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Emmanuel Kant, Critique de la raison pure, Esthétique transcendantale

Publié le 31/01/2020

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Emmanuel Kant, Critique de la raison pure, Esthétique transcendantale La géométrie est une science qui détermine synthétiquement, et pourtant a priori, les propriétés de l'espace. Que doit donc être la représentation de l’espace pour qu’une telle connaissance en soit possible? Il faut qu’il soit originairement une intuition ; car d’un simple concept, on ne peut tirer des propositions qui dépas- sent le concept, comme cela arrive pourtant en géométrie. Mais, cette intuition doit se trouver en nous a priori, c’est-à-dire antérieurement à toute perception d’un objet, et, par conséquent, être intuition pure et non empirique. En effet, les pro-positions géométriques, par exemple : l’espace n’a que trois dimensions, sont toutes apodictiques, c’est-à-dire qu’elles impliquent la conscience de leur nécessité; elles ne peuvent donc être des jugements empiriques ou d’expérience, ni en être conclues.

Mais comment peut-il y avoir dans l’esprit une intuition externe qui précède les objets mêmes, et dans laquelle leur concept peut être déterminé a priori? Cela ne peut évidemment arriver qu’autant qu’elle à son siège dans le sujet comme la propriété formelle qu’il a d’être affecté par des objets et d’en recevoir par là une

représentation immédiate, c’est-à-dire une intuition, par conséquent seulement

comme forme du sens externe en général.

Traduction J.-L. Delamarre et Fr. Marty, à partir de la traduction de J, Barni, Folio Essais, Gallimard, 1980, § 3, B 40-41, p. 93-94.

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COMMENTAIRE DE TEXTE La première phrase expose la nature de la géométrie, déjà présentée dans l'introduction de la Critique de la raison pure.

C'est un moment nécessaire de l'argu­ ment kantien, dans la mesure où l'exposition transcendantale d'un concept suppose l'existence d'une science synthétique et a priori.

Le philosophe distingue trois caractères de cette science qu'est la géométrie, son objet, à savoir les pro­ priétés de l'espace, et deux caractéristiques des propositions de la géométrie : la géométrie connaît l'espace de manière synthétique et a priori.

Elle porte sur l'espace puisqu'elle établit un certain nombre de propositions concernant des figures géométriques, par exemple « dans un triangle, les trois angles sont égaux à deux angles droits».

Or, ces propositions sont synthétiques eta priori.

Que veut dire par là Kant? Le caractère synthétique d'une proposition s'oppose à son caractère ana­ lytique: une proposition est analytique si le prédicat, c'est-à-dire ce qui est affirmé d'un sujet, est contenu dans le concept du sujet; une proposition est synthétique si le prédicat n'y est pas contenu.

Par exemple,« tout homme est un animal» est ana­ lytique parce que le concept exprimé par« homme» contient« animal », comme le montre la définition «l'homme est un animal rationnel».

En outre, une proposition est a priori, si sa connaissance est indépendante de l'expérience, c'est-à-dire si l'on peut en connaître la vérité sans avoir à se rapporter à ce que nous pouvons percevoir.

Ainsi «tout homme est un animal» est a priori, parce qu'il suffit de se rap­ porter au concept« homme », indépendamment de toute expérience, pour connaître la vérité de cette proposition.

Or, si une proposition est synthétique, comment peut­ elle être connue indépendamment de l'expérience, c'est-à-dire être a priori? Si le prédicat n'est pas contenu dans le concept du sujet, comment peut-il être affirmé du sujet indépendamment de toute expérience? Si je ne perçois pas une maison bleue, comment puis-je savoir la vérité de la proposition « cette maison est bleue »? La suite du texte apporte une réponse à cette question.

Puisque la géométrie porte sur les propriétés de l'espace, et que la géométrie est unè science synthétique a priori, l'espace doit être tel qu'une connaissance syn­ thétique a priori en soit possible.

Dans le deuxième mouvement, Kant examine un premier caractère de l'espace: l'espace doit être une intuition.

Tout d'abord, qu'est­ ce qu'une intuition? La notion d'intuition s'oppose à celle de concept: l'un et l'autre sont certes des représentations, c'est-à-dire des manières de se rapporter à un objet Mais par un concept, les objets sont seulement pensés et non donnés, autre­ ment dit nous n'y accédons pas directement.

En outre, un concept ne se rapporte pas à un objet singulier, mais à un ensemble d'objets.

Avoir le concept d'arbre, c'est penser aux arbres en général.

En revanche, par une intuition, nous accédons direc­ tement à quelque chose de singulier: avoir l'intuition d'un arbre, c'est être en contact avec tel arbre singulier.

Pourquoi l'espace ne peut-il être qu'une intuition? Si l'espace était un concept, alors toute proposition portant sur l'espace, c'est-à-dire toute proposition de la géométrie, serait analytique : autrement dit, il ne serait pos­ sible que de connaître les propriétés déjà contenues dans le concept d'espace.

En conséquence, on ne pourrait avoir des « propositions qui dépassent le concept», alors même que la géométrie est synthétique.. »

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