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Jésus-Christ dans les Pensées de Blaise PASCAL

Publié le 23/03/2011

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Ce chapitre sera le plus décisif de ce livre. Pascal a atteint le but où il se reposera : il est aux pieds de Jésus-Christ. Là, sa pensée devient si claire, qu'elle n'a plus besoin d'être commentée. Tout est parfaitement simple et raisonnable autour de cette lumière et en elle.    Pascal parle donc, maintenant, avec une ampleur et une netteté souveraine, sans complication ni mystère.    Il écarte d'abord tous les problèmes métaphysiques, théologiques ou mystiques. Il ne scrute pas le mystère de l'Incarnation, ni l'union en une seule personne de la nature humaine et de la nature divine, ni la grâce efficace, ni la grâce suffisante, ni même le salut.    Jésus-Christ est pour lui comme un arbre, ou une montagne : un objet réel. Il ne cherche pas au delà de cette existence qui est un fait absolu ; elle seule intéresse les hommes et lui, parce qu'elle    seule intéresse la condition des hommes et la sienne.

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« Il est impossible de ne pas citer tout le fragment de Pascal. La distance infinie des corps aux Esprits figure la distance infiniment plus infinie des Esprits à la Charité, car elle estsurnaturelle. Tout l'éclat des grandeurs n'a point de lustre pour les gens qui sont dans les recherches de l'esprit, La grandeur des gens d'esprit est invisible aux rois, aux riches, aux capitaines, à tous ces gens de chair. La grandeur de la sagesse, qui est nulle sinon de Dieu, est invisible aux charnels et aux gens d'esprit.

Ce sont troisordres différents de genre. Les grands génies ont leur empire, leur éclat, leur grandeur, leur victoire, leur lustre, et n'ont nul besoin desgrandeurs charnelles, où elles n'ont pas de rapport.

Ils sont vus non des yeux, mais des esprits, c'est assez. Les saints ont leur empire, leur éclat, leur victoire, leur lustre, et n'ont nul besoin des grandeurs charnelles ouspirituelles, où elles n'ont nul rapport, car elles n'y ajoutent ni ôtent.

Ils sont vus de Dieu et des anges, et non descorps ni des esprits curieux : Dieu leur suffit. Archimède, sans éclat, serait en même vénération.

Il n'a pas donné des batailles pour les yeux, mais il a fourni àtous les Esprits ses inventions.

Oh ! qu'il a éclaté aux Esprits. Jésus-Christ sans bien, et sans aucune production au dehors de science, est dans son ordre de sainteté.

Il n'a pointdonné d'invention.

Il n'a point régné.

Mais il a été humble, patient, saint, saint, saint à Dieu, terrible aux démons,sans aucun péché.

O ! qu'il est venu en grande pompe et en une prodigieuse magnificence, aux yeux du cœur, etqui voient la sagesse ! Il eût été inutile à Archimède de faire le prince dans ses livres de géométrie, quoiqu'il le fût. Il eût été inutile à Notre-Seigneur Jésus-Christ, pour éclater dans son règne de sainteté, de venir en roi ; mais il yest bien venu avec l'éclat de son ordre. Il est bien ridicule de se scandaliser de la bassesse de Jésus-Christ, comme si cette bassesse était du même ordreduquel est la grandeur qu'il venait faire paraître.

Qu'on considère cette grandeur-là dans sa vie, dans sa passion,dans son obscurité, dans sa mort, dans l'élection des siens, dans leur abandon, dans sa secrète résurrection, etdans le reste : on la verra si grande qu'on n'aura pas sujet de se scandaliser d'une bassesse qui n'y est pas. Mais il y en a qui ne peuvent admirer que les grandeurs charnelles, comme s'il n'y en avait pas de spirituelles : etd'autres qui n'admirent que les spirituelles, comme s'il n'y en avait pas d'infiniment plus hautes dans la sagesse. Tous les corps, le firmament, les étoiles, la terre et ses royaumes, ne valent pas le moindre des esprits ; car ilconnaît tout cela, et soi ; et les corps, rien. Tous les corps ensemble, et tous les esprits ensemble, et toutes leurs productions, ne valent pas le moindremouvement de charité ; cela est d'un ordre infiniment plus élevé. De tous les corps ensemble, on ne saurait en faire réussir une petite pensée : cela est impossible, et d'un autreordre.

De tous les corps et esprits, on n'en saurait tirer un mouvement de vraie charité ; cela est impossible, et d'unautre ordre, surnaturel (753); Pierre Duhem estimait que cette théorie des ordres était la clef du symbolisme Pascalien, et nous ouvrait toute saphilosophie, sa philosophie scientifique, sa philosophie morale, sa philosophie religieuse.

Elle nous explique le Christ. Rétabli en sa place, quel rôle Jésus-Christ est-il venu tenir parmi les hommes ? Tout de suite la réponse monte aux lèvres : Jésus-Christ est venu en ce monde pour sauver les âmes, une à une. Sans doute, mais pourquoi limiter son action et sa présence au salut des âmes, prises une à une ? N'a-t-il pas vouluêtre une source commune de vie, une source où tous les hommes puiseront ensemble ? Oui ! plutôt.

Et c'est ici le grand secret, méconnu, de la philosophie et de la mystique pascalienne. Chose curieuse, ce grand « solitaire » qui redoutait à la fin de sa vie jusqu'aux tendresses de famille, est l'homme dece siècle qui a le mieux compris l'unité du genre humain.

Il ne faudrait pas le presser bien fort pour lui faire déclarerque le péché de l'homme, c'est de vivre « séparé ».

Le Moi est haïssable, parce qu'il se fait « centre » (455).

Leshommes sont membres d'un même corps, ils ne peuvent être heureux que s'ils conforment leur volonté particulière àleur volonté générale.

Pour Pascal, c'est toute la morale.. »

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