Doctrine de la vérité-avantage (pragmatisme)
Publié le 31/08/2009
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La vérité n'est donc pas la qualité inhérente d'une idée, pas plus qu'elle n'est déposée dans les choses, forme inerte attendant d'être réveillée, comme la Belle endormie du conte, par le baiser d'un Prince, fut-il des Idées. Une idée n'est «vraie» que dans la mesure où elle permet la réussite d'une action ou d'une conduite quelconques. Autrement dit, il n'y a pas de vérités il n'y a jamais que des vérifications, elles-mêmes révisables et provisoires : «la vérité est un événement qui se produit pour une idée. Celle-ci devient vraie ; elle est rendue vraie par certains faits. Elle acquiert sa vérité par un processus...qui a pour but et pour résultat sa vérification». En somme, pour le pragmatisme, tant que la réalité ne vient pas contredire nos idées et faire obstacle ou échec aux entreprises que celles-ci nous inspirent, nous pouvons les tenir pour vraies. En ce sens, ajoute W. James, une idée est une invention dont la seule destination est d'être un guide de l'action. C'est pourquoi, hors d'une sanction pratique, «la vérité vit à crédit».
«
On voit le danger d'une telle doctrine.
Il est clair qu'il y a des vérités qui blessent et des mensonges qui
consolent.
La vérité est ici trop liée à la fac ilité, tandis qu'il faut souvent du courage, et même une
certaine abnégation, pour aboutir au vrai.
Qu'une affirmation soit consolante, réconfortante ou
rassurante ne la rend pas vraie pour autant , mais parfois même suspecte au point de vue de la vérité.
«
La foi sauve, dit Nietzsche , donc elle ment.
».
Le biologiste humaniste fran çais Jean Rostand (†1977)
ajoute: « Les vérités consolantes doivent être démontrées deux fois .»
Malgré ses outrances et ses simplifications, cette conception ne manque pas de pertinence et d'intérêt,
du moins chez ses inspirateurs originels, comme Peirce ou même W.
James.
Mais, sa vulgarisation
« utilitariste » dans le monde des affaires, du marketing et de la finance, l'a déformée jusqu'à la caricature
: l'idée vraie c'est l'idée qui «marche » et l'idée qui marche, bien entendu, c'est l'idée qui « paye»! Une
action efficace, rentable n’est pas forcément voire essentiellement juste et bonne.
On ne s'attardera pas
à réfuter cette version grossièrement mercantile et managériale du pragmatisme qui nourrit aujourd'hui
l'idéologie ordinaire des «business schools » et un certain affairisme néolibéral triomphant.
Notons seulement qu'on ne saurait pr ésenter comme une «philosophie», un ensemble de recettes
opportunistes destinées à assurer à leurs émules des « succès» sonnants et trébuchants ; des idées ou
des croyances opposées ou rivales peuvent avoir les mêmes effets pratiques, sans que soit prouvé p ar-là
quoi que ce soit de leur vérité ou validité — pas plus que l'«efficacité» éventuelle d'un placebo sur un
patient, ne prouve la vérité de la médecine ou...
l'inutilité des médicaments ! Enfin, si on ne peut
déclarer vraies que les idées utiles ou «payantes », alors force est de constater qu'il y a dans l'existence
bien des situations o ù l'ignorance, la crédulité et la bêtise peuvent se révéler beaucoup plus «payantes »
que le savoir, la lucidité et l'intelligence ! La vertu propre de la vérité n'est pas de satisfaire nos chers
intérêts , mais de nous instruire sur le réel et sur nous -mêmes : la vérité s'impose à tous les esprits, elle
ne «fait de cadeau» à personne et c'est justement ce qui la rend précieuse ; qu'ici ou là, elle nous profite,
no us dérange ou nous indiffère, elle est d'abord ce devant quoi ma raison s'incline et c'est avec justesse
qu'on a pu dire que les vérités rassurantes devraient être démontrées deux fois.
Mais le pragmatisme a
sans doute une autre portée et un autre destin q ue cette apologie vulgaire et béate du «succès» et de
l'action «utile ».
Il pousse à s'interroger plus profondément sur les rapports que la vérité entretient avec
la pensée et l'existence de qui entend faire de la philosophie sa seule et unique «affaire », n on pas tant
parce qu'on l'a choisi, mais parce que l'on se sent «saisi» par elle comme par la plus urgente et la plus
impérieuse des né cessités.
CCL : A la limite le pragmatisme détruit l’idée même de vérité: L’utile est une chose, la vérité en est une
autre.
Par exemple, il est certes utile de croire en Dieu.
Cela n’exclut pas que cette croyance puisse être
illusoire .
Dans le pragmatisme, il y a confusion entre des domaines différents, celui du " pratique" et celui
de la “ valeur”.
Un mensonge peut aider à gu érir !.
»
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