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Est-ce dans la solitude que l'on prend conscience de soi ?

Publié le 22/02/2012

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La « conscience de soi » fait partie des concepts propres à la philosophie et, conséquemment du programme, il importe donc de disposer d'une définition claire afin de mener une problématisation satisfaisante. Ainsi il est légitime de définir la conscience de soi comme un « acte cognitif par lequel un sujet se saisit lui-même. » Il s'agit à proprement parler d'une « aperception » c'est-à-dire le sentiment clair de ce qui se passe au niveau de notre esprit. Il fallait faire attention à ne pas assimiler conscience de soi et connaissance de soi : je puis avoir conscience de quelque chose sans pourtant connaître cet objet (dans ce qu'il est en soi, dans sa structure par exemple). Il convenait en tous cas de différencier, a minima, la « conscience de soi » de la conscience « directe » ou « immédiate » afin d'éviter le hors sujet ; l'absence de définition claire de la « solitude » est aussi préjudiciable. Même s'il ne s'agit pas d'une notion spécifique, elle avait été abordée par le moyen du texte de Tournier ou encore par le biais de la démarche cartésienne à propos du solipsisme auquel aboutit Descartes au terme de la seconde méditation. Le solipsisme est une doctrine consistant à estimer que seule notre pensée individuelle existe, donc que nous sommes radicalement seuls.
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« 3.1.

Thèse : pas de prise de conscience de soi sans solitude Descartes , dans le Discours de la méthode , se présente ici comme une référence indépassable.

Il atteint en effet un degré de solitude tout à fait singulier : cherchant la vérité, il s'isole du monde et, dans le secret de son célèbre « poêle où [il avait] tout leloisir de [s']entretenir de [ses] pensées » (2ème partie), loin des opinions des autres et du jeu social qui contraint à la fausseté, il «feint » de penser que toutes les choses qui « [lui] étaient jamais entrées dans l'esprit étaient non plus vraies que les illusions de[ses] songes » (4ème partie).

Non seulement il se tient à l'écart des autres et du monde, mais encore il en biffe le souvenir,éradique toutes ses expériences, dévalue toutes ses perceptions, rature tous ses raisonnements, congédie sa mémoire.

Le doutehyperbolique ajoute à l'isolement physique une solitude mentale si catégorique qu'elle confine à l'aliénation. Descartes ménage autour de lui le « no man's land » du doute, dont il accroît hyperboliquement le champ, rejetant tous les objets du monde à une distance infinie mais lui qui révoque ainsi le monde entier en doute, exerce volontairement une puissancecognitive ; or cette puissance existe nécessairement puisqu'elle produit des effets sensibles.

« Aussitôt après , je pris garde que, pendant que je voulais ainsi penser que tout était faux, il fallait nécessairement que moi, qui le pensais , fusse quelque chose ».

Relevons l'emploi des temps et des adverbes temporels : c'est bien par cette solitude catégorique, et aussitôt après elle, que le doute hyperbolique, jusque-là volonté radicale d'écarter le faux motivée par la pensée résolue à atteindre le vrai, toutsoudain cesse de se présenter comme une puissance déployée contre le monde extérieur pour devenir la toile de fond, le décor, le lieu où la révélation intérieure du cogito survient. On comprend alors que la solitude catégorique du doute hyperbolique n'est pas encore la solitude absolue : car, au momentde la ressaisie de la conscience par elle-même, à l'instant du cogito , le « je » occupe instantanément tout le champ de la conscience ; il en évacue tout le reste ; et c'est à cet instant précis que Descartes atteint la solitude absolue – puisqu'il n'a plus conscience de rien d'autre.

Non seulement la solitude catégorique du doute hyperbolique prépare la prise de conscience de soipar le cogito , mais encore la révélation du cogito accomplit du même coup la solitude absolue. 3.2.

Antithèse : la solitude interdit la conscience lucide de soi L'explication cartésienne vaut peut-être dans certaines circonstances très particulières ; mais d'une manière générale, et contrairement aux idées reçues, la solitude n'est guère propice à l'introspection.

Au contraire ! La sensation de solitude interditpresque toujours la réflexion posée.

Règne de l'imaginaire et de l'émotion, situation désagréable, voire douloureuse, la solitudes'analyse comme l'antithèse du calme et de la sérénité (cf : Tournier)Sans entrer dans les catégories extrêmes du fantasme ou de la démence, la solitude présente un grave inconvénient : du fait mêmeque nous sommes subjectifs, il nous est impossible d'avoir un regard objectif sur les choses – c'est même l'une des raisons pourlesquelles Descartes recourt au doute hyperbolique ; à plus forte raison sur cette chose très particulière qu'est nous-mêmes car non seulement nous avons sur nous-mêmes un regard subjectif, mais en plus ce regard se trouble d'un amour-propre ou d'unemauvaise foi qui faussent profondément le jugement à notre propre égard.

On pouvait également, rappeler Husserl et la conscience conçue comme intentionnalité. À l'isolement de Descartes dans son poêle, on pourrait opposer cette autre expérience : autrui parvient parfois à me révéler à moi-même une facette de ma personnalité à laquelle je n'avais, jusqu'alors, jamais pris garde. Sartre expose ce type de situation dans la célèbre « expérience du regard d'autrui », dont il conclut : « Je suis partiellement tel qu'autrui me voit.

» Aussi, dans cetteperspective, la présence d'autrui permet-elle, pourvu que nos échanges ne soient pas superficiels ou standardisés selon lesnormes de la société de consommation, une prise de conscience de certains aspects de moi, encore obscurs. Il était du reste également possible de remarquer que la présence d'autrui m'ouvre l'univers des relations interpersonnelles et laformidable richesse des échanges qu'elles proposent.

En particulier, je puis prendre conscience de ma nature profonde « d'animalpolitique », « d'animal parlant », seul, je suis bien moins que la moitié de mon potentiel, car la complexité du jeu social me permetde jouer une foule de rôles que je n'aurais peut-être jamais imaginé si j'étais resté à l'écart. 4.

La synthèse Le sujet autorisait de très nombreuses synthèses ; mais une idée du type : il faut alterner la solitude et la compagnie », sans autre explication paraît inopérante pour la raison suivante : la prise de conscience de soi du cogito présente cette particularité d'être un événement ponctuel, unique et définitif.

Une fois prise la conscience de sa propre existence dans l'affirmationcatégorique « Je pense, donc je suis », point n'est besoin d'y revenir ultérieurement.

Dès lors, à quoi bon retourner vers les autres,pour repartir plus tard dans la solitude où nous ressasserons un même cogito sans rien lui apporter ?. »

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