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Freud: « Tu aimeras ton prochain comme toi-même »

Publié le 27/02/2008

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Or, parmi les exigences idéales de la société civilisée, il en est une qui peut, ici, nous mettre sur la voie. « Tu aimeras ton prochain comme toi-même », nous dit-elle. Célèbre dans le monde entier, cette maxime est plus vieille à coup sûr que le christianisme, qui s'en est pourtant emparé comme du décret dont il avait lieu de s'estimer le plus fier. Mais elle n'est certainement pas très ancienne. A des époques déjà historiques, elle était encore étrangère aux hommes. Mais adoptons à son égard une attitude naïve comme si nous l'entendions pour la première fois ; nous ne pouvons alors nous défendre d'un sentiment de surprise devant son étrangeté. Pourquoi serait-ce là notre devoir ? Quel secours y trouverions-nous ? Et surtout, comment arriver à l'accomplir ? Comment cela nous serait-il possible ? Mon amour est à mon regard chose infiniment précieuse que je n'ai pas le droit de gaspiller sans en rendre compte. Il m'impose des devoirs dont je dois pouvoir m'acquitter au prix de sacrifices. Si j'aime un autre être, il doit le mériter à un titre quelconque. Il mérite mon amour lorsque par des aspects importants, il me ressemble à tel point que je puisse en lui m'aimer moi-même. Il le mérite s'il est tellement plus parfait que moi qu'il m'offre la possibilité d'aimer en lui mon propre idéal ; je dois l'aimer s'il est le fils de mon ami car la douleur d'un ami, s'il arrivait malheur a son fils, serait aussi la mienne ; je devrais la partager. En revanche, s'il m'est inconnu, s'il ne m'attire par aucune qualité personnelle et n'a encore joué aucun rôle dans ma vie affective, il m'est bien difficile d'avoir pour lui de l'affection. Sigmund FREUD.

Eléments d’introduction

-          Déjà, dans L’avenir d’une illusion en 1927, Freud évoquait la part du désir dans la plupart de nos croyances comme les constituant comme illusions. C’est pourquoi Freud qualifie la religion d’illusion. Pourtant la croyance religieuse porte sur un domaine qui, par définition, échappe à toute affirmation comme à toute infirmation possible. Celui qui croit n’est pas et ne peut pas être, par conséquent, dans l’erreur à proprement parler. Il est néanmoins dans l’illusion, selon Freud, parce que le désir qui tranche ici, et induit la croyance. En réalité, c’est le désir archaïque d’un Père tout-puissant, juste et protecteur qui produirait la croyance en Dieu.

-          Ici, Freud s’attaque plus particulièrement à la maxime religieuse « tu aimeras ton prochain comme toi-même «. Un passage central de Malaise dans la civilisation (début du chapitre V) est consacré par Freud à son étonnement devant cette exigence, qu’il pense antérieure au christianisme, et considère comme l’une des plus paradoxales parmi les idéaux de la « société civilisée «. Cet étonnement est repris par Lacan dans plusieurs passages de son enseignement, où il n’hésite pas à suggérer que Freud a su discerner dans cet impératif une face d’« horreur «.

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« Freud pose d'abord l'objet général de son analyse, à savoir l'étude particulière d'un des idéaux de lasociété civilisée que constitue la maxime « tu aimeras ton prochain comme toi-même ; ainsi qu'unecontextualisation historique et culturelle.

Puis, Freud expose clairement, par une série dequestionnement, le problème que sous-tend effectivement la maxime « tu aimeras ton prochaincomme toi-même ». · Le second mouvement s'étend de « Mon amour est à mon regard » jusqu'à la fin de notre extrait. Dans ce second temps, il s'agit pour Freud de répondre au questionnement qui précède, logiquement,en procédant à une analyse de l'amour et des conditions de développement de l'empathie.

