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Hobbes: Langage et passions

Publié le 10/01/2004

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Les noms des choses qui ont la propriété de nous affecter, c'est-à-dire de celles qui nous procurent du plaisir ou du déplaisir, ont, dans la conversation courante des hommes, une signification changeante parce que tous les hommes ne sont pas affectés de la même façon par la même chose, ni le même homme à des moments différents. Etant donné en effet que tous les noms sont donnés pour signifier nos représentations, lorsque nous avons des représentations différentes des mêmes choses, nous ne pouvons pas facilement éviter de leur donner des noms différents. Car même si la nature de ce que nous nous représentons est la même, il reste que la diversité des façons que nous avons de la recueillir, diversité qui est fonction de la différence de constitution de nos corps et des préventions de notre pensée, donne à chaque chose une teinture de nos différentes passions. C'est pourquoi, lorsqu'ils raisonnent, les hommes doivent prendre garde aux mots, lesquels ont aussi, au delà de la signification de ce que nous imaginons leur être propre, une signification renvoyant à la nature, à la disposition et à l'intérêt de celui qui parle ; tels sont les noms des vertus et des vices : car un homme appelle sagesse ce qu'un autre appelle crainte ; et l'un appelle cruauté ce qu'un autre appelle justice ; l'un prodigalité ce qu'un autre appelle magnificence ; l'un gravité ce qu'un autre appelle stupidité, etc. Il en résulte que de tels noms ne peuvent jamais être les véritables fondements d'aucune espèce de raisonnement. Les métaphores et les figures du discours ne le peuvent pas davantage : mais elles sont moins dangereuses parce qu'elles professent leur caractère changeant, ce que ne font pas les autres noms.

Nous jugeons des vices et des vertus, du bien et du mal, en fonction de nos passions. Or, ces passions diffèrent d'un homme à un autre. Ce que l'un nomme vice, l'autre peut l'appeler vertu. Les noms ne signifient pas la même chose pour tout le monde. Il est donc dans le domaine moral impossible de se mettre vraiment d'accord sur le sens des mots, chacun y projette ses propres passions. Le langage, dont le but est de communiquer, de dialoguer, de "s'entendre" au sens fort du terme, est donc le lieu d'un perpétuel malentendu. Et cela, là où il serait urgent de s'entendre : la vie commune entre les hommes, la morale et la politique.  Comment donc l'Homme peut-il surmonter ce handicap originel du langage pour parvenir à dialoguer vraiment avec les autres hommes ?  

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« C'est la thèse du texte.

Les noms ont une signification différente selon les individus qui jugent en fonction de lamanière dont ils sont affectés par les choses. 2) "Etant donné [...] passions" Justification et approfondissement de la thèse.- "Etant donné [...] noms différents" : Les noms ont pour origine notre représentation des choses.

En d'autrestermes, les choses n'ont pas un nom naturel, tout nom est une convention, une étiquette que nous posonsartificiellement sur les choses.- "Car même [...] différentes passions" : Le langage a pour origine nos passions.

Nous nommons les choses enfonction de nous-même, non par fidélité aux choses elles-mêmes.

Le plaisant et le déplaisant sont jugés tels enfonction de la "constitution de nos corps".

Les vices et les vertus sont jugés en fonction "des préventions de notrepensée", c'est-à-dire de nos préjugés. 3) "C'est pourquoi, [...]" jusqu'à la fin du texte Hobbes tire les conséquences pratiques de sa thèse.

Il donne ainsi des éléments de réponse à la problématique quenous avons dégagée :- Il ne faut pas faire confiance au langage.

Le raisonnement est cette activité qui permet de déblayer les faux-sens,les contresens...

Il n'y a pas de "mot de la fin", simplement une activité, le raisonnement critique, qui tente de luttercontre les mots marqués par les passions humaines.- Il faut considérer les mots comme des figures de rhétorique, c'est-à-dire comme artificiels. B - ETUDE CRITIQUE Il convient de situer Hobbes dans une problématique générale du langage.

Hobbes ici se montre résolumentnominaliste.Les noms ne sont que des noms, de simples étiquettes, ne révélant rien des choses elles-mêmes.

Il s'oppose ainsiaux réalistes (cf.

Platon) pour qui les noms révèlent la réalité de la chose.

Certains poètes (ex : Mallarmé)cherchent à nommer les choses elles-mêmes pour en cerner l'essence.L'apport de Hobbes est le suivant : si les noms ne révèlent pas les choses, ils révèlent cependant les passionshumaines, à ce titre ils ne sont pas de simples étiquettes. IV - DES REFERENCES UTILES Platon, Le CratyleMallarmé, PoésiesPonge, Le parti pris des chosesV - LES FAUSSES PISTES S'enfermer dans une question de cours sur le langage.

Bien voir l'enjeu moral et politique du texte. VI - LE POINT DE VUE DU CORRECTEUR Un texte clair qui demande une lecture rigoureuse, sans difficulté conceptuelle notable. HOBBES (Thomas).

Né à Malmesbury en 1588, mort à Hardwick en 1679. Il fit ses études à Oxford et devint précepteur du jeune comte de Devonshire qui, plus tard, devait lui confier aussil'éducation de son propre fils.

Il fit deux longs voyages en Europe, vécut à Paris de 1640 à 1651, y fréquenta le P.Mersenne, puis rentra en Angleterre.

La Chambre des Communes exigea qu'il ne publiât plus aucun livre, après avoirvivement attaqué Léviathan en 1667.

La fin de la vie de Hobbes fut occupée par des controverses avec lesmathématiciens.

— L'oeuvre de Hobbes est une théorie et une apologie fort logiques du despotisme.

Toutes lessubstances sont corporelles et la vie est mouvement.

Le désir, fondement du monde animal, est égoïste et guidé parl'intérêt.

Il n'y a ni amour ni accord possible entre les hommes ; ceux-ci sont naturellement insociables et méchants.L'état de nature, c'est la guerre de tous contre tous.

Mai les hommes, qui considèrent que la paix est le plus granddes biens, confèrent tous leurs droits à un seul souverain.

Ils remplacent l'ordre mécaniste naturel par un ordre. »

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