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Décide-t-on de devenir quelqu'un ?

Publié le 23/08/2005

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DEFINITIONS DES TERMES

- Décider (ce terme vient du latin decidere, qui vient lui-même de de qui indique l'éloignement, la séparation, la privation, et de cœdere, détacher en coupant, trancher) : • porter un jugement, adopter un conclusion définitive ; • arrêter, déterminer ce qu'on doit faire ; • prendre la décision, la détermination, le parti, la résolution de... - Devenir : passer d'un état à un autre ; commencer à être ce qu'on n'était pas. - Quelqu'un : attention ! Ce terme doit être analysé grammaticalement. S'il est suivi d'un partitif (ex. : quelqu'un de ces malheureux), il a une signification profondément différente de celle qui s'impose lorsqu'il est utilisé de manière absolue. Dans ce second cas, il désigne un être humain, une personne, soit absolument indéterminée (sens à exclure) soit, au contraire, faussement indéterminée (signification à retenir ici). Enfin, le dernier sens (un être de valeur remarquable) n'est nullement à délaisser (encore qu'il ne faille pas centrer uniquement autour de lui les analyses).  

Vouloir devenir quelqu'un, c'est déjà être un individu volontaire, ce qui n'est pas rien. Mais, la volonté ne suffit pas, car l'essentiel est de devenir soi-même, sans mimétisme ou opposition aliénant. La volonté doit être éclairée par une raison lucide.

« (remarquons Vindétermination du sujet de la question : il s'agit de tous les hommes) décide de devenir quelqu'un.

Leverbe décider (du latin decidere, de de et caedere, détacher en coupant, trancher, décider) suggère,immédiatement la notion d'un choix brusque et soudain : décider, c'est adopter une conclusion définitive à partir,certes, d'une réflexion qui a pu être longue, mais surtout par une détermination intérieure qui, elle, constitue unerupture.

Je détermine ce que je dois faire par un saut.

J'adopte une certaine résolution, à un moment (instantané)de mon existence : je vais changer, détacher, en coupant, ce qui devait être tranché (telle est la significationétymologique).

« L'homme nouveau » va naître, la rupture temporelle s'accomplir, le choix étant désormais fait, àpartir de plusieurs solutions possibles.

Ma décision est prise.Mais de quel choix s'agit-il exactement ici ? Ce choix concerne le fait de devenir quelqu'un.

Dans ce terme devenir, ily a l'idée de passer d'un état à un autre, de commencer à être ce qu'on n'était pas, de se faire autre que ce qu'onétait.

Autre, c'est-à-dire ici quelqu'un.

Ce terme désigne dans notre texte un être humain, une personne, un sujetet même, parfois, dans le langage plus ou moins populaire, un être de valeur.

Dans tous les cas, c'est l'idée d'unepersonne se construisant et s'édifïant, par un choix brusque, dans sa richesse multiforme et plastique qui intervient.Le sens du sujet est donc le suivant : prend-on la résolution et le parti de commencer à être (ce qu'on n'était pasauparavant), à savoir une personne se choisissant à travers ses multiples virtualités, un sujet (moral) et un êtrehumain dans toute sa dimension irréductible ?• Le problème découle de la question elle-même qui, par certains côtés, revêt une signification paradoxale.

En effet,la question suppose que le « quelqu'un » n'est pas donné, n'existe pas initialement.

Dès lors, le problème est lesuivant : est-ce bien par un choix libre que l'être humain se construit et s'engendre ou bien rencontre-t-il sur saroute une épaisseur et une opacité rendant impossible cette libre construction ? II.

Discussion. A.

Thèse : on décide de devenir un sujet et une personne. Dans l'idée de « décider de devenir quelqu'un », il y a tout d'abord la notion d'une rupture brusque, d'un passagesoudain par lequel on émerge d'un certain type d'être vers un sujet porteur de nouvelles valeurs et de nouvellesnormes.

En un acte (nouveau) émerge brusquement un « nouvel homme », étranger à ce qu'il fut, autre.

Cette idéed'une rupture brusque par laquelle on parvient à un être autre est encore accentuée par le terme « devenir » (quisouligne l'idée d'un passage vers autre chose).

