immédiate » c’est dire que la conscience (et particulièrement la conscience de soi) n’est pas directe et qu’elle nécessite une médiation, un intermédiaire.

Cela signifie que je n’accède au moi qu’à travers des actes de pensée qui sont comme des manifestations de mon existence.

C’était déjà l’intuition de David Hume dans Traité de la nature humaine où il affirmait qu’il n’accédait à son moi qu’à travers des perceptions, sans jamais l’isoler complètement de ces perceptions.

Comment pourrais-je prendre conscience de moi si ce moi ne laissait aucune trace de ses activités, comme des pensées, ou s’il ne subissait certains phénomènes comme la sensation ou le sentiment ? Je ne peux me penser comme sujet pensant qu’à travers mes pensées, et je ne peux me penser comme sujet qu’à travers des sensations, des sentiments ou des idées.

Ainsi par exemple, quand j’entre dans l’eau glacée d’une rivière et que j’éprouve une sensation de froid, je parviens à prendre conscience de mon corps comme étant affecté par cette sensation de froid, et je peux désormais me penser comme étant affecté par un objet du monde.

On le voit ici, la sensation est l’intermédiaire par lequel je peux prendre conscience de moi et me distinguer de ce qui n’est pas moi.

Par la médiation de la sensation, je me « divise » comme sujet (qui se pense éprouvant le froid) et objet (qui éprouve le froid).

Donc, l’exercice de la pensée, l’expérience de la sensation et celle du sentiment sont les intermédiaires qui me permettent de prendre conscience de moi puisqu’ils sont l’occasion d’une réflexion et ainsi d’une prise de conscience de moi-même. 3.

Douter, c’est être dans l’incapacité définitive ou seulement momentanée d’affirmer ou de nier une proposition, de reconnaître l’existence de quelque chose.

Alors, de quoi doit douter le moi pour demeurer vivant ? En affirmant que « ce pouvoir de douter […] est la vie du moi », Alain fait un bilan des remarques précédentes.

Il faut comprendre alors que c’est le doute qui est l’essence de la réflexion et qui rend a pensée capable de distinctions, de divisions, et ainsi de définir le moi. En effet, seule une pensée qui doute est une pensée qui s’exerce : une pensée qui croit détenir la vérité cesse de penser.

Alors si le doute est la vitalité du moi qui se pense luimême, on peut soulever l’hypothèse que c’est de lui-même que le moi doit douter pour pouvoir se trouver.

Quand j’éprouve une sensation sans y penser je suis entièrement confondu avec ma sensation : je suis ce froid que j’éprouve en me baignant dans l’eau glacée.

Mais le suis-je vraiment ? Se demander si ma sensation de froid est bien tout ce que je suis c’est interroger l’indépendance du moi par rapport à la façon dont le monde l’affecte. En me demandant si ce froid c’est moi, je cesse d’être confondu avec ma sensation et je ne suis plus condamné à le subir.

Je ne suis pas la passion qui m’affecte ! Ainsi le doute peut se résumer ainsi : « cet état de conscience, est-ce bien moi ? ».

Il s’agit alors de refuser de faire de son expérience une évidence et distinguer ainsi le moi de ce qui l’affecte et donc de ce qui n’est pas lui.Descartes opérait de la même façon dans le Discours de la méthode, IV où il exerçait le doute radical pour parvenir à une vérité première indubitable.

Seulement, Descartes ne voyait pas que son doute était l’intermédiaire nécessaire à la reconnaissance de sa propre existence.

La conclusion « je pense donc je suis » passe sous silence toutes les étapes qui ont permis de parvenir à la conscience de soi. De ce fait, douter de ce qui nous définit permet de renouveler sans cesse la définition du moi : je rejette comme n’étant pas moi un certain nombre de perceptions, de pensées et je m’affirme par l’acte même de rejeter ces éléments comme me définissant.

Le moi se réactualise donc à chaque fois qu’il doute : il est le présent de la conscience. 4.

Celui qui se retrouve « tout entier » (l.5) est celui qui s’identifie à la totalité de ses pensées et expériences passées, et qui a ainsi la certitude de s’être trouvé.

Une telle certitude est incompatible avec l’exercice du doute.

Celui qui cesse de se demander s’il est vraiment ce dont il fait l’expérience cesse en même temps de se distinguer, de séparer le sujet qui se pense de l’objet qui est pensé et qui appartient toujours au passé de la conscience qui le tient après-coup.

Celui qui s’est entièrement défini ne peut pas se reconnaître car le moi présent, auteur de sa propre définition, ne ressemble en rien au moi passé.

En effet, le moi passé ne contenait pas encore les caractéristiques du moi présent qui lui seul peut se définir.

Il y a une parfaite originalité du moi présent que la totalité du passé ne parvient pas à dépeindre.

Alain affirme ainsi que « la conscience de soi est la conscience d'un devenir et d'une formation de soi irréversible »(l.6-7), ce qui signifie que la conscience de soi est conscience que le moi est moins dans le passé révolu, définitif que dans la pensée dynamique du moi présent qui saisit ce passé et ou tout autre objet de conscience. 5.

Je ne suis donc pas ce.... »

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