Il s'agitdonc de procéder à une analyse psychologique qui vise à mettre à jour, l'impossibilité effective àréaliser une tel maxime. Problématique Quel statut peut-on conférer à la maxime religieuse, et plus particulièrement chrétienne, « tu aimeras ton prochain comme toi-même » ? Que peut-on à partir d'une analyse psychologique encrée dans une réalité proprementhumaine, conclure de la possibilité de réaliser une telle maxime, et ce de manière complète et totale, c'est-à-dire demanière absolue ? En réalité, il s'agit de confronter ici l'idéal d'une maxime à la réalité du genre humain afin decomprendre la critique freudienne de cette maxime, et plus profondément de la religion.

Critique non purementnégative, puisqu'il s'agit simplement de voir, qu'en tant qu'idéal, cette maxime ne prend pas en compte la naturecomplexe de l'homme.

En quoi une telle exigence peut-elle illustrer la dialectique qui se joue selon Freud dans laculture, tout à la fois contre et au moyen d'Éros ? Pourquoi peut-elle effectivement susciter un mouvement derecul ? Explication - PREMIER MOUVEMENT · L'extrait de notre texte place d'emblée l'analyse de la maxime « tu aimeras ton prochain comme toi-même » sous le signe d'une exigence de la société civilisée.

En cela, on s'aperçoit que cettemaxime correspond donc à un idéal de culture, c'est-à-dire à un idéal de l'homme en tant que celui-ciappartient à une société culturelle. · Il s'agit d'abord de souligner l'apparente universalité de cette maxime, mais toujours du point de vue de l'idéal (c'est-à-dire comme idée qui réaliserait parfaitement l'accomplissement d'un type, icil'amour).

Si le christianisme semble l'avoir reprise à son compte, Freud semble penser que cettemaxime remonte à bien pus loin dans l'histoire de l'humanité.

Il remet donc ainsi en question lemonopole chrétien, du point de vue de son origine, sur un tel idéal.

Tout en à montrer, en creux, quecet idéal est, avant d'être un idéal religieux, un idéal de la culture en général.

Elle serait ainsi l'idée detoute société parvenue ainsi à exorciser l'insociabilité originaire de l'homme, elle serait, du point devue de l'amour, de l'amitié, de la sympathie, voire de l'empathie, l'idéal de toute culture : c'est-à-direcondition de son accomplissement parfait. · Pourtant, si Freud pense qu'elle n'est pas originairement morale chrétienne, elle n'est pour autant pas fondée de tout temps, c'est-à-dire atemporelle.

Il semble en effet qu'il tende à montrer qu'unetelle maxime n'est pas si archaïque que nous avons l'air de le penser premièrement.

Or, il estnécessaire de noter que cette remise en cause de l'atemporalité de cette maxime ( si vieille qu'onpourrait la croire de toute éternité et donc au principe même de toute formation culturelle), vientmettre en doute à la fois sa nécessité et son universalité.

Si une telle maxime n'a pas toujours existé,ou n'est pas si vieille qu'on ne puisse la dater, c'est alors qu'elle est tout à la fois contingente et nonuniverselle.

Cette donc l'universalité d'une telle maxime, comme fondement idéal que se donne et doitse donner toute société qui est ici dénoncée par Freud : il montre, a fortiori, la relativité d'une tellemaxime. · Cependant, et sur ce pied que va partir l'analyse freudienne de l'amour envers son prochain, il faut, pour l'étudier de manière la plus conséquente possible, adopter une attitude naïve, c'est-à-direnon partisane (au moins au départ).

Or, de ce point de vue, la maxime semble susciter un sentimentd'étrangeté et de surprise.

Il apparaît donc qu'elle semble être loin d'aller de soi ? Une fois encore,c'est sa relativité qui est ici mise à jour. · C'est sur cette base que se pose une série de question qui seront la base problématique du second mouvement.

De quel droit et en quel sens une telle maxime pourrait constituer un devoir àproprement parler, c'est-à-dire sur quelle définition de la civilisation, de la nature humaine, cettemaxime se fonde-t-elle ? Se pose alors la question de l'intérêt d'une telle maxime, et surtout desconditions de la réalisation effective.

Il s'agit donc pour Freud de montrer que cette maxime est unpur idéal qui ne s'appuie sur aucun fondement réel et effectif de la définition et de la fonction de lacivilisation ainsi que de la nature humaine.

Ce qu'il va développer dans le second mouvement. - SECOND MOUVEMENT. »

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