Dans ce verbe « devenir », nous trouvons la notion d'une mutation,d'un changement et nous dirons même, d'une conversion.Mais la question posée contient une autre dimension quelque peu mystérieuse.

Une décision correspond, en effet, àun domaine psychique bien précis.

Qu'est-ce qu'une décision ? Elle désigne, dans un acte volontaire, la fin de ladélibération, le choix final (suivant cette délibération).

Entre plusieurs solutions possibles à un problème, une voieest alors privilégiée et choisie : tel est le moment de la décision.

Ici, la décision intervenant est celle d'accéder àune certaine forme de subjectivité.

Nous prendrions la résolution de devenir un certain sujet, d'accéder à un certaintype de « personne », ou - de manière moins abstraite - d'individualité.

Par exemple, cet homme ambitieux, jedécide, un beau jour, de l'incarner et de le construire.A priori, comment ne pas répondre affirmativement à la question posée ? A des moments cruciaux de notre vie, toutse passe comme si nous décidions de devenir quelqu'un ; certaines dimensions n'étaient encore en nous qu'à l'étatde virtualités.

Nous pouvions, à la limite, tout être car une infinie multiplicité était à notre disposition.

Mais nousdécidons, à une heure cruciale, une construction de nous-mêmes, une création de soi par soi, l'avènement d'uncertain type de sujet, ce « quelqu'un » dont nous parle l'intitulé.

Ainsi, parmi les possibilités et les virtualités quis'offrent à nous, il nous est permis, à certains moments, de choisir.

De ce point de vue, l'homme n'est que ce qu'ildevient, que ce qu'il s'efforce et décide d'être.

Nous façonnons notre personne et notre sujet par nos refus et noschoix.

Nous opérons alors une mutation décisive où nous formons, reformons et créons notre sujet et notrepersonne.

Ce quelqu'un dont parle l'intitulé, c'est, en moi, ce qui fait que je suis unique et personnel, un sujetportant en lui tout son passé et tendant vers l'avenir.

Or ce « quelqu'un » n'est pas donné.

Il est le fruit d'uneconstruction.

L'homme est, en effet, cet être dont la nature est inachevée et qui dispose d'une liberté pourl'accomplir.

« Devenir quelqu'un » renvoie donc à une création de soi par soi, coextensive à toute l'existencehumaine.Tel est le sens d'un des plus beaux mythes platoniciens, le mythe d'Er, fils d'Armenios, tel qu'il nous est conté dansle Livre X de la République.

Er, pris pour mort, conduit chez Pluton puis reconnu vivant et ramené, raconte ce qu'il avu là-bas.

Ce qu'il a vu ? le spectacle des âmes qui choisissent des genres de vie.

Les âmes éphémères qui ne fontque passer dans les corps vont commencer une nouvelle carrière et renaître à la condition mortelle.

Or les âmesvont choisir leur destinée : « Chacun est responsable de son choix, la divinité est hors de cause », écrit Platon.Ainsi sommes-nous responsables de notre destin.

Les âmes choisissent en toute liberté ; il leur est offert derecommencer tout à neuf, de tout changer !Cette scène que raconte Er le ressuscité n'est-elle pas celle de tous les moments de notre vie ? Nous décidons sanscesse de « devenir quelqu'un ».

D'instant en instant, les choix nous sont proposés.

A nous de faire le bon choix, deconstruire le « bon » sujet, de réaliser la vraie personne et, en somme, de bien décider. B.

Antithèse : la construction du sujet semble, néanmoins, nous échapper. S'il est vrai qu'en un sens nous décidons de devenir quelqu'un, à chaque instant, par une création de nous-mêmesoù la personne s'engendre et se fait continuellement, création libre que rien ne précède, en un autre sens, il sembleque nous n'ayions pas à décider de devenir « quelqu'un » : le « quelqu'un » n'est-il pas, en effet, un donné et nonpoint le fruit d'une libre création ? Telle est la question que l'on peut maintenant poser.« Décider de devenir quelqu'un » : cette proposition pourrait, au fond, être critiquée à un triple niveau : biologique,. »

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