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En quel sens peut-on dire que l'attention est une vertu ?

Publié le 16/06/2009

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INTRODUCTION. - Concentrant l'esprit sur l'objet à connaître, l'attention permet une observation plus complète, fait apparaître des rapports qui sans elle échapperaient et par là permet de comprendre et d'expliquer. Dans le domaine moral, l'attention aux autres et aux choses découvre des désordres, des devoirs, un bien à réaliser auxquels l'inattentif reste aveugle : l'attention à soi est nécessaire pour juger de la valeur réelle de sa conduite, et en particulier pour déceler les intentions que voilent souvent des prétextes fallacieux. La vie morale est donc conditionnée par l'attention. Mais s'ensuit-il que, par elle-même, l'attention ait une valeur morale et en quel sens peut-on la ranger au nombre des vertus ?

« de La Palice pourrait conclure qu'il suffit de ne pas être inattentif pour avoir le droit de se dire attentif.

Or, noussavons assez qu'il n'en est rien.

L'inattention proprement dite est assez rare : c'est le plus souvent la distraction oula dissipation qu'on appelle ainsi.Or, le caractère commun de la distraction et de la dissipation est de fixer l'esprit sur des objets qui, dans lescirconstances considérées, ne devraient pas le retenir : on attribue à une distraction l'accident causé par le tropgrand intérêt que le chauffeur prenait à une conversation avec son voisin; mais si, regardant les voitures que nouscroisons, je comprends mal une question qui m'est posée, je la ferai répéter en m'excusant d'avoir été distrait.Le même fait est donc un fait d'attention ou de distraction suivant qu'on doit être attentif à l'objet sur lequel se fixel'esprit ou qu'il doit se concentrer sur autre chose.

Si, d'autre part, nous considérons l'attitude générale ou l'attitudedénommée attention, nous pouvons dire qu'elle consiste à se porter comme spontanément vers ce qu'il faut. B.

— Or, telle n'est pas l'attention examinée jusqu'ici. Partant de l'étymologie, nous avons insisté sur l'effort déployé pour concentrer l'esprit et considéré l'attentioncomme une tension.

Mais l'attention véritable est bien différente.

Nous venons de le voir, elle consiste moins dans laconcentration des forces suggérée par l'étymologie que dans une sorte de disponibilité, d'ouverture à tout ce quimérite notre intérêt.

C'est cette disponibilité qui fait le charme des relations avec des personnes pleinesd'attentions.Comme on le voit, le sens étymologique du mot « attention » s'est bien assoupli.

L'attention implique bien maîtrisede soi, mais rien de proprement tendu. IV.

— LA VÉRITABLE ATTENTION EST VERTU. A.

— La notion de vertu. Il nous faut procéder, sur ce mot à une correction analogue à celle que nous avons faite pour «attention ».Le substantif latin virtus veut bien dire force, courage.

Mais sauf dans quelques usages où il remplace purement etsimplement son correspondant latin, notre mot « vertu » a un autre sens.

La vertu est une disposition habituelle àfaire le bien, ou, préféreront dire les moralistes d'inspiration kantienne, à faire son devoir.Or, comme nous l'avons déjà indiqué en passant, la répétition, qui crée les habitudes, use peu à peu les résistances,en sorte qu'un acte habituel s'exécute sans grand effort et parfois comme automatiquement.

Ainsi, tandis que lavertu des commençants demande la concentration de toutes les énergies, celle des parfaits — la vertu véritable —permet de faire avec aisance ce qui demande au commun des humains la mobilisation de toutes leurs forces. B.

— La véritable attention présente ces caractères. Comme nous l'avons dit, elle implique l'aisance, la facilité qui distingue la véritable vertu.De plus, de même que la vertu consiste, non pas simplement à déployer une grande énergie, mais à chercher le bienet à faire son devoir, l'attention ne consiste pas à concentrer son esprit sur n'importe quoi : elle n'est véritable quesi le sujet se porte sur ce qui convient, sur ce qu'il doit, dans les circonstances données.

Or, ces expressionsappartiennent au vocabulaire de la morale.Sans doute, le caractère moral ou éthique de ce qui convient ou de ce qu'on doit en ce qui concerne l'attentionpeut ne pas apparaître immédiatement.

Mais il n'est pas besoin de creuser bien profond pour voir que les jugementspar lesquels nous déterminons l'attention véritable se réfèrent au sens ou au but que nous donnons à la vie.

C'estdire en d'autres termes que l'attention véritable a une valeur morale et que c'est une forme de la vertu. CONCLUSION. - « L'attention de l'esprit » dit MALEBRANCHE, est « une prière naturelle par laquelle nous obtenons que la Raison nous éclaire ».

Cette réflexion nous mettra sur la voie de la réponse à faire à la question précise àlaquelle nous avons à répondre en quel sens peut-on dire que l'attention est une vertu »De même qu'elle n'est pas la prière véritable, laquelle met l'âme en rapport avec Dieu, elle n'est pas une vertuproprement dite comme la sobriété ou la charité : la vertu, en effet, est ordonnée au bien moral, tandis quel'attention est ordonnée au réel et au vrai.

Elle ne fait que conditionner la vertu et y prédisposer, tout comme elleconditionne la présence à Dieu et y prédispose.Toutefois il faut dire davantage, car il reste à se demander le pourquoi de l'attention, le ressort qui la déclenche etla maintient.

On est alors amené à reconnaître que c'est quelque chose de l'ordre du bien, et que l' « attentionnaturelle » dont parle MALEBRANCHE est une recherche plus ou moins inconsciente de Dieu.Voilà, semble-t-il, en quel sens on peut dire que l'attention est une vertu.. »

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