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Hegel : « L'histoire comprise »

Publié le 22/03/2015

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hegel

« [...] l'histoire [...] présente un mouvement lent et [une] succession d'esprits, une galerie d'images dont chacune, dotée de la richesse complète de l'esprit, se meut de façon si lente pour la raison justement que le Soi a à traverser et à digérer cette richesse totale de sa substance. En tant que son achèvement consiste à savoir parfaitement ce qu'il est, sa substance, ce savoir est son aller-dans-soi, dans lequel il abandonne son être-là et remet sa figure au souvenir. Dans son aller-dans-soi, il est abîmé dans la nuit de son autoconscience, mais son être-là disparu est conservé dans cette nuit, et cet être-là sursumé — le précédent, mais rené du savoir —est le nouvel être-là, un nouveau monde et [une nouvelle] figure de l'esprit. Dans elle il a aussi bien à recommencer ingénument par son immédiateté, et à s'éduquer de nouveau à partir d'elle comme si tout ce qui précède était perdu pour lui et qu'il n'avait rien appris de l'expérience des esprits antérieurs. Mais l'in-tériorisation les a conservés, et est l'intérieur et la forme, en fait plus haute, de la substance. Si donc cet esprit, qui paraît partir de soi seulement, recommence sa culture depuis le début, c'est en même temps à un niveau plus élevé qu'il commence. Le royaume des esprits, qui de cette manière s'[est] formé dans l'être-là, constitue une succession où l'un relayait l'autre et [où] chacun reprenait du précédent le royaume du monde. Son but est la révélation de la profondeur, et celle-ci est le concept absolu ; cette révélation, du coup, est le sursumer de sa profondeur, ou son extension, la négativité de ce Je étant-dans-soi, laquelle est son extériorisation ou substance, — et son temps, selon lequel cette extériorisation s'extériorise en elle-même, et ainsi dans son extension est aussi bien dans sa profondeur, [dans] le Soi. Le but, le savoir absolu, ou l'esprit se sachant comme esprit, a pour chemin sien l'in-tériorisation des esprits, tels qu'ils sont en eux-mêmes et accomplissent l'organisation de leur royaume. Leur conservation, selon le côté de leur être-là libre apparaissant dans la forme de la contingence, est l'histoire, mais, selon le côté de leur organisation comprise, la science du savoir qui-apparaît; les deux ensemble, l'histoire conçue, forment l'in-tériorisation et le calvaire de l'esprit absolu, l'effectivité, vérité et certitude de son trône, sans lequel il serait ce qui est solitaire dépourvu de vie ; seulement —

aus dem Kelche dieses Geisterreiches

schàumt ihm seine Unendlichkeit.

hegel

« Textes commentés 51 La conscience philosophique est une conscience qui, dans toutes les figures du savoir -culturel, politique, religieux - a gagné la capacité de comprendre ce qui se joue dans l'immédiateté des événements.

Il s'agit donc d'une conscience éminemment historique, aux antipodes de l'abstraction dont on' pense communément que le savoir conceptuel se trouve affligé.

L'histoire i conçue (begriffne Geschichte) conjugue la contingence de« ce qui advient» et la puissance organisatrice dont se trouvent comptables le « concept » et sa logique.

D'un côté, la pleine temporalité de ces images ou esprits que sont les figures de civilisation, les événements de l'histoire politique et religieuse ; de l'autre, la saisie intemporelle de leur signification rassemblée, par le jeu d'une intériorisation-souvenir qui abolit la succession pour dire l'unité de l'esprit.

Sur cette vision grandiose se clôt la Phénoménologie de l'esprit.

L'histoire contingente déroule ses splendeurs et ses misères, et la conscience chemine, à l'aveugle souvent, parmi ces pièces d'un puzzle géant dont les limites échap- i pent à sa représentation.

Il lui revient, dépouillant peu à peu les unilatéralités objective et/ou subjective qui marquent d'abord son appréhension des choses, de naître à la logique d'un procès de sens qui dessine la trajectoire d'une liberté.

Liberté qui est au point de rencontre de cette suite d'événements - galerie d'images, qui se déroule avec lenteur et majesté -et d'une révélation de l'esprit - l'intériorité de l'homme, porteuse de l'absolu des représentations religieuses -qui ne devient réellement « principe » et n'échappe à son abstraction qu'en se livrant au calvaire de sa propre mort, dont la face positive est l'effectivité, vérité et certitude de son trône.

Adaptant de façon libre deux vers d'une poésie de Schiller, Hegel suggère que l'accomplissement de l'homme dans sa vérité spirituelle a pour condition ce que l'on pourrait appeler l'auto-rédemption d'un Dieu qui accepte de jouer 1 son effectivité dans les régions de la contingence : « Du calice de ce royaume des esprits écume jusqu'à lui son infinité.

» La philosophie de Hegel épouse la figure de cette effectuation l'un par l'autre de Dieu et de l'homme -de la représentation et du concept, du temps et de l'éternité.

Non pas dans l'évidence trompeuse d'une figure en laquelle l'histoire trouverait son achèvement et sa perfection, mais dans la promesse d'une intelligence en advenir, jamais achevée, jamais achevable.. »